Nucléaire iranien : l'initiative de Netanyahou passe mal

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avec AFP , modifié à
AMITIÉ DIFFICILE - Benjamin Netanyahou, en visite aux États-Unis, ne rencontrera pas Barack Obama, sur fond de désaccord au sujet du dossier iranien.

La crise entre les États-Unis et Israël au sujet du nucléaire iranien a franchi un nouveau cap. Les deux pays sont en désaccord persistant sur un accord que Washington veut sceller rapidement avec Téhéran, mais que son allié entend torpiller. Benjamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, en pleine campagne électorale, doit prononcer mardi un discours solennel devant le Congrès américain, à l’invitation du président de la Chambre des représentants, le républicain John Boehner. Une rencontre organisée dans le dos de la Maison Blanche, ce qui a provoqué la colère de Barack Obama. Conséquence : le président américain ne recevra pas Benjamin Netanyahou à la Maison-Blanche.

Un an et demi de négociations avec l’Iran. Les deux alliés s’opposent frontalement sur le dossier du nucléaire iranien. Les États-Unis font tout pour signer un accord politique avec Téhéran d’ici le 31 mars, après un an et demi de négociations internationales. En échange de garanties sur la nature civile et pacifique de son programme nucléaire, l'Iran obtiendrait une levée progressive des sanctions américaines, européennes et de l'ONU. La communauté internationale pourrait alors espérer refermer plus d'une décennie de tensions et de crises au Moyen-Orient. Israël est cependant convaincu qu'un accord en préparation entre les grandes puissances du groupe 5+1 (États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) et l'Iran n’empêcherait pas Téhéran de se doter un jour de la bombe, et par ricochet, de menacer l’existence même de l’État hébreux.

Une tribune pour "Bibi". Du coup le leader israélien n’a pas hésité à se rendre aux États-Unis pour tenter de torpiller cet accord. "En tant que Premier ministre d'Israël, j'ai l'obligation morale de hausser la voix face à ces dangers alors qu'il est encore temps de les éviter", a averti Benjamin Netanyahou, lundi, lors d’un discours prononcé devant l’Aipac, le puissant lobby américain pro-israélien. Mais ce voyage intervient aussi à quelques jours des élections législatives israéliennes du 17 mars prochain."Bibi" compte ainsi se servir de son discours devant le Congrès, acquis aux Républicains, comme "d'une tribune pour affirmer sa fermeté", analyse Alexandre Adler, notre spécialiste des questions géopolitiques et internationales.

Un voyage "destructeur" pour les relations entre les deux pays. Ce qui pose problème, c'est que cette visite de "Bibi" aux États-Unis a été faite sans avertir la Maison-Blanche. Barack Obama, le président démocrate, n’a ainsi "été informé que quelques minutes avant qu’elle soit publique, au mépris des usages", rappelle le Monde dans son édition de lundi. La conseillère  à la sécurité nationale, Susan Rice, a même qualifié ce voyage de "destructeur pour les bases mêmes des relations américano-israéliennes". Conséquence : Barack Obama ne recevra pas Benjamin Netanyahou, alors que les deux hommes entretiennent des rapports extrêmement difficiles depuis des années.

"Une paix de compromis", un enjeu fondamental pour Obama. Il faut dire que le président américain a fait d'un rapprochement avec Téhéran une priorité de sa politique étrangère, trente-cinq ans après la rupture des relations diplomatiques américano-iraniennes consécutive à la Révolution islamique. Barack Obama espère également nouer une alliance avec l’Iran contre l’État islamique. "Les États-Unis sont engagés dans une affaire fondamentale pour eux : une paix de compromis avec l’Iran, sur le dossier nucléaire. Car cet accord ouvrira sur une coalition contre Daesh. C’est un objectif qui dépasse de loin la politique d’Obama", analyse Alexandre Adler.

Netanyahou tente d’apaiser les esprits. Le Premier ministre israélien a pourtant tenté de faire baisser la tension au cours de son discours devant l’Aipac. "Malgré les désaccords occasionnels, l'amitié entre l'Amérique et Israël s'est renforcée décennie après décennie et elle résistera aux désaccords du moment pour se renforcer encore à l'avenir", a déclaré Benjamin Netanyahou. Mais sur le fond du dossier iranien, le leader israélien n’entend faire aucune concession à son allié américain. A tel point qu’aujourd’hui, les visions des deux pays apparaissent irréconciliables.

L'analyse d'Alexandre Adler en vidéo :

Benyamin Netanyahou est à Washingtonpar Europe1fr

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