Malaysia Airlines : le crash de trop ?

Jeudi, le Boeing 777 de la Malaysia Airlines s’est écrasé dans l’est de l’Ukraine, avec 298 personnes à son bord. Une catastrophe qui intervient un peu plus de quatre mois après celle du 8 mars dernier
Jeudi, le Boeing 777 de la Malaysia Airlines s’est écrasé dans l’est de l’Ukraine, avec 298 personnes à son bord. Une catastrophe qui intervient un peu plus de quatre mois après celle du 8 mars dernier © Reuters
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TURBULENCES - Déjà en difficulté financière, la compagnie a subi deux accidents en quatre mois. Fatal ?

Un drame humain peut-il conduire à un drame financier ? Jeudi, le Boeing 777 de la Malaysia Airlines s’est écrasé dans l’est de l’Ukraine, avec 298 personnes à son bord, sans doute abattu par un missile. Une catastrophe qui intervient un peu plus de quatre mois après celle du 8 mars dernier, date à laquelle un autre Boeing 777 de la compagnie s'est abimé en pleine mer, avec 239 personnes à son bord. "C'est un jour tragique d'une année déjà placée sous le sceau de la tragédie pour la Malaisie. Le monde est solidaire dans la douleur", a ainsi réagi le Premier ministre malaisien, Najib Razak, jeudi soir.

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Signe que ce nouveau drame pourrait s'avérer fatal à la compagnie, l'action Malaysia Airlines a chuté de 11% à la Bourse de Kuala Lumpur, entrainant de légères baisses dans toutes les bourses du monde, comme le détaille Les Echos. Et pour cause : si dans les deux cas, la responsabilité de la compagnie n'est pour l'instant pas mise en cause (les boîtes noires du premier crash sont toujours introuvables, et risquent de le rester), son image en a pris un coup. Et les possibles sanctions financières à venir font peser une épée de Damoclès sur la tête d'une entreprise déjà en difficultés depuis plusieurs années.

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Malaysia Airlines REUTERS

© Reuters

Une image qui se noircie. "Ce sont deux chocs qui interviennent sur un temps bref. Les mémoires n'ont pas eu le temps d'oublier la première catastrophe. C'est très mauvais pour la réaction du public", analyse l'économiste Christian Schmidt, spécialiste des transports. "Même si la responsabilité de la compagnie n'est pas directement mise en cause, le doute risque de s'installer. Les clients vont, au moins, s'interroger, sur la décision de survoler la zone alors que d'autres compagnies ont suspendu leur vol par exemple", poursuit l'économiste. Mais l'érosion de son image pourrait ne pas être la pire conséquence des deux crashs.

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Qui va payer les dégâts ? "Avant ces accidents, la réputation de la Malaysia Airlines était très solide. Et dans les deux accidents, la faute n'est pas avérée. Avec une très bonne communication, ils pourraient peut-être convaincre leur public qu'ils ne sont pas fautifs", estime pour sa part Loïc Tribot La Spière, délégué général du Centre d'étude et de prospective stratégique.

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En revanche, selon ce chercheur spécialisé dans l'aérien, ce qui pourrait s'avérer fatal à la compagnie, ce sont les éventuels coûts à attendre après ces accidents. "Qui va payer les dommages des victimes? Les assurances ne vont-elles pas se défausser ? Que vont décider les autorités judiciaires ? Cela risque de faire beaucoup de frais en peu de temps pour une compagnie de cette taille. Des dizaines de millions d'euros sont en jeu, sans compter la perte de deux avions", redoute Loïc Tribot La Spière.

En difficulté avant le crash. Une épée de Damoclès d'autant plus menaçante que Malaysia Airlines n'était pas au mieux de sa forme avant les deux drames. Déficitaire depuis plusieurs années, elle a annoncé mi-mai une aggravation de ses pertes au premier trimestre 2014. La compagnie contrôlée par l'Etat a ainsi essuyé une perte nette de 443 millions de ringgit (100 millions d'euros) sur les trois premiers mois de l'année, après une perte de 279 millions de ringgit un an plus tôt.

"Malaysia Airlines n'est ni une compagnie Low Cost, ni une vraiment une compagnie de luxe. L'essor des compagnies du golfe, haut de gamme, lui ont fait perdre beaucoup de clients. Et l'Etat Malaysien, qui est loin d'être le plus dynamique d'Asie, souffre d'une dévaluation de sa monnaie. Il ne lui est donc pas d'un grand secours", analyse l'économiste Christian Schmidt. Et d'asséner : "les deux chocs arrivent dans un moment de déclin. Et ce n'est pas du tout la même chose que si la compagnie avait eu les reins solides".