L'étonnant correspondant new-yorkais de Kadhafi

Louis Schlamowitz a envoyé une dernière lettre au colonel, en mars dernier. Elle lui est revenue sans même avoir été ouverte.
Louis Schlamowitz a envoyé une dernière lettre au colonel, en mars dernier. Elle lui est revenue sans même avoir été ouverte. © REUTERS
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Assiya Hamza , modifié à
Un fleuriste juif de Brooklyn et le dictateur libyen se sont écrits pendant 20 ans.

A première vue, tout les sépare. Et pourtant. Louis Schlamowitz, un ancien fleuriste juif de Brooklyn âgé de 81 ans, a entretenu une correspondance avec Mouammar Kadhafi pendant près de 20 ans, rapporte le New York Post.

"Il était un bon correspondant", raconte Louis Schlamowitz au New York Post. "J’ai trouvé que c’était très gentil de sa part de prendre le temps de me répondre parce que je ne suis pas quelqu’un de spécial", se remémore aujourd'hui le fleuriste à la retraite.

La relation épistolaire entre les deux hommes a débuté en 1969, juste après le coup d’Etat du  colonel en Libye. Louis Schlamowitz lui envoie alors une lettre pour le " féliciter" de son accession au pouvoir. Le commerçant lui demande également une photo dédicacée pour sa collection "Moyen-Orient".

Attristé par la manière dont il est mort

Un mois plus tard, contre toute attente, le guide libyen répond à son "gentil message". Mouammar Kadhafi le gratifie même de son autographe.

Mais l’échange ne s’arrête pas là. Louis Schlamowitz lui envoie des cartes de vœux pour Noël et ose le lancer sur des sujets plus sensibles comme le Proche Orient.

"Je lui ai dit que l’Etat d’Israël ne disparaîtrait jamais parce que c’était la patrie du peuple juif ", se souvient l’ancien fleuriste. La réponse du dictateur, ennemi absolu d’Israël, fut sans ambages.

"Les Américains utilisent le terrorisme contre le peuple palestinien en fournissant des armes et des avions aux Israéliens pour attaquer les camps palestinien", lui écrivit alors le dictateur dans une longue lettre de deux pages.

Puis, survient l’attentat de la Pan AM en 1988. Le petit commerçant de Brooklyn réalise alors que son correspondant n’est pas si fréquentable. Louis Schlamowitz met fin à cette relation à distance avec un homme "responsable de crimes contre l’humanité".

Il y a six mois, le fleuriste récidive. Cette fois, la lettre lui revient sans même avoir été ouverte. "J’ai été attristé par la manière dont il est mort", déplore l’octogénaire dans le Telegraph. "Il aurait du démissionner comme le président égyptien".

"Ce n’est qu’un passe-temps"

La liste des correspondants du retraité ne s’arrête pas là. D’autres grands de ce monde font partie des 6.000 autographes et lettres de ce passionné : les présidents américains Richard Nixon et Harry Truman, l’Ayatollah Khomeini, Yasser Arafat, Hosni Moubarak, Bachar El Assad.

De quoi attirer l’attention des services chargés de la sécurité des États-Unis. Son "passe-temps" a attiré l’attention du FBI et de la CIA. Plusieurs enquêtes ont été menées durant toutes ces années. En vain.

"Je leur ai expliqué que c’était un hobby. Ils ont été stupéfaits", s’amuse Louis Schlamowitz dans les colonnes The New York Times.

"Je ne souhaite que du bien aux autres, je n’ai pas à être d’accord avec eux", se justifie-t-il à propos de sa longue liste de correspondants dictateurs. "Je ne fais pas de politique, ce n’est qu’un passe-temps", conclut-il.