Japon : la communication sens dessus-dessous

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Plana Radenovic avec agences , modifié à
Depuis vendredi, les autorités nipponnes, qui communiquent sans relâche, distillent des messages contradictoires.

Face à l’inquiétante mutation de la catastrophe naturelle japonaise en désastre nucléaire, la communication de crise des responsables japonais semble un peu brouillonne. Patrick Lagadec, spécialiste de gestion du risque et gestion de crise, a estimé mardi sur Europe 1 que les autorités nipponnes avaient "perdu leur crédibilité", en faisant des déclarations contradictoires. Retour sur cinq jours d’interventions du Premier ministre Naoto Kan, du porte-parole du gouvernement Yukio Edano, ainsi que des responsables de Tokyo Electric Power (Tepco) et de l'Agence de sûreté nucléaire et industrielle.

Vendredi*

Suite au violent séisme suivi d’un tsunami, Naoto Kan assure, un peu trop vite, qu’aucune fuite radioactive n’a été observée dans les centrales nucléaires du pays.

Des propos vite rectifiés par le ministre japonais de l’Industrie, qui concède quelques heures plus tard qu’une "petite fuite nucléaire" se serait produite à la centrale de Fukushima, dans le nord-est du Japon.

Samedi

La préfecture de Fukushima annonce que le toit du réacteur n°1 de la centrale s'est effondré, suite à une explosion.

Le secrétaire général du gouvernement japonais Yukio Edano a confirmé qu'une explosion et une fuite radioactive s'étaient produites a la centrale de Daiichi, dans la préfecture de Fukushima. "Nous nous efforçons de déterminer la cause et de faire le point sur la situation, et nous rendrons tout cela public lorsque nous aurons davantage d'informations", a-t-il déclaré. "Pour le moment, nous pensons que l'évacuation dans un rayon de 10 km est adéquate", a-t-il poursuivi.

Peu après, Naoto Kan élargit la zone d'évacuation, établie à 20 km autour de la centrale de Fukushima. Le Premier ministre en profite pour appeler au calme :

Un appel au calme vite dépassé par les événements. L’agence de sûreté atomique japonaise informe que le système de refroidissement d'urgence du réacteur n°3 de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi est en panne. Au moins neuf personnes auraient été irradiées.

Dimanche

Le porte-parole du gouvernement japonais a mis en garde contre un nouveau risque d'explosion à la centrale de Fukushima en raison de l'accumulation d'hydrogène dans le bâtiment du réacteur 3, en assurant toutefois qu'il n'y avait pas de danger pour la population.

Un peu plus tard, Tepco indique toutefois que la limite légale de radioactivité a été dépassée sur le site de la centrale de Fukushima. Naoto Kan abonde en ce sens : "c'est la plus grande crise que connaît le Japon depuis la Seconde guerre mondiale".

Lundi

Deux explosions se sont produites au niveau du réacteur 3 de la centrale de Fukushima mais le réacteur n'a pas été endommagé, affirme Tepco. Des informations confirmées par Yukio Edano. Selon lui, la possibilité d'une importante fuite radioactive est "faible".

Le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Yukiya Amano rassure aussi : il juge "très improbable" que la crise à Fukushima ne dégénère en une situation comparable à celle de Tchernobyl.

Mardi

Naoto Kan est furieux contre les dirigeants de Tepco, opérateur de centrales nucléaires dans le pays, qu'il accuse d'avoir trop tardé à l'informer d'une nouvelle explosion qui s'est produite mardi à la centrale de Fukushima-Daiichi.

La radioactivité est en baisse à Fukushima, affirme le porte-parole du gouvernement, lors d'un point de presse. Quelques heures plus tard, le même porte-parole concède : "il ne fait pas de doute que les niveaux atteints peuvent affecter la santé des êtres humains". "Restez à l'intérieur, fermez les fenêtres, n'allumez pas les ventilateurs et ne sortez pas votre linge", a-t-il demandé aux habitants proches de la centrale. Et Naoto Kan a élargi la zone de sécurité autour de la centrale en appelant les personnes habitant dans un rayon de 30 kilomètres à rester calfeutrées. La communication du gouvernement se fait de moins en moins calme.

*Jour français