Turquie Istanbul 1280 Ozan KOSE / AFP 1:35
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Jean-Sébastien Soldaïni, avec A.H.
Dimanche, les Turcs doivent décider s'ils acceptent de confier au président Erdogan l'essentiel des pouvoirs. Mais depuis le putsch avorté de l'été dernier, les habitants d'Istanbul craignent son autoritarisme.
REPORTAGE

C'est tout un pays qui se prépare à voter. Dimanche, les Turcs doivent se prononcer lors d'un référendum sur une réforme de la Constitution. Une révision qui permettra au président Erdogan de concentrer entre ses mains l'essentiel des pouvoirs. À Istanbul, la crainte est réelle dans la société civile de voir l'état basculer dans l'autoritarisme. L'été dernier, le putsch avorté avait déjà largement impacté le quotidien de nombreux Turcs.  

Un entretien professionnel aux allures d'interrogatoire. Le sentiment qui règne est celui d'une mainmise du pouvoir sur la société civile. À tel point que dans certaines administrations, les réunions de travail ne servent plus à fixer les objectifs. Les chefs de service sont tout simplement en campagne pour Erdogan, affirme un enseignant à Europe 1. Betul, qui travaillait pour la mairie a été renvoyée après un curieux entretien. "Un nouveau responsable a été nommé. Il nous a convoqués un par un dans son bureau pour nous poser des questions sur nos idées politiques. Il m'a demandé mes opinions sur la présidence actuelle, sur le conflit en Syrie, et même si je pensais qu'il y avait un complot contre notre président…", raconte-t-elle.

"On est sous un régime autoritaire". Cette situation ne touche pas que les fonctionnaires. Ali est professeur en Sciences politiques dans une université privée, et là aussi, le climat est pesant. "Dans tous les secteurs qui s'occupent de la production d'idées, on constate une sorte de pression", assure-t-il. "On est sous un régime autoritaire, c'est évident. Si vos propos sont très avancés, vous pouvez vous retrouver devant un juge d'instruction. C'est une menace pour toute idée opposée au régime politique actuel", déplore-t-il.

Pour Betul comme pour Ali, le niveau d'intimidation est tel que, même en cas de victoire du "non" dimanche, qui signerait la défaite d'Erdogan, ils voient mal comment le président pourrait relâcher la pression.