Génocide arménien : Ankara tance Paris

"S'il la force encore (la chance), cette fois cela passera comme une déclaration de guerre à la culture française", a déclaré Ahmet Davutoglu.
"S'il la force encore (la chance), cette fois cela passera comme une déclaration de guerre à la culture française", a déclaré Ahmet Davutoglu. © Reuters
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avec AFP , modifié à
La Turquie condamne la volonté de  Nicolas Sarkozy de proposer un nouveau projet de loi.   

Il suggère au président Nicolas Sarkozy de "ne pas forcer sa chance". L'avertissement est signé Ahmet Davutoglu, chef de la diplomatie turque à l'encontre du chef de l'Etat français, mercredi.  Il répond ainsi à l'idée émise mardi par le président de présenter un nouveau texte réprimant la négation du génocide arménien après la censure du Conseil constitutionnel de la loi pénalisant la contestation des génocides.

Cette volonté affichée de poursuivre la mise en œuvre de ce texte n'est pas du goût d'Ankara. "S'il la force encore (la chance), cette fois cela passera comme une déclaration de guerre à la culture française, au droit français et à l'état de droit français", a estimé Ahmet Davutoglu, lors d'un entretien sur la chaîne publique TRT, retranscrit par l'agence de presse Anatolie. "Auparavant, il a déclaré la guerre à la liberté d'opinion et à l'histoire. Maintenant, il aura déclaré une guerre ouverte avec le Conseil constitutionnel", a poursuivi le ministre très impliqué dans la querelle diplomatique entre les deux capitales.

"La gifle de la Constitution à Sarkozy"

Une opinion partagée par une partie de la presse turque qui a salué ce désaveu du Conseil constitutionnel. "La gifle de la Constitution à Sarkozy", titrait ainsi en "Une" le quotidien à grand tirage HaberTürk, tandis que le journal progouvernemental Sabah évoquait "Une claque historique à Sarkozy".

Le chef de la Diplomatie turque a toutefois indiqué que les mesures de rétorsion prises ou envisagées par la Turquie à l'encontre de la France pourraient être abandonnées. "Si la conjoncture et les conditions qui justifiaient l'application de ces sanctions disparaissent, alors les sanctions disparaissent aussi", a-t-il dit.

Rien "avant la prochaine législature"

Sur le plan législatif, ce texte est pour l'instant dans l'impasse. La nouvelle mouture ne pourra être prêt avant la présidentielle. Il faudra même attendre "la prochaine législature", affirme mercredi Jean-François Copé, le secrétaire général de l'UMP. En clair, aucune loi ne se fera avant les élections législatives de 2012. Une information confirmée mercredi par Valérie Pécresse, la porte-parole du gouvernement.

"Le problème, c'est que malheureusement, les travaux du parlement sont achevés (le 6 ou le 7 mars) et nous n'avons pas la possibilité d'inscrire ce texte à l'ordre du jour", a déploré le député-maire de Meaux. En période préélectorale, "pour des raisons de cohérence et de respect républicain, il ne peut pas y avoir de travail législatif dans les semaines qui précèdent les présidentielles", a-t-il observé.

Un peu plus tôt sur i-TELE, le numéro un de l'UMP avait justifié la censure de ce texte, en affirmant "qu'il y a vraiment une attente forte, qu'elle correspond aussi aux valeurs universelles de la France". Avant d'ajouter : "le président a dit que l'on allait étudier un nouveau texte, c'est ce que nous ferons afin de tenir compte des réserves du Conseil constitutionnel".

Selon Valérie Pécresse, Nicolas Sarkozy devrait recevoir "d'ici peu" les associations arméniennes, ajoutant "qu'une concertation va être lancée par le ministre de la Justice avec l'ensemble des protagonistes".