Fuir Alep, une urgence pour plus de 70.000 Syriens, mais...

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20.000 réfugiés syriens sont amassés à la frontière avec la Turquie, principalement des femmes et des enfants. © BULENT KILIC / AFP
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Walid Berrissoul, Xavier Yvon avec C.P. , modifié à
La Turquie fait face actuellement à un afflux massif de réfugiés syriens. 

Plus de 1.000 raids sur Alep en une semaine. C'est un afflux massif de réfugiés syriens qui se dirigent actuellement vers la Turquie. Poussés à la fuite depuis plusieurs jours en raison de l'offensive du régime de Bachar-al-Assad à Alep, la deuxième ville du pays, ils sont plus de 20.000 à tenter, dans le froid, de passer la frontière turque, amassés à un poste de frontière. Que ce soient les frappes du régime syriens ou celles lancées par la Russie, plus d'un millier de raids depuis le début de la semaine ont transformé la route de la Syrie qui mène à la Turquie en route de l'exode.

70.000 Syriens sur les routes. Ce sont, depuis plusieurs jours, des dizaines de milliers de familles syriennes qui avancent dans le froid jusque la frontière turque, toujours fermée. Déjà plus de 20.000 réfugiés s'y amassent, principalement des femmes et des enfants. Et, dans les prochains jours, cet afflux s'annonce encore plus massif. C'est en tout cas ce pense Massimiliano Rebaudengo, chef de mission pour Médecins Sans Frontières dans le Sud de la Turquie : "il y a entre 70.000 et 80.000 personnes qui sont en train de bouger de la zone d'Alep vers la frontière turque. C'est un afflux massif, dans une courte durée, c'est impressionnant", explique-t-il, avant d'ajouter : "ces civils qui bougent ont besoin d'abris et de nourriture. On a distribué une centaine de tentes mais comme on parle de dizaines de milliers de personnes, il y a forcément des gens qui dorment dehors. Et c'est l’hiver, il fait froid ! Ces conditions vont vite devenir catastrophiques", assure-t-il.

Des femmes et enfants fuient Alep par milliers.

Vers une ouverture de la frontière ?Tout va donc dépendre de l'ouverture, ou non, de la frontière turque par le gouvernement d'Ankara qui assure, malgré la situation actuelle, vouloir continuer sa politique d’accueil des réfugiés syriens, eux qui sont déjà plus de deux millions à vivre sur le territoire turque. "Le régime (de Damas) a désormais bloqué une partie d'Alep (...) s'ils (les civils poussés à l'exode, ndlr) sont à nos portes et n'ont pas d'autre choix, si nécessaire, nous devons laisser entrer nos frères et nous le ferons", a assuré le président turc Recep Tayyip Erdogan.

Le temps presse. Le temps presse pour les habitants d'Alep. Les Syriens du quartier rebelle de la ville d'Alep ont d'ailleurs bien compris la menace : il faut fuir avant que les bombardements russes ou syriens ne touchent leurs habitations. Pour fuir, il ne leur reste qu'un corridor vers l'Ouest, car la principale route vers le Nord a été coupée il y a trois jours par les frappes du régime. 

De forts enjeux politiques. Alors que Moscou, en début de semaine, a intensifié ses frappes pour appuyer l'offensive du régime syrien et de ses alliés, les forces de Bachar-al-Assad veulent, elles, couper Alep de tout approvisionnement, notamment en armes et en munitions, pour mieux étouffer les rebelles et reconquérir la deuxième ville du pays. Et on se veut confiant dans le régime de Damas. Un proche du régime raconte en effet que "dans dix jours, Alep sera une ville libérée !". Faire tomber le dernier bastion de la révolution serait une victoire majeure pour Bachar-al-Assad. Alors que les négociations de paix de Genève se sont, elles, arrêtées avant même d'avoir commencées, la chute d'Alep serait un tournant dans l'interminable guerre syrienne qui a fait, depuis 2011, 260.000 morts, des millions de réfugiés et de déplacés.