Entre polémique et excuses, le Japon commémore sa capitulation

Ministres japonais au sanctuaire de Yasukuni - YOSHIKAZU TSUNO / AFP - 1280x640
Le sanctuaire de Yasukuni, à Tokyo, est vu par la Chine et la Corée du Sud comme une glorification de l'impérialisme japonais. © YOSHIKAZU TSUNO / AFP
  • Copié
B.W. avec AFP
Le Japon a commémoré samedi les 70 ans de sa capitulation. Une journée marquée les excuses présentées par l'empereur Akihito, mais aussi par la visite de plusieurs ministres au sanctuaire controversé de Yasukuni.

Soixante-dix ans après, les plaies sont toujours à vif. Le Japon a commémoré samedi sa capitulation en 1945, sous les critiques de Pékin et Séoul, qui attendaient des excuses pour ses actes passés et ont vu une nouvelle fois des ministres visiter le sanctuaire controversé de Yasukuni, qui honore des criminels de guerre.

"Profonds remords" de l'empereur Akihito. Pourtant, samedi, les commémorations avaient débuté avec un geste d'apaisement. L'empereur Akihito, âgé de 81 ans, fils de Hirohito qui régna pendant la guerre, a en effet prononcé un discours dans lequel il a exprimé de "profonds remords" pour la Seconde guerre mondiale.

C'était la première fois qu'il prononçait ces paroles un jour anniversaire de la capitulation. Lui qui ne s'est jamais rendu dans le sanctuaire tokyoïte de Yasukuni a prononcé ces mots dans un autre lieu, appelé Budokan, en présence de 7.000 personnes, dont le Premier ministre Shinzo Abe.

Pas de nouvelles excuses de Shinzo Abe. Ce dernier n'a, à cette occasion, pas eu un seul mot de contrition. Vendredi, lors d'une allocution officielle, il a toutefois exprimé ses "condoléances éternelles" pour les victimes de la guerre, qualifiant vendredi soir d'"inébranlables" les excuses passées du Japon pour ses actes, en particulier sur le continent asiatique. Sans pour autant prononcer lui-même de nouvelles excuses directes. Il a également appelé à exempter dorénavant d'excuses les générations d'après-guerre, affirmant que "nous ne devons pas laisser nos enfants, petits-enfants et les générations suivantes, qui n'ont rien à voir avec la guerre, être prédestinés à s'excuser".

Une déclaration saluée par les Etats-Unis et les Philippines, mais accueillie avec colère en Chine et dans les deux Corées, où les propos de Shinzo Abe étaient très attendus. Park Geun-Hye, la présidente sud-coréenne, a ainsi estimé qu'elle "laissait beaucoup à désirer" et a conseillé à Tokyo de mener des "actions sincères" pour gagner la confiance des pays voisins. Pékin, de son côté, a réclamé des "excuses sincères". 

"Vif mécontentement" de Pékin. Samedi, Shinzo Abe ne s'est pas rendu en personne à Yasukuni, mais il y a fait parvenir une offrande rituelle. En 2013, sa visite au sanctuaire polémique avait déclenché la colère de Pékin et Séoul et lui avait même valu des remontrances de Washington. En revanche, une soixantaine de responsables politiques japonais, dont trois femmes ministres, se sont rendus samedi dans ce lieu perçu comme le symbole du passé colonialiste de l'archipel. La Chine n'a pas tardé à réagir, en exprimant son "vif mécontentement" par la voix de son ministère des Affaires étrangères. Pour Pékin, cette visite "démontre une fois de plus la position erronée du Japon sur les questions historiques". 

 

Yasukuni, un sanctuaire polémique. Ce lieu de culte shintoïste est situé à Tokyo. Y sont honorés quelque 2,5 millions de militaires ayant péri pour le pays lors de conflits depuis l'ère Meiji, débutée en 1868. Il est passé sous statut privé après 1945. Mais la polémique est née en 1978, après l'inscription en secret des noms de 14 Japonais condamnés comme criminels de guerre par les Alliés après la capitulation du Japon. La Chine et la Corée du Sud, victimes du militarisme nippon dans la première moitié du XXe siècle, vivent comme un affront l'honneur posthume fait à ces personnes. C'est pourquoi chaque visite d'un quelconque représentant de l'Etat nippon provoque l'ire de Pékin et Séoul, qui voient dans le sanctuaire de Yasukuni une glorification de l'impérialisme japonais.