Cyberattaques : les Pays-Bas expulsent 4 agents russes, Londres accuse Moscou

Cette cyberattaque remonte à avril, au moment où l'OIAC enquêtait sur deux affaires impliquant Moscou.
Cette cyberattaque remonte à avril, au moment où l'OIAC enquêtait sur deux affaires impliquant Moscou. © AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
Les autorités néerlandaises ont révélé comment des agents russes tentaient de pirater le siège de l'OIAC, qui enquêtait notamment sur l'empoisonnement de l'ex-espion russe Sergueï Skripal. 

Les Pays-Bas ont annoncé jeudi avoir expulsé quatre agents russes qui tentaient de pirater le siège de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) à La Haye, une affaire jugée "extrêmement inquiétante" par le gouvernement néerlandais.

Cette nouvelle affaire a été l'occasion pour l'Otan, l'Union européenne, le Canada et les États-Unis de dénoncer le comportement de la Russie. Dans une ambiance digne de la guerre froide qui prévaut depuis l'empoisonnement d'un ex-espion russe au Royaume-Uni, Londres et Canberra ont ainsi accusé le même jour le renseignement militaire russe (GRU) d'avoir mené les principales cyberattaques mondiales de ces dernières années.

Ordinateur portable et facture de taxi. Les autorités néerlandaises ont révélé comment les agents russes avaient positionné un véhicule truffé d'équipements électroniques sur le parking d'un hôtel proche du siège de l'OIAC dans le but de pirater son système informatique. Cela s'est passé en avril, au moment où l'OIAC enquêtait sur l'empoisonnement de l'ex-espion russe Sergueï Skripal en Angleterre et sur une attaque chimique présumée à Douma en Syrie, attribuée par les Occidentaux à Moscou, qui a toujours nié toute implication. Les autorités néerlandaises n'ont pas officiellement établi de lien entre la tentative de piratage et ces deux investigations de l'OIAC.

"Le gouvernement néerlandais juge extrêmement inquiétante l'implication de ces agents de renseignement", a déploré la ministre néerlandaise de la Défense, Ank Bijleveld, lors d'une conférence de presse. "Habituellement, nous ne divulguons pas ce type d'opération de contre-espionnage". Les services secrets néerlandais et britanniques ont trouvé dans la voiture des agents russes un ordinateur portable et une facture de taxi pour une course du siège du GRU à l'aéroport de Moscou, a précisé Ank Bijleveld.

Des Russes identifiés. Signe de l'envergure du réseau, l'ordinateur portable retrouvé était relié au Brésil, à la Suisse et à la Malaisie, et pour ce dernier pays en liaison avec l'enquête sur la destruction en 2014 du vol MH17 au-dessus de l'Ukraine. Les Pays-Bas, qui ont bénéficié de la coopération de Londres, ont identifié les présumés agents russes, précisant que l'opération était selon eux coordonnée par le renseignement militaire russe.

Des Russes qui étaient surveillés par le renseignement néerlandais. Présent à la conférence de presse, le chef du service de renseignement néerlandais (MIVD), le major général Onno Eichelsheim, a déclaré que les agents russes ont atterri à l'aéroport d'Amsterdam-Schiphol le 10 avril avec des passeports diplomatiques russes. Il a dévoilé leurs passeports, identifiant les Russes comme Alexeï Morenets, Evgueni Serebriakov, Oleg Sotknikov et Alexeï Minine. Le 11 avril, ils ont loué une Citroën C3 et effectué une reconnaissance de la zone autour de l'OIAC à La Haye, alors qu'ils étaient surveillés en permanence par le renseignement néerlandais. Par la suite, les agents néerlandais ont ensuite neutralisé les agents russes et trouvé dans leur voiture un ordinateur portable, des téléphones portables et un reçu d'un taxi qui les a mené à l'aéroport à Moscou.

Un "mépris" des règles internationales. Pour la première fois, le GRU, service de renseignement russe, donc le Kremlin, a été aussi spécifiquement mis en cause jeudi par Londres, qui l'accuse déjà d'être responsable de l'empoisonnement de l'ex-agent double russe Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia le 4 mars à Salisbury, en Angleterre. Londres et La Haye ont accusé le GRU de mépriser les règles internationales, garantes de la sécurité mondiale, en lançant des cyberattaques contre des institutions à travers le monde, en l'OIAC.

Moscou dénonce un "acte de propagande". Pour Moscou, ces accusations sont "un acte de propagande" visant la Russie. "Il s'agit d'un acte de propagande dirigé contre notre pays", a assuré la diplomatie russe dans un communiqué, estimant que ces accusations porteront un coup aux relations diplomatiques entre les deux pays. "Nous avons répété à plusieurs reprises aux Pays-Bas, y compris par la voie diplomatique, que la campagne anti-russe d'espionnite aiguë lancée dans le pays porte atteinte aux relations bilatérales", a poursuivi le ministère russe dans ce communiqué.

L'OIAC victime d'"activités liées à la cybersécurité" accrues depuis début 2018

L'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) est victime d'"activités liées à la cybersécurité" accrues depuis le début de l'année, a déclaré jeudi l'OIAC à la suite de révélations sur une tentative de piratage par quatre agents russes. "L'OIAC prend très au sérieux la sécurité de ses systèmes d'information et de ses réseaux. Depuis début 2018, l'Organisation a observé une augmentation des activités liées à la cybersécurité", a-t-elle écrit dans un communiqué.