Crises internationales : l’Otan se veut plus réactif

Un soldat de l'Otan lors du sommet de Newport, au Pays-de-Galles
Un soldat de l'Otan lors du sommet de Newport, au Pays-de-Galles © Reuters
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Vendredi, l’Otan a annoncé la création d’une force de réaction rapide, capable de déplacer des milliers d’hommes en quelques jours à peine.

C’était le grand défi du sommet de l’Otan qui s’est tenu jeudi et vendredi à Newport, au Royaume-Uni : proposer une réaction, à défaut d’une solution, aux crises internationales importantes qui sévissent dans l’est de l’Europe et au Moyen-Orient. L’Alliance atlantique a donc entériné la création du Readiness action plan (RAP), un plan de réactivité aux crises. Le but : augmenter considérablement la capacité des troupes de l’Otan à se déployer et passer à un délai de 48 à 72 heures, contre plusieurs jours à quelques semaines aujourd’hui pour envoyer des soldats à l’étranger.

Pourquoi le RAP ? Le constat est là : la nature des crises internationales a évolué. Au Mali, en Crimée comme en Irak, la situation s’est dégradée très rapidement, en quelques jours voire quelques heures. L’Otan dispose en effet déjà de la Force de réaction de l’Otan, la NRF. Elle permet de déplacer plus de soldats, certes, mais en plus de temps.

Vivien Pertusot, responsable du bureau de l’Institut français de relations internationales à Bruxelles, spécialiste des questions de défense, comme son confrère de l’IFRI à Paris, Etienne de Durand, soulignent pour Europe 1 que ce nouveau RAP n’est pas uniquement un symbole dirigé contre Moscou. "On a l’impression que cette force de réaction rapide a été créée pour répondre à une éventuelle intervention russe dans les pays baltes, ce qui est partiellement faux", analyse le chercheur de Bruxelles. Dans ce RAP, "il y a cette idée que se déployer dans les 30 jours, c’est trop long par rapport aux surprises stratégiques qui peuvent émerger aux frontières de l’Europe notamment", explique Vivien Pertusot.

Qu’est-ce que le RAP ? En plus de créer une force de réaction rapide, de quelques milliers d’hommes, le RAP prévoit également un régime d’entraînements revu à la hausse entre les différents membres de l’OTAN. "Avec la fin de la guerre en Afghanistan, des grosses interventions pour l’Otan, il y a un besoin de continuer à s’assurer que les différentes forces armées de l’Otan puissent continuer à travailler ensemble si une opération d’envergure devait être déclenchée, analyse Vivien Pertusot. Pour se faire, l’Otan va pré-positionner du matériel militaire afin de ne pas avoir besoin de le déplacer pour les entraînements, mais aussi pour améliorer le délai de réactivité des troupes. On ne sait pour l’instant pas encore exactement où ce matériel sera concrètement installé, mais Anders Fogh Rasmussen, secrétaire général de l’Otan, a affirmé vendredi que l’Alliance maintiendra une "présence continue" en Europe de l’Est.

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© Reuters

Comment va-t-on réussir à envoyer aussi rapidement des milliers d’hommes sur le terrain ? "A l’époque de la guerre froide, on avait tout au long du front virtuel face au pacte de Varsovie un nombre beaucoup plus considérable de troupes qui était sur le pied de guerre en quelques jours, voire en quelques heures", rappelle Etienne de Durand, directeur des études de sécurité à l’IFRI. En fait, le système RAP va se calquer sur le fonctionnement déjà existant de la Force de réaction de l’Otan : l’état-major est dirigé, à tour de rôle, par les différents pays qui participent à cette force. Et chaque pays, à son tour, met à disposition des soldats sur le pied de guerre, pour une possible intervention et garder du matériel prêt à être envoyé sur une intervention.

Selon le général Jean-Paul Paloméros qui dirige l’un des deux commandements stratégiques de l’Otan à Norfolk, "maintenir des gens en alerte, ça a un certain coût. Mais si vraiment, on s’organise bien et si ces forces sont bien préparées, c’est un investissement qui sera rentabilisé très vite dans la mesure où on sera plus efficace". Le coût estimé du RAP est de plusieurs centaines de millions d’euros. Si Vivien Pertusot estime le coût conséquent, Etienne de Durand le relativise : "Le budget de la Défense de l’Etat français, c’est environ 31,5 milliards d’euros. Si vous ajoutez tous les budgets de la Défense des membres de l’Otan et en premier chef le budget américain, ce ne sont pas de très grosses sommes".