Crash du MH17 : la sécurité aérienne a-t-elle failli ?

Du décollage à l’atterrissage, les avions sont constamment surveillés.
Du décollage à l’atterrissage, les avions sont constamment surveillés. © Maxppp
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Damien Brunon , modifié à
DECRYPTAGE - Certaines compagnies aériennes avaient décidé de ne plus passer au-dessus de l’Ukraine, mais le survol de la région était toujours autorisé.

L’INFO. Le crash du vol MH17 de la Malaysian Airlines dans l’est de l’Ukraine, jeudi, a provoqué la mort de près de 300 personnes. Abattu par un missile, l’avion circulait pourtant sur l’une des “autoroutes” du ciel les plus empruntées pour rallier l’extrême-Orient depuis l’Europe. Plusieurs avions militaires ukrainiens avaient été détruits en vol dans la région ces derniers jours. Et alors que certaines compagnies asiatiques avaient déjà décidé de ne plus survoler la région tenue par les pro-russes,  la question de savoir pourquoi l’espace aérien civil n’a pas été complètement fermé est sur toutes les lèvres.

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Qui contrôle les espaces aériens ?

Un peu partout dans le monde, des centres de contrôle régionaux et nationaux surveillent le ciel. En Ukraine, celui de Kiev veille sur tout l’espace aérien du pays et gère le trafic en temps réel, avion par avion. Ces mécanismes sont extrêmement précis et coordonnés, c’est là-dessus que repose la sécurité du transport aérien.

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De plus, un avion qui décolle est muni d’un plan de vol obligatoire, un document dans lequel sont répertoriées toutes les caractéristiques physiques de l’avion, mais également son itinéraire. Il est distribué à tous les organismes de contrôle des pays qu’un avion va traverser pendant son voyage. “Il n’y a rien de plus surveillé qu’un avion de ligne en train d’effectuer un voyage, même dans les coins les plus reculés du monde”, assure Bernard Chabbert, le spécialiste aéronautique d’Europe 1.

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© Reuters

Qui a le pouvoir de fermer une zone jugée dangereuse ?

Le pouvoir de fermer une route aérienne n’existe pas au sens strict du terme. Plusieurs agence spécialisées font néanmoins figure de référence en matière de sécurité dans les airs. Parmi elles, on trouve notamment l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) ou l’Administration fédérale de l’aviation américaine (FAA). Ensuite, ce sont aux directions de l’aviation civile de chacun des Etats concernés de prendre des décisions. “En France, les autorités de l’Etat qui ont les éléments politiques pour apprécier la gravite d’une situation alertent la direction de l’aviation civile en précisant qu’une zone n’est plus sûre. Dans ces cas-là, cette dernière demande aux avions qui battent pavillon français de ne plus traverser cette zone”, précise Bernard Chabbert.

Ce mécanisme de sécurité s’est notamment déclenché début avril lorsque les troubles ont commencé à toucher la région de la Crimée. “La région a été interdite de survol parce que la sécurité fondamentale des avions civils n’était plus assurée. Lors de la prise d’autonomie de la région, il y eu un conflit sur la question de savoir qui allait assurer le contrôle aérien au-dessus de ce territoire. On se demandait notamment si c’était les Russes qui allaient assurer le contrôle aérien ou si cette tâche incombait toujours aux Ukrainiens”, décrypte le spécialiste aéronautique d’Europe 1. Problème : le question n’ayant pas été résolue, les compagnies aériennes de toute la planète ont décidé de ne plus survoler la zone jusqu’à nouvel ordre.

Crash malaysia airlines MH17 fREUTERS

© REUTERS

Des responsables de la sécurité aérienne pourront-ils être mis en cause ?

A l’heure actuelle, il est difficile de juger des responsabilités sans savoir concrètement ce qu’il s’est passé. “On se réfère toujours à l’expérience des autres. En Afghanistan, des tas d’avions et d’hélicoptères de toutes les nationalités impliquées dans le conflit dans le pays se sont fait tirer dessus dans des opérations militaires. Certains ont été abattus. Pourtant, le trafic aérien civil n’a jamais été touché”, rappelle Bernard Chabbert.

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En ce qui concerne l’Ukraine, il est néanmoins important de préciser que certaines compagnies aériennes avaient détourné leur chemin depuis le début du conflit en Crimée. Les sud-coréennes Korean Air et Asiana, l’australienne Qantas et la taïwanaise China Airlines, ne survolaient plus l’Ukraine, tout comme l’anglaise British Airlines qui avait limité son survol du pays à la liaison quotidienne Londres-Kiev.

La Malaysia Airlines n’est cela dit pas allée à l’encontre d’un avis formel de danger concernant la région du Dombass, là où s’est crashé son avion. Dans leurs récentes recommandations, les autorités ukrainiennes conseillaient aux avions de voler à au moins 10.000 mètres d’altitude, ce que faisait le vol MH17 lorsqu’il a été touché par un missile.

Et la France, dans tout ça ?

La compagnie française Air France-KML ne détournait pas ses avions de la région, même si elle évitait la Crimée depuis le 3 avril dernier. “A priori, l’estimation du risque est un problème politique, mais en même temps, les autorités politiques n’ont pas toujours les éléments pour justifier la décision de ne pas survoler certaines zones. Jeudi, l’histoire s’est chargée de mettre au clair la situation”, analyse Bernard Chabert.

Depuis le crash du MH17, la France, comme d’autres pays européens, a demandé à ses avions de ne plus survoler l’Ukraine. De leur côté, les autorités ukrainiennes ont décidé de fermer leur espace aérien.

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