Centrafrique : chrétiens et musulmans sont terrorisés

La force française est passée ce week-end à 1.600 soldats en Centrafrique. Les habitants restent terrifiés par les massacres.
La force française est passée ce week-end à 1.600 soldats en Centrafrique. Les habitants restent terrifiés par les massacres. © REUTERS
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Xavier Yvon, envoyé spécial en Centrafrique et Maud Descamps, avec agences , modifié à
REPORTAGE - La force française est passée ce week-end à 1.600 soldats en Centrafrique. Les habitants restent terrifiés par les massacres.

A Bossembélé, quand les blindés français sont arrivés dans le village, les habitants ont retrouvé le sourire. Lucien, un chrétien centrafricain, a même sorti son téléphone portable pour appeler son frère parti se réfugier dans la brousse avec ses enfants.

Depuis le mois de mars dernier, son pays est plongé dans le chaos. Depuis que la Séléka, une coalition à majorité musulmane, a renversé le président François Bozizé, chrétiens et musulmans se déchirent.

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Caché dans la brousse. "Je lui ai dit que les Français étaient là et que ça n’était pas la peine de rester en brousse avec les enfants", raconte ce chrétien, au micro d’Europe 1. "Dans la brousse il y a trop de risques. Les enfants peuvent se faire mordre par des serpents ou encore attraper le paludisme", ajoute-t-il.

Lucien et sa famille espèrent que les soldats français - venus désarmer les milices - les défendront face aux musulmans qui ont pris le pouvoir. Mais à Bossembélé, au nord-ouest de Bangui, les blindés de l’armée ne faisaient qu’une halte avant de poursuivre leur route.

La peur des musulmans. Devant le campement des militaires, plusieurs habitants se sont regroupés. Parmi eux, il y a Sayou, un musulman, qui demande timidement à parler. Il explique que sa famille a fui le village devant la menace des anti-balaka, des milices chrétiennes, qui s’enhardissent avec l’arrivée des Français.  

Haïs des habitants, qui les voient le plus souvent comme des "occupants" venus du Tchad et du Soudan voisins, les ex-Séléka, majoritairement musulmans, évoluent en armes. Face à eux, il y a les "anti-balaka", "anti-machettes" en langue sango, favorables à l'ancien régime, présentes en brousse ou infiltrées dans les quartiers.

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Les tensions montent dans la capitale. Dans la capitale, Bangui, l’arrivée des Français a également fait monter la pression d’un cran. "La période d'impunité est terminée", a prévenu dimanche soir le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian. "Demain" (lundi), "tout le monde pose les armes", a affirmé le ministre. Ou alors "on utilise la force pour les faire poser", a-t-il mis en garde.

En véhicules blindés ou à pied, pour la deuxième journée consécutive, les soldats français de l'opération "Sangaris" ont été très visibles dimanche sur les boulevards et carrefours stratégiques de Bangui. L'activité est restée, néanmoins, réduite malgré le retour à un calme relatif après les massacres des jours derniers.

Les soldats français ont observé une certaine "tension" à l'approche d'éléments armés de l'ex-rébellion de la Séléka (au pouvoir), selon l'état-major: "(...) ils ont compris qu'ils vont devoir être regroupés, désarmés, que la force française est en train de s'imposer à leurs dépens dans la capitale, ce qui crée une tension".

Patrouille française visée par des tirs. Près de l'aéroport, une patrouille française a répliqué dimanche après avoir été la cible de tirs, selon des témoins. Il n'y a eu aucun blessé côté français, d'après une source militaire. Jeudi, un premier incident survenu également près de l'aéroport avait fait quatre morts dans les rangs de l'ex-Séléka.

De facto, l'avertissement français s'adresse en priorité à ces ex-combattants rebelles, coupables de nombreuses exactions ces derniers mois -pillages, exécutions sommaires- à l'encontre de la population.

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