"Jihadi John" : ce qu'on sait du bourreau de l’EI

© Capture d'écran Youtube
  • Copié
, modifié à
Après la révélation de l'identité du bourreau de l'Etat islamique, les morceaux du puzzle de sa vie s'assemblent.

Il s'est fait connaître dans le monde entier en tenant un couteau dans les vidéos d'exécution d'otages de l'organisation Etat islamique. L'identité de celui qu'on a appelé "Jihadi John" a été révélée la semaine dernière par la BBC. Un nom a été associé au visage masqué de noir des vidéos djihadistes, celui de Mohammed Emwazi, un jeune Britannique de 26 ans.

Les jours passant, la presse britannique a révélé de plus en plus d'éléments de la vie d'un homme énigmatique.

Surveillé depuis l'université. Arrivé du Koweït à l'âge de 6 ans, Mohammed Emwazi a grandi dans l'ouest londonien dans une famille plutôt aisée, avant d'obtenir son diplôme en programmation informatique. Sur le campus de Westminster, où le bureau des élèves est à l'époque tenu par des membres d'un réseau islamiste, il est repéré par les services de renseignements britanniques comme un potentiel candidat au djihad. Selon le Sunday Telegraph, Mohammed Emwazi aurait appartenu à un réseau en contact avec les responsables des attentats manqués de 2005 dans les transports en commun londoniens, deux semaines après des attentats-suicides qui avaient fait 52 morts.

Djihadi John Maison AFP

© La maison d'enfance de Mohammed Emwazi / AFP

Commence alors une longue période de "harcèlement", commis le décrit le jeune homme. Mohammed Emwazi, surveillé par le MI5 et le MI6 (les services de sécurité britanniques) prend contact  avec Cage, une association de défense des droits de l'homme parfois accusée de complaisance avec des terroristes. L'organisation raconte comment Mohammed Emwazi s'est vu refuser un voyage pour "faire un safari" en Tanzanie en 2009. Il est arrêté à l'aéroport, les services de renseignement britanniques le suspectant de vouloir pousser le voyage jusqu'en Somalie, où les shebabs entraînent régulièrement des apprentis djihadistes britanniques.

Il se dit "harcelé". Interrogé par un agent du renseignement britannique, Mohammed Emwazi aurait refusé une proposition de collaboration faite par le MI5, selon Cage. L'association a dévoilé mardi un enregistrement qu'elle dit daté de 2009. On y entend la voix d'un hommage présenté comme Mohammed Emwazi. Il raconte un interrogatoire, dans lequel un agent du renseignement lui demande son opinion sur les attentats du 11-Septembre et de Londres le 7 juillet 2005. "C'est mal", dit-il, déplorant que "des innocents soient morts". "Il m'a demandé : 'Qu'est-ce que tu penses de l'Afghanistan ?' "Ce que je pense ? Des innocents y sont tués", raconte-t-il aussi. A l'époque, il affirmait ne pas être un musulman radical. Il se plaignait auprès de l'association d'être "menacé" par le MI5 et que des agents lui faisaient dire ce qu'il n'avait pas dit.

En 2010, Mohammed Emwazi disait à un journaliste songer au suicide en raison de la pression des services de sécurité britanniques, selon le Mail on Sunday. "Je n'ai pas peur qu'ils me tuent. J'ai plutôt peur de prendre un jour autant de pilules que je pourrai afin de pouvoir dormir pour toujours ! Je veux seulement échapper à ces gens !", écrivait le jeune Londonien.

Des allers-retours au Koweït avant la Syrie. Après l'épisode tanzanien, Mohammed Ezwami se met en tête de retourner après de sa famille au Koweit, pour trouver un travail d'enseignant. Son ancien patron au Koweït parle d'un homme "calme et convenable", "très bon avec les gens". "Le meilleur employé que nous ayons eu", a-t-il ajouté. Il fait régulièrement des aller-retours entre Londres et Koweït city, rapporte Cage, qui précise qu'il a, à chaque trajet, plus de mal à voyager. Jusqu'à la dernière tentative où il est retenu à l'aéroport de Londres, en 2012. Son père raconte alors qu'il est parti "faire de l'humanitaire à la frontière turque".

De kidnappeur à bourreau. Arrivé en 2012 en Syrie, "Jihadi John" ne se fait connaître que deux ans plus tard, en août 2014, quand il apparaît dans la vidéo de l'exécution du journaliste James Foley. "Jihadi John" a lui-même enlevé l'Américain en novembre 2012.

La majorité des otages occidentaux passeront dans ses mains et lui donneront un surnom : "John". Le jeune homme faisait partie d'un trio de djihadistes britanniques affectés à la garde des prisonniers dont les membres ont été surnommés John, Paul et Ringo, en référence aux Beatles à cause de leur accent. Si dans un premier temps, un journal koweïtien affirme que ses parents ont reconnu sa voix dans une vidéo, le père de Mohammed Emwazi a affirmé mercredi qu'aucune preuve ne permettait de dire qu'il s'agissait bien de son fils.

En plus de ses apparitions sur les images des exécutions de Foley, Sotloff, Haines, Henning, Kassig ou encore Yukawa et Goto, le Britannique se serait occupé du recrutement de djihadistes européens, ainsi que des entraînements des jeunes recrues à Raqqa. Le FBI affirmait au mois de septembre avoir identifié le bourreau mais n'a depuis les révélations de la BBC pas réagi. Le MI5 et le MI6 britanniques n'ont également ni réagi, ni donné de précisions, ni même confirmé l'information de la BBC. A Londres, David Cameron a promis que tout serait fait "pour trouver et mettre hors d'état de nuire ceux qui commettent des crimes révulsants et haineux, où que ce soit dans le monde".