Budget européen : un accord a été trouvé

© MAXPPP
  • Copié
Sophie Amsili et Thomas Morel , modifié à
L'ESSENTIEL - Les dirigeants européens ont conclu un accord, a annoncé Herman Van Rompuy.

L'INFO. Les négociations à Bruxelles entre dirigeants européens, qui duraient depuis jeudi soir, ont abouti vendredi en fin d'après-midi, a annoncé sur son compte Twitter le président du Conseil européen, Herman van Rompuy. "Il y a un accord! Le Conseil européen s'est mis d'accord sur un cadre financier pluriannuel pour le reste de la décennie. Cela valait la peine d'attendre", a-t-il écrit peu après 16 heures. Selon les premiers éléments, l'accord portera sur un budget de crise pour les sept prochaines années, en baisse de 3,4% par rapport aux sept années précédentes.

>> Le résumé de la journée de jeudi

De telles coupes, c'est du jamais vu. D'après les premières informations sur les négociations, le dernier texte proposé par le président du Conseil européen Herman van Rompuy prévoit 960 milliards d'euros de crédits d'engagement (c'est-à-dire le plafond de dépenses autorisé) pour la période allant de 2014 à 2020. C'est 33 milliards d'euros de moins que pour 2007 à 2013. Les crédits de paiement (c'est-à-dire les dépenses effectives) atteindront, elles, 908,4 milliards d'euros, soit 34 milliards d'euros de moins qu'avant. Ce serait la première fois depuis le Traité de Rome, en 1957, que le budget alloué à l'Union européenne (UE) reculerait. Contacté par Europe1.fr, Alain Lamassoure, président de la commission des Budgets au Parlement européen et eurodéputé du groupe de droite PPE, a jugé "inacceptables" les premiers chiffres évoqués. "Dans le meilleur des cas, cela nous ramène au budget de 2007, avant la crise. Mais dans le pire des cas, on revient à 2004, lorsque l'UE comptait 15 membres. La politique mourrait à petit feu. Tout esprit européen ne peut que se révolter."

Où seront les coupes ? La Politique agricole commune (PAC) est relativement épargnée, au grand soulagement de la France. Si le programme voit son budget diminuer de 50 milliards d'euros, à 373 milliards, la part revenant à la France devrait rester stable. Pour Alain Lamassoure, ce n'est "pas anormal" dans une période où les prix de vente des matières premières agricoles sont "très au-dessus du prix de revient" des agriculteurs. "En revanche, ce qui n'est pas acceptable, c'est que les investissements d'avenir, au cœur du pacte de croissance défendu par François Hollande, n'augmente que de manière dérisoire. Ce n'est pas avec ça qu'on va retrouver de la compétitivité et faire face aux Etats-Unis et à la Chine."

Quant aux aides aux personnes les plus démunies, comme le craignaient les associations, elles sont amputées d'un tiers de leur budget : elles s’élèvent désormais à 2,5 milliards, contre 3,5 milliards pour la période 2007-2013. Certains postes de dépenses, eux, augmentent. Un programme d'aide aux jeunes chômeurs sera ainsi créé, doté d'un fonds de 6 milliards d'euros. Selon François Hollande, la France pourrait recevoir 10 % de ce montant.

Au total, le budget européen coûterait 0,75 euro par jour aux Français :

Une victoire britannique ? Ce sont donc les partisans de la rigueur qui paraissent avoir obtenu le plus de concessions. En première ligne, la Grande-Bretagne. David Cameron, dont c'est le premier sommet européen depuis l'annonce d'un référendum en Grande-Bretagne sur l'appartenance du pays à l'Union européenne, est arrivé à Bruxelles déterminé.

08.02 Cameron UE

© Reuters

"En novembre, les chiffres présentés étaient vraiment trop élevés. Ils doivent redescendre. Et si ce n'est pas le cas, il n'y aura pas d'accord", avait-il lancé d'emblée. Du côté de la France, on parle déjà d'un "compromis pas mirobolant, mais acceptable".

>> LIRE AUSSI : Cameron et l'UE : "une partie de poker"

Qui a vraiment perdu ? François Hollande essuie donc un revers, mais pour Alain Lamassoure, "le vrai perdant du sommet, c'est l'Europe". "Tout est pollué par le fait que les préoccupations premières des dirigeants sont de maximiser ce qu'ils retirent du budget européen, et minimiser ce qu'ils y apportent", commente-t-il. Dans les années 80, seul le Premier ministre britannique Margaret Thatcher répétait "I want my money back" (je veux récupérer mon argent), mais "aujourd'hui, nous avons 27 Margaret Thatcher autour de la table." Après un tel accord, il reste à connaître la décision du Parlement européen qui pourrait retoquer le budget décidé par les dirigeants.

>> LIRE AUSSI : Sommet européen : chacun affûte ses armes

Le Parlement européen ne veut pas de ce texte. Un obstacle majeur doit encore être surmonté avant la mise en application de ce compromis : le Parlement européen. Les députés de Strasbourg doivent en effet se prononcer sur l'accord avant de l'appliquer. Et il ne sont pas vraiment enthousiastes. Vendredi après-midi, les chefs des quatre groupes politiques du Parlement ont expliqué qu'ils refusaient d'accepter "en l'état" ce budget pluriannuel. "Cet accord ne renforcera pas la compétitivité de l'économie européenne. Au contraire, il ne fera que l'affaiblir. Ce n'est pas dans l'intérêt des citoyens européens", ont estimé dans un communiqué commun Joseph Daul (PPE, conservateurs), Hannes Swoboda (socialistes), Guy Verhofstadt (Libéraux), Rebecca Harms et Daniel Cohn-Bendit (Verts).