Bientôt un droit à l'oubli en Europe ?

Si la directive européenne est appliquée, Facebook, entre autres, devra revoir sa copie en matière de vie privée.
Si la directive européenne est appliquée, Facebook, entre autres, devra revoir sa copie en matière de vie privée. © MAXPPP
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avec AFP , modifié à
Une complexe directive rendue publique mercredi prévoit de mieux protéger les citoyens.

C’est une directive complexe et ambitieuse que Viviane Reding va rendre publique mercredi à Bruxelles. Ancienne journaliste, la commissaire européenne chargée de la Justice veut imposer l’"oubli numérique" pour les citoyens, via le consentement préalable pour l’utilisation de leurs données personnelles. Grande première : des sanctions, parfois lourdes, sont prévues dans le texte. "Le citoyen doit pouvoir contrôler ce qui est mis en ligne", résume Viviane Reding.

La commissaire européenne souhaite ainsi éviter que des entreprises, comme les géants de l'Internet Facebook ou Google par exemple, ne collectent des données personnelles en Europe et se soustraient ensuite à la législation européenne en les stockant à l'étranger. La réforme contraindra donc ces sociétés à obtenir le consentement, en des termes "clairs", des utilisateurs pour recueillir les données, et leur expliquer comment elles seront stockées, pour combien de temps et à quelles fins.

Des contraintes pour les réseaux sociaux

Autre contrainte pour les entreprises : elles devront garantir aux Européens un "droit à l'oubli numérique" qui obligera les réseaux sociaux à supprimer les données personnelles, photographies, coordonnées postales, date de naissance… des utilisateurs qui le demanderont. A cette fin, et aux autres, les compagnies éditant des sites Internet devront recruter des responsables chargés du respect des données personnelles.

Concrètement, ce texte apporte des garanties aux simples citoyens, qui auront désormais le droit de faire retirer par exemple une photographie placée à leur insu sur Facebook, si le cliché peut nuire à leur réputation.  Et le réseau social sera obligé de la faire effacer si l'intéressé le demande et d'avertir de son effacement tous les autres sites pouvant la republier.
En outre, si la publication d’une photo n'a pas obtenu le consentement de l'intéressé, elle ne sera pas utilisable lors d'un entretien d'embauche ni recevable en cas de contentieux. Car le premier réflexe des recruteurs aujourd’hui, c’est de "googliser" les candidats. Et gare aux "e-boulets", ces photos compromettantes prises par exemple lors de soirées un peu trop arrosées.

Amende jusqu’à un million d’euros

Les textes ont été finalisés mardi et ont subi d'importants remaniements, notamment pour les sanctions, autre grande innovation de la réforme. Dans un premier temps, un avertissement de l'autorité nationale de protection des données précédera une éventuelle amende. Cette dernière pourra avoir "un montant maximal d'un million d'euros", montant que la commission espère dissuasif.

Mais avant même d’être rendue publique, cette réforme a déjà ses détracteurs. La commissaire a ainsi été contrainte par ses collègues commissaires à des compromis, car certaines de ses propositions étaient "impossibles à mettre en pratique", a confié une source proche du projet. Mais selon des responsables du secteur numérique à la Commission, certaines dispositions restent peu réalistes. "On ne peut pas imposer les mêmes règles à Facebook et à une petite entreprise", arguent-ils. Par conséquent, il y a un risque réel que le projet de réforme, à vouloir être trop ambitieux, ne voit jamais le jour, ont-ils averti.