Benoît Pellistrandi : "Carles Puigdemont veut aller au clash"

Benoît Pellistrandi, Europe 1, 1280
L'activation par Madrid de l'article 155 de la Constitution "est la suite logique"aux réponses apportées par Carles Puigdemont, estime Benoît Pellistrandi. © Europe 1
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G.D. , modifié à
Benoît Pellistrandi, historien et spécialiste de l'Espagne contemporaine, estime que Carles Puigdemont veut "donner consistance à l'idée que la Catalogne est une région opprimée".
INTERVIEW

Madrid avance dans la procédure de la suspension d'autonomie de la Catalogne. Et cela va dans l'intérêt de Carles Puigdemont, le président séparatiste catalan. "Il veut aller au clash et donner l'idée que la Catalogne est une région opprimée", analyse Benoît Pellistrandi, historien et spécialiste de l'Espagne contemporaine, vendredi matin dans Europe 1 Bonjour. Cette "intervention de l'État central" et "la suspension des autorités catalanes" est donc une occasion toute trouvée pour lui de se mettre en position de victime.

Mais c'est bien Carles Puigdemont qui a provoqué lui-même cette réaction de Madrid. Jeudi, il a affirmé que le Parlement de Catalogne n'avait pas voté la "déclaration formelle d'indépendance". Or "la réponse que l'on attendait de Carles Puigdemont jeudi, c'était d'accepter de revenir à l'ordre constitutionnel", explique Benoît Pellistrandi.

L'article 155, "c'est la suite logique". "Jeudi, Carles Puigdemont a répondu à la question qu'on lui avait posée pour lundi", à savoir : "Est-ce que vous avez proclamé l'indépendance ?" Le dirigeant catalan répond donc "en différé", et "il le fait exprès". En réponse, le gouvernement va donc activer l'article 155 de la Constitution. "C'est la suite logique", analyse Benoît Pellistrandi : "L'article 155 dit clairement que lorsqu'une communauté autonome envahit les compétences de l'État et s'arroge des pouvoirs qu'elle n'a pas, il faut intervenir."

Dans ce bras de fer, ni Carles Puigdemont ni Mariano Rajoy ne peuvent lâcher, au risque de perdre leur crédibilité. "Carles Puigdemont, il y va de sa crédibilité politique. Mariano Rajoy, il est obligé par la Constitution de maintenir l'unité de l'Espagne et le bon fonctionnement des institutions. S'il ne faisait rien, il serait hors-jeu constitutionnellement, lui aussi", explique Benoît Pellistrandi. La suite directe est donc, "d'ici fin octobre, la mise en route de l'article 155 (...) mais il n'est pas impossible qu'entre-temps, le président Puigdemont fasse voter par le Parlement de Catalogne la déclaration unilatérale d'indépendance", ce qui "rajouterait encore une difficulté". L'affrontement est encore loin d'avoir donné son verdict.