Aux Pays-Bas, l'extrême-droite divise pour régner

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avec AFP , modifié à
Son leader espère attirer des électeurs après avoir claqué la porte du gouvernement de coalition.

Aux Pays-Bas aussi, l'extrême-droite rythme l'agenda politique. En raison de dissensions avec cet allié, le Premier ministre néerlandais Mark Rutte a dû présenter lundi à la reine la démission de son gouvernement de centre-droit, au pouvoir depuis octobre 2010.

Comment l'extrême-droite néerlandaise est-elle devenue incontournable ? Europe1.fr fait le point.

Comment le parti de Geert Wilders est-il arrivé au pouvoir ? Pour les législatives de 2006, Geert Wilders crée le PVV (Parti pour la Liberté) qui rafle 9 des 150 sièges du parlement. Peu après, il réclame un "arrêt total" de l'immigration en provenance des pays musulmans et de la construction de mosquées.

Le PVV triple quasiment ce score lors des législatives anticipées de juin 2010, obtenant 24 sièges de députés et devenant ainsi la troisième force politique du pays.

Le gouvernement minoritaire de Mark Rutte conclut une alliance avec l'extrême-droite au moment de son entrée en fonction en octobre 2010 : en échange du soutien du PVV à un vaste programme de coupes budgétaires, le parti de Geert Wilders obtient notamment l'interdiction du voile intégral. Jusqu'à la démission d'un de ses députés le 21 mars, le parti islamophobe et eurosceptique assurait au gouvernement la majorité absolue de 76 sièges sur 150.

Quelle est l'origine du clash de cette semaine ? Samedi, le leader du parti d'extrême-droite néerlandais, Geert Wilders, a claqué la porte des négociations sur des mesures visant à réduire le déficit public, menées depuis le 5 mars avec la coalition minoritaire dirigée par Mark Rutte, qu'il soutenait au parlement. Leur mission : s'entendre sur les mesures à prendre pour dégager 16 milliards d'euros d'économies afin de réduire le déficit public des Pays-Bas qui a atteint 4,7% du PIB en 2011, bien au-delà de la norme de la zone euro, soit 3%.

Le paquet de mesures sur la table des négociations prévoyait notamment une légère hausse de la TVA, un gel des salaires des fonctionnaires et une réduction du budget de la santé et de l'aide aux pays en développement.

Avec ce geste, Geert Wilders a ainsi rompu l'accord de soutien conclu avec le parti libéral (VVD) de Mark Rutte et les chrétiens-démocrates (CDA) du vice-Premier ministre Maxime Verhagen. Mark Rutte a alors convoqué un conseil des ministres extraordinaire pour lundi matin, jugeant "évidente" l'organisation d'élections législatives anticipées.

Quelles conséquences politiques pour l'avenir ? Le gouvernement "démissionnaire" est chargé de gérer les affaires courantes jusqu'à l'organisation d'élections législatives anticipées, désormais plus probables que jamais.

Plusieurs observateurs estiment qu'avec ce coup d'éclat, Geert Wilders a tenté d'attirer des électeurs, notamment la frange âgée de la population. "C'est un pari sur les personnes âgées, afin que celles-ci se disent que Wilders se préoccupe de leurs problèmes", affirme Rene Tissen, un professeur d'économie politique à l'université de Nijenrode, près d'Utrecht (centre). Se sentant menacé par ses alliés du gouvernement, Geert Wilders a claqué la porte des négociations afin de marquer le coup auprès de ses électeurs potentiels, préférant provoquer lui-même la fin de l'alliance avec le gouvernement plutôt que d'attendre que d'autres décident à sa place, selon Rene Tissen.

Le départ en fanfare du leader d'extrême-droite serait donc "la dernière chance pour Wilders de frapper un grand coup", considère pour sa part Alfred Pijpers, ancien professeur en sciences politiques à l'université d'Amsterdam.