Aux États-Unis, les élections de mi-mandat pourront-elles rebattre les cartes entre démocrates et républicains ?

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Xavier Yvon, correspondant aux Etats-Unis, édité par Anaïs Huet , modifié à
Garder le contrôle sur la Chambre des représentants et le Sénat à Washington, tel est l'objectif de Donald Trump, à deux semaines des élections de mi-mandat aux États-Unis. Europe 1 vous explique les enjeux de ce scrutin, dont le taux de participation pourrait atteindre des records.
ON DÉCRYPTE

Les Américains vont-ils faire payer sa politique à Donald Trump, ou bien au contraire le conforter ? Deux ans après avoir mené à la Maison-Blanche l'outrancier magnat de l'immobilier, ils retournent aux urnes dans deux semaines pour les "midterms", l'élection des membres du Sénat et de la Chambre des représentants, aujourd'hui tenus par les Républicains. 

Et si le nom de Donald Trump n'est pas inscrit sur les bulletins de vote, il est dans toutes les têtes. Les études d'opinion montrent que le président est le facteur décisif dans le choix des Américains au moment de désigner son sénateur ou son gouverneur.

Un pays plus divisé que jamais

Éreintés par les excès en tout genre du début de mandat de Donald Trump, les démocrates sont plus motivés que jamais pour le sanctionner à l'occasion des "midterms", et l'empêcher de mener à bien sa politique en le privant de sa majorité au Congrès. À gauche, la mobilisation est telle qu'elle se déploie au-delà des habituels militants.

À 54 ans, Bill Nichols, un père de famille du Connecticut, n'avait jamais fait campagne de sa vie. Pourtant, cette fois, il va militer pour le parti démocrate en passant des coups de téléphone à travers tout le pays. "Je n'ai jamais été aussi inquiet. C'est la première fois dans ma vie que je hais vraiment un politicien. Donald Trump est un tel hypocrite, un tel menteur… Il s'en fiche de ce pays, il n'y a que lui et sa base qui comptent. Il va ruiner notre pays !", s'agace-t-il au micro d'Europe 1. Pour lui, "il faut vraiment mettre un frein à Trump, à ce train fou de l'enfer. Et le seul moyen, c'est de voter."

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De leur côté, les électeurs de Donald Trump, eux, sont plus que satisfaits de la première partie de mandat de leur champion. Rob, ouvrier dans l'automobile à Détroit, dans le Michigan, est persuadé qu'il doit entièrement à Donald Trump les bonus sur son salaire cette année. "Ce n'est pas sorcier : on a un homme d'affaires à la tête du pays, donc les choses vont bien. Les marchés battent des records. On vend nos voitures plus vite qu'on ne les fabrique. Nos profits vont être bons cette année, et comme on touche 800 dollars à chaque milliard de profit… Je ne pourrais pas être plus heureux du président et de son travail. Les Républicains doivent garder la majorité pour continuer sa politique."

À quoi cela va-t-il se jouer ?

Depuis plusieurs semaines, Donald Trump est en campagne et martèle ses arguments : l'économie tourne à plein régime, le chômage est au plus bas, et la Cour suprême compte désormais une majorité conservatrice. Le président américain publie régulièrement des tweets de soutien à tel ou tel candidat, et se rend à des meetings plusieurs fois par semaine.

Traditionnellement, pour les élections de mi-mandat, les Américains votent peu. Il y a quatre ans, à peine un électeur sur trois s'est déplacé jusqu'aux bureaux de vote. Mais cette fois, le taux de mobilisation pourrait bien battre des records. Les femmes pourraient d'ailleurs faire la différence, notamment celles des banlieues aisées et éduquées. Laura est patronne d'une entreprise de paysagisme à Dallas, dans le Texas. Avec une trentaine de femmes, dans le gigantesque living-room d'une maison très cossue, elle suit une formation pour apprendre à faire campagne par téléphone pour les démocrates. S'il s'agit d'un virage à 180 degrés pour ces femmes, qui ont toujours glissé un bulletin républicain dans l'urne, cette décision est la marque de leur colère.

"Donald Trump a évidemment été le tournant pour moi. Que le parti républicain ait été incapable de s'opposer à lui m'a dégoûtée", déplore Laura au micro d'Europe 1. Surtout, ce que ne supporte plus la Texane, c'est la façon qu'a Donald Trump de "parler des femmes." "En tant que femme et que mère d'une petite fille, je ne peux pas le supporter. Je vois des femmes se lever et se mobiliser à un point que je n'avais jamais vu de ma vie", explique-t-elle, en référence à l'ampleur du mouvement #MeToo et aux "Women March". Le groupe de quartier de Laura est d'ailleurs passé de quatre femmes à sa création à 350 ces derniers mois.

D'ores et déjà, les sondages indiquent que le sénateur sortant républicain, Ted Cruz, est menacé par la nouvelle star démocrate, Beto O'Rourke. Dans un État aussi conservateur que le Texas, c'est déjà un exploit.

À deux semaines du vote, que disent les sondages ?

Depuis l'élection surprise de Donald Trump, on a tendance à se méfier des sondages aux États-Unis. Pour l'heure, ils prévoient tout de même que les démocrates ont de bonnes chances de reprendre la Chambre, et les républicains de garder le Sénat. En clair, le président américain limiterait les dégâts. Mais tout reste possible, et Donald Trump pourrait encore déjouer les pronostics. Rendez-vous le 6 novembre.

Les "midterms", comment ça marche ?

Les républicains règnent sur la politique à Washington depuis 2016 : en plus de Donald Trump à la Maison Blanche, ils disposent d'une confortable majorité à la Chambre des représentants et d'une courte avance au Sénat (51 sièges contre 49). Tout pourrait changer le 6 novembre, lorsque les 435 sièges de la Chambre et un tiers de ceux du Sénat (35 sur 100) seront en jeu, en plus de nombreuses élections locales.

À la Chambre, les démocrates doivent gagner 23 sièges s'ils veulent reprendre la majorité. Et cela reste fort probable. Le site FiveThirtyEight, référence dans les prédictions électorales, leur donne ainsi cinq chances sur six, à deux semaines et demi du scrutin. Mais une trentaine d'élections sont encore trop serrées pour qu'un vainqueur n'émerge avec certitude.

Pour le Sénat, les démocrates font, par un hasard du calendrier électoral, face à une conjoncture beaucoup plus difficile : ils doivent défendre 26 des 35 sièges en jeu, dont plusieurs dans des États qui ont voté pour Donald Trump en 2016. FiveThirtyEight ne leur donne là qu'une chance sur cinq. Et les républicains pourraient même renforcer leur majorité.