Afrique : 2016, une année électorale décisive

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Europe 1

Le diplomate Jean-Christophe Rufin était l’invité de David Abiker, dimanche, dans "C’est arrivé demain", pour aborder les élections présidentielles qui avaient lieu dans la journée en Afrique, et vont se succéder toute l'année.  

Dimanche, le Congo-Brazzaville, le Bénin ou encore le Niger se rendaient aux urnes. Pour la seule année 2016, pas moins de 16 élections présidentielles se tiendront sur le continent africain. Le diplomate et académicien Jean-Christophe Rufin était l’invité de David Abiker, dimanche, dans "C'est arrivé demain", pour parler du vent démocratique qui semble souffler sur l'Afrique : illusion ou changement réel ? 

Le risque d’une démocratie "en trompe-l’œil". "Un hasard de calendrier", certes, "mais il y a en Afrique, un peu comme partout d’ailleurs, une mode démocratique", analyse Jean-Christophe Rufin, qui connaît bien le continent où il fut ambassadeur de France. Toutefois, il y a plusieurs types de cas de figure et la présence d'élections n'est pas pour autant synonyme de démocratie. "Aujourd’hui, le colonel qui prend le pouvoir, ça ne se fait plus. Il faut être élu. Même si vous êtes un dictateur, il faut avoir l’onction des urnes".

Alors, si certaines élections sur le continent africain sont le reflet "de vraies" vies démocratiques, d'autres sont seulement "des maquillages". Comme au Congo où le président Denis Sassou-Nguesso, au pouvoir depuis 32 ans, "va, une fois de plus, essayer de se faire donner l'onction des urnes", et qui, "probablement, prendrait les armes, s'il n'était pas élu", juge l'ex-président d'Action contre la faim. 

Des cas de figures contrastés. Une Afrique politique "très contrastée", "très en trompe-l’œil", dont on ne peut parler de façon générale, insiste le diplomate, estimant qu’il faut "vraiment regarder les situations dans le détail". Au Niger, par exemple, "on est au comble du ridicule : Hama Hamadou, le deuxième candidat, qui challenge le président Mahamadou Issoufou, est en prison ou dans sa chambre d’hôpital depuis le début de la campagne", raconte Jean-Christophe Rufin. "On peut dire que les armes sont inégales et on ne peut pas espérer grand-chose".

Du Bénin... Du côté du Bénin, "qui était sur la voie d'une véritable vie démocratique", la situation se gâte quelque peu. Le Franco-Béninois Lionel Zinsou, candidat à la présidence, a ainsi été "soumis à une campagne de haine raciste, il faut dire les choses comme elles sont". "C'est un métisse, on lui reproche d'être Français... D'une certaine façon, on lui reproche d'être blanc", pointe le diplomate. Le Premier ministre sortant a d'ailleurs reconnu, dans la nuit de dimanche à lundi, sa défaite face à l'homme d'affaires et "roi du coton" Patrice Talon.

Au Burundi. Exception notable sur le continent, le Sénégal, qui votait dimanche en référendum pour une révision constitutionnelle, portant sur la réduction du mandat présidentiel. "Le Sénégal est un pays démocratiquement très vivant", poursuit Jean-Christophe Rufin qui fut, jusqu'en juin 2010, ambassadeur de la France à Dakar.

"Une privatisation de l'Etat". Ambitions d'ordre personnel, faiblesse de l'état... Nombreux sont les facteurs qui expliquent l'absence de démocratie dans certains pays. On constate une "sorte de privatisation des Etats, avec des gens qui, d'une certaine manière, se sont approprié le pouvoir", résume le diplomate et écrivain.

Au Burundi, Pierre Nkurunziza est l'exemple même de l'homme politique "qui veut absolument s’accrocher, au risque de partir avec la nappe et de faire péter ce pays", illustre Jean-Christophe Ruffin. Un pays "fragile", qui était pourtant "vraiment bien bien reparti après une période dramatique dans les années 1990". Mais, "vous avez un type au pouvoir, qui n'entend pas le lâcher". Et ce, malgré un climat d'extrême tension.

>> Retrouvez l'intégralité de l'émission de David Abiker, "C'est arrivé demain", en cliquant ici