Afghanistan, récit d’un sous-officier

Un photo-reporter du Figaro Magazine a suivi les six mois de mission du sergent Christophe Tran Van Can en Afghanistan.
Un photo-reporter du Figaro Magazine a suivi les six mois de mission du sergent Christophe Tran Van Can en Afghanistan. © NICOLAS MINGASSON/FIGARO MAGAZINE
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Un photo-reporter du Figaro a pu suivre les 6 mois de mission d’un Français à l’est de Kaboul.

Six mois de mission, de tension, mais aussi d’attente. C’est l’expérience qu'a voulu suivre et retranscrire le photo-reporter Nicolas Mingasson, qui publie samedi un long article Le Figaro Magazine. Il a suivi Christophe Tran Van Can, sergent d'une unité de combat de l'infanterie de marine, avant, pendant et après sa mission en Afghanistan. Invité vendredi dans Europe 1 Soir, il a livré un aperçu de cette expérience parmi les troupes de l'armée française à Kapisa, au nord-est de Kaboul. Morceaux choisis.

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"Au départ s’est posé la question de savoir quel grade on va choisir : il y avait soldat, officier ou sous-officier. Cela s’est fait un petit peu par hasard de tomber sur un sous-officier, un sergent en l’occurrence, mais c’est tombé parfaitement parce que c’est sans doute le grade qui est le mieux à même de raconter l’expérience de la guerre en Afghanistan", a décrypté Nicolas Mingasson.

"Parce qu’il est à cheval entre les soldats qu’il gère lui-même, huit hommes de rang qu’il a sous sa responsabilité, et les officiers. Il fait vraiment la jointure entre ces deux mondes de l’armée", a-t-il ajouté.

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© NICOLAS MINGASSON/FIGARO MAGAZINE

L’Afghanistan, mission rêvée "qui leur fait peur"

Lorsqu'il reçoit son ordre de mission pour l'Afghanistan, Tran Van Can est visiblement content. "Il font ce métier pour l’aventure. C’est la mission qui leur fait peur, mais c’est aussi celle dont ils rêvent", commente le journaliste, avant d'ajouter : "ils espèrent au début, pour savoir ce qu’ils valent sous le feu. Puis effectivement, il y a un moment où ils se disent : ‘c’est bon, j’ai vu ce que c’est. Ça suffit, on ne prend plus de risques’, mais ils continuent d’assurer la mission jusqu’au bout".

"Ce sont des patrouilles qui sont calmes et qui tout d’un coup basculent : c’est les insurgés qui attaquent. On bascule du calme au combat en quelques instants", témoigne Nicolas Mingasson, parlant de "de vrais scène de combats, c’est une vrai guerre : il n’y a pas de doute là-dessus".

Internet, "un plus énorme"

Abordant la question du lien avec la famille restée dans l'Hexagone, Nicolas Mingasson est catégorique : l'Internet "est un plus énorme", notamment les logiciels MSN ou Skype, qui permettent de communiquer par texte, son et/ou vidéo. "La vraie nouveauté pour eux, c’est d’avoir la vision mouvante de leurs familles, cette impression de voir grandir leurs enfants", poursuit-il, avant de donner un exemple marquant : "Christophe Tran Van Can me disait tout simplement : 'c’est les vacances, je les vois bronzer’. Ce genre de petit détail est pour eux important".

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© NICOLAS MINGASSON/FIGARO MAGAZINE

Apolitique, le soldat se découvre une proximité avec l'insurgé

Le but de cette opération extérieure, qui ne cesse de s'enliser, est-il débattu entre militaires ? "Là-bas, ils ne veulent pas trop se poser de questions", évacue le phot-reporter, avant d'évoquer une anecdote significative. "Un soir, j’ai discuté avec le pilote du véhicule blindé : il a commencé à me répondre et, tout d’un coup, il s’est arrêté net en me disant : ‘mais attends, tu es en train de m’embarquer sur une question politique. Si je commence à gamberger sur ce genre de choses, demain j’aurais peut-être un temps de retard au moment où il va falloir riposter. Ce temps de retard peut me couter très cher’ ".

Pourtant, les insurgés auxquels ils font face ne leur inspirent aucun mépris. "Ils ont découvert qu’en face d’eux les insurgés sont des vrais et de bons combattants. Ils ont découvert que les insurgés étaient des gens qui savent se battre, qui savent se poster", raconte Nicolas Mingasson, avant de préciser que le sergent Tran Van Can, compréhensif, aurait lui aussi pris les armes contre ce qu'il faut bien appeler "une armée d'occupation".