Affaire Cassez : une "décision politique"

Pour Rolan Pelletier, avocat franco-mexicain qui exerce à Mexico, la Cour suprême "n'est pas indépendante"
Pour Rolan Pelletier, avocat franco-mexicain qui exerce à Mexico, la Cour suprême "n'est pas indépendante" © REUTERS
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LE POINT DE VUE DE - Rolan Pelletier est un avocat franco-mexicain qui exerce à Mexico.

L'actu. Alors que la Cour suprême mexicaine a annulé la condamnation de Florence Cassez et ordonné sa libération immédiate, l'avocat franco-mexicain Rolan Pelletier estime que la décision "n'est pas judiciaire mais politique". Interrogé par Europe1.fr, il assure également que l'affaire aurait pu être dénouée bien plus tôt.

Pourquoi la Cour suprême a-t-elle changé d'avis, selon vous ? Je pense que notre Cour suprême n'est pas indépendante. Elle dépend du pouvoir exécutif. Je m'explique : tout existait depuis le premier jour, il n'y a pas de nouvel élément entre les deux fois précédentes où le dossier a été examiné par la Cour suprême et cette fois. Pourtant, la première fois, en 2011, les juges ont refusé le recours en "amparo", l'an dernier ils n'ont pas réussi à se mettre d'accord. Et cette fois, pourquoi ont-ils décidé d'annuler sa condamnation et de la libérer.

La seule chose qui a changé, c'est le président de la République au Mexique. Felipe Calderon s'était brouillé avec Nicolas Sarkozy. Avec le nouveau chef de l'Etat, Enrique Pena Nieto, qui était, je crois, favorable à Florence Cassez, tout semble basculer favorablement. Pour moi, il s'agit d'une décision politique pour apaiser les relations avec la France, sous couvert d'une décision judiciaire.

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L'affaire Cassez aurait-elle pu être résolue autrement ? Oui. En 2009, lorsque Nicolas Sarkozy fait une visite officielle au Mexique, plusieurs députés lui demandent de ne pas évoquer le cas de Florence Cassez. Il ne les a pas écoutés. Le président Felipe Calderon a été froissé par l'attitude de Sarkozy et a refusé la demande. Or, je suis convaincu qu'il aurait pu accepter le transfèrement de Florence Cassez en France. Et elle aurait pu être chez vous depuis trois ans.

Comment les Mexicains voient-ils la libération de Florence Cassez ? 80% des gens dans la rue sont contre cette décision. Pour l'opinion publique, la France est intervenue et on a laissé sortir une criminelle.

A titre personnel, je suis content que cette affaire soit terminée. C'était ridicule que les relations franco-mexicaines soient bloquées à cause de cela. Mais la page va se tourner et un nouvel élan va relancer les relations.

Cette affaire va-t-elle influer sur le fonctionnement de la justice mexicaine ? Je ne crois pas que cette affaire change les choses. D'abord parce que, pour moi, il s'agissait plus d'une décision médiatique que juridique. Tout le monde sait que la justice mexicaine est opaque et ne fonctionne pas bien. Cette décision de la Cour suprême en est une nouvelle preuve.

Éventuellement, l'affaire Cassez aura des effets sur la police. Ce dossier s'est effondré à cause des preuves. Je crois que désormais la police ne pourra plus faire comme avant.