Abou Mohammed Al-Adnani, "un chef opérationnel extrêmement dangereux"

La coalition a mené une frappe aérienne à Al-Bab, au nord-est d'Alep, en Syrie.
La coalition a mené une frappe aérienne à Al-Bab, au nord-est d'Alep, en Syrie. © AFP
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C.P.-R. , modifié à
Mardi soir, l'Etat islamique a annoncé la mort de l'un de ses plus hauts dirigeants, connu comme son porte-parole officiel. Mais le Syrien était en réalité bien plus que cela. 

Il était surnommé "cheikh Adnani" par ses sympathisants. Mardi soir, le groupe djihadiste Etat islamique (EI) a annoncé la mort de son porte-parole, Abou Mohammed Al-Adnani. Ce Syrien aurait été tué lors d'une frappe menée par les forces de la coalition près d'Al-Bab, dans la région d'Alep, en Syrie. Si son décès n'a pas encore été confirmé, les Etats-Unis ont indiqué que ce haut cadre de l'EI avait bien fait l'objet d'une frappe de drone ciblée.

  • Qui était Abou Mohammed al-Adnani ?

Originaire d'Idleb, dans le nord-ouest syrien, selon une biographie produite par l'Etat islamique, Abou Mohammed Al-Adnani s'était engagé dans le djihadisme au début des années 2000, en prêtant allégeance au redouté chef d'Al-Qaïda en Irak - précurseur de l'EI - Abou Moussab Al-Zarqaoui. Il s'est notamment illustré, dans un appel audio diffusé en 2014, en exhortant les sympathisants de l'Etat islamique à passer à l'action, dans leur pays d'origine, pour tuer "les mécréants" des pays membres de la coalition.

Abou Mohammed Al-Adnani appelait alors ceux qu'il nomme "les soldats du califat" à tuer par n'importe quel moyen les mécréants : "Frappez sa tête avec une pierre, égorgez-le avec un couteau, écrasez-le avec votre voiture"…  Le mode opératoire choisi par l'auteur de l'attaque à Nice, qui a causé la mort de 86 personnes, le 14 juillet dernier, répond à cet appel à tuer par tous les moyens.

  • Quel était son rôle au sein de l'EI ?

S'il était présenté comme le porte-parole de l'organisation terroriste, Abou Mohammed Al-Adnani occupait en réalité un rôle bien plus crucial au sein de l'EI. Il était en effet était le coordonnateur de toutes les opérations menées à l'étranger par le groupe terroriste.

"Il était, à ce titre, le commanditaire des attentats de Paris et Bruxelles : c'est lui qui avait sélectionné, si ce n'est recruté la plupart des membres des commandos. C'est lui qui les avait formés, financés. C'est aussi très certainement lui qui avait supervisé et validé, le plan d'infiltration et d'attaque", développe Didier François, spécialiste des questions de défense et de terrorisme à Europe 1.

D'ailleurs, "de nombreux terroristes lui ont très directement fait allégeance dans leurs messages de revendication". C'est notamment le cas de Larossi A., l'assassin du couple de policiers tués, en juin dernier, à Magnanville, et qui a revendiqué son geste en direct sur Facebook Live.  

"Après certains attentats déjoués, au cours d'interrogatoires, des kamikazes arrêtés ont révélé qu'ils avaient reçu leurs consignes d'Abou Mohammed Al-Adnani en personne", poursuit Didier François. Les services de renseignement occidentaux l'avaient d'ailleurs surnommé le "ministre des attentats".

Par conséquent, le Syrien était avant tout "un chef opérationnel, extrêmement dangereux". D'autant plus que celui qui évoquait souvent "les sales Français" avait "une sorte d'obsession à frapper la France", précise le spécialiste.

  • Est-ce un coup dur porté à l'organisation terroriste ?

"Le retrait d'Al-Adnani du champ de bataille porterait un nouveau coup important à l'Etat islamique", a indiqué mardi soir le porte-parole du Pentagone Peter Cook, qualifiant le djihadiste de "principal architecte des opérations extérieures de l'EI et porte-parole en chef de l'EI".

Aymenn Jawad Al-Tamimi, spécialiste des mouvements djihadistes, a expliqué auprès de l'AFP que sa disparition était "symboliquement importante et, plus largement, une indication du déclin de l'Etat islamique". "Si une frappe aérienne de la coalition l'a touché, cela montre que la pénétration des renseignements de la coalition est très élevée. Sinon, il n'aurait pas été possible d'éliminer autant de personnes de haut rang", conclut-il.