Un critique culinaire britannique raconte la pire expérience de sa vie dans un trois étoiles parisien

Christian Le Squer - George V - 1280
Christian Le Squer, meilleur cuisinier en 2016, dirige les cuisines du Cinq, restaurant triplement étoilé du George V © LIONEL BONAVENTURE / AFP
  • Copié
A.C. , modifié à
Jay Rayner, critique gastronomique du Guardian, a déjeuné au Cinq, le restaurant de l'hôtel George V, et visiblement il n'a pas aimé. Sa chronique au vitriol fait le tour du web. 

"C'est de loin la pire expérience que j'ai vécue dans un restaurant en 18 ans de carrière", balance Jay Rayner, critique anglais de 50 ans pour le Guardian. Le fin gastronome a eu du mal à digérer l'addition, plutôt salée, pour un repas à deux : 600 euros. Il ne s'est d'ailleurs pas gêné pour raconter les détails, gratinés, de son aventure dans le restaurant triplement étoilé, le Cinq, et noté 9,7/10 sur La Fourchette.  

Une odeur de renfermé, goût gingembre. Première salve lorsque le journaliste pénètre dans la salle du restaurant, dirigé par Christian le Squer, élu chef de l'année en 2016 par ses pairs. "La salle est décorée dans les tons taupe, biscuit et mépris, agrémentée de quelques dorures destinées aux ordures habituées des lieux", glisse-t-il d'entrée. Une décoration, selon lui, "aussi élégante qu'une meute de supporteurs de foot hurlant sur l'arbitre".

Cet amateur de jazz s'installe ensuite à table. Les serveurs lui apportent l'apéritif : une bille transparente posée sur une cuillère, semblable à "un implant mammaire en silicone, taille Barbie", selon les dires du critique. Une fois en bouche, la sphère lâche "une odeur de renfermé, goût gingembre". Pis, il décrit les impressions de son amie à table : "on a l'impression de manger un vieux préservatif oublié par terre au fond d'un magasin de fruits et légumes". 

"Je n'ai jamais rien mangé de plus immonde". Jay Rayner poursuit en roue libre, entrée-plat-dessert. Il débute avec la gratinée d'oignons à la parisienne, "une préparation noire comme vos cauchemars et collante comme le sol après une boum d'adolescents". Sans conviction, encore, il s'attaque au plat de résistance. Un pigeon, "demandé cuit à point, servi rose". Il décrit son oiseau, qui "pourrait se remettre à voler après quelques coups de défibrillateur". Ou son morceau d'agneau, "minuscule", à 95 euros.

Le critique termine par une petite gerbe, sur le cheesecake "aux grumeaux de persil congelé". Il demande à la serveuse ce qu'il a devant les yeux, qui répond "n'est-ce pas magnifique", conte-t-il. Ce à quoi il lui rétorque "non, je n'ai peut-être jamais rien mangé de plus immonde, on dirait de la tonte de gazon". 

A la fin de l'envoi, il se couche, dépité devant l'addition : 600 euros pour deux personnes. 

Un habitué du 'rich bashing'. Cette critique, pleine d'humour et de mauvaise foi, fait rire les lecteurs du Guardian. Un proche du chef regrette ce style de récit, très proche de l'entertainment, a-t-il indiqué à la rédaction du Monde. Pour lui, "ce n'est pas de la critique culinaire, c'est du divertissement qui va très loin dans l'humour et dans l'outrance". Une sorte de 'rich bashing', mais surtout "la revanche des Anglais sur des Français mangeurs de grenouilles".