Ces maisons qui portent un nom (3)

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Nommer sa maison pour parler de soi : Pourquoi continuer à donner, de nos jours, un nom à sa maison ? Pour que celle-ci soit aisément identifiée.

Nommer sa maison pour parler de soi : Pourquoi continuer à donner, de nos jours, un nom à sa maison ? Pour que celle-ci soit aisément identifiée.

 

 

 

 

 

 

 

Un peu de moi

 

 

Pour parler au passant et, du secret du chez-soi, lui dire quelque chose qu’il doit déchiffrer et interpréter seul. Mais encore ?

 

 

 

Les noms des maisons parlent d’itinéraires de vie, de rêves aboutis, de projets à réaliser ou d’aspirations. « Mon désir » évoque la réussite et l’aboutissement d’un long cheminement vers le statut de propriétaire, « Le refuge » parle du repos bien gagné, « L’élan » de l’espoir de rester ouvert et dynamique, « Le grand calme » fait deviner des tempêtes privées et leur dépassement, « Welcome » met à l’honneur l’hospitalité, « Le cottage fleuri », « Rires », « Le beau logis », « Lumière d’été » déclinent la joie de vivre, la clarté et la beauté, etc.

 

 

 

Ce sont autant d’aveux que de brèves déclarations morales, de résumés de maximes et d’allusions à une philosophie personnelle de la vie.

 

 

 

 

Gravés en façade, le nom fait sortir une maison d’une forme particulière de mutisme : celui des autres maisons de la rue et de la ville qui n’ont que les éléments architecturaux de leur façade pour véhiculer le message de l’habitant mais aussi un savoir sur l’habitant.

 

 

 

Toute façade « parle » mais une façade qui porte un nom révèle plus l’habitant dans la mesure où il met en valeur ce qui compte le plus pour lui. Le nom de la maison dévoile des ancrages affectifs : l’attachement aux enfants ou à une origine culturelle, l’appartenance à une tribu ou à un terroir. Il fait sortir l’habitant de l’anonymat requis par le fait que la maison donne sur la rue.

 

 

 

Car la rue est par excellence le territoire public où chacun est censé être l’égal de tout autre et aussi anonyme que l’autre. Ne dit-on pas que la rue appartient à tout le monde ?

 

 

 

En d’autres termes, le nom de la maison souligne à la fois l’existence de l’habitant dans l’espace public qui suppose l’anonymat et, en même temps, qualifie sa présence de manière originale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Comment se rendre présent ?

 

 

 

Les maisons n’ont plus besoin de noms. Elles existent socialement par leur adresse. Leur donner un nom devient, dans ce contexte, un acte libre et gratuit, contrairement, par exemple, au nom de famille dont on hérite ou au prénom qui nous est donné et qui, tous les deux, font peser sur chacun une histoire familiale et culturelle particulière.

 

 

 

Contrairement au nom hérité sur lequel personne n’a de prise concrète et qui donne de soi une image sur laquelle personne n’exerce de véritable contrôle, le nom que l’on donne à sa maison révèle de nous ce que nous voulons en dévoiler à l’exclusion de toutes les autres facettes de soi. En ce sens, il nous définit aux yeux des autres et arrête leurs spéculations là où nous désirons qu’elles s’arrêtent.

 

 

 

Comme l’ordre de la maison arrête le regard du visiteur en excluant toute allusion à nos éventuels désordres ou désarrois intérieurs, comme la mise en décor du salon, cette avant-scène de la maison, arrête le jugement du visiteur sur nos qualités en matière d’esthétique et de morale, la façon dont le nom de la maison est inscrit, le choix des matériaux et des caractères, la place et la visibilité qui lui sont accordées sont des éléments d’une mise en scène plus globale de soi.

 

 

 

Cette initiative, parce que privée et dirigée vers le public, exige, comme toute mise en scène, mille décisions intimes, que cette intimité soit vécue avec soi-même, en couple ou en famille.

 

 

 

 

 

 

C’est dans les replis de ces décisions qu’émergent l’humour, les jeux de mots et les effets déconcertants des noms inattendus, forgés de toutes pièces selon des règles secrètes qui égarent, l’espace d’un instant, le passant.

 

 

 

L’art de nommer sa maison est un art modeste et peut-être mineur mais il continue à être pertinent tant qu’il reste inventif, c’est-à-dire vivant.

 

 

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Ces maisons qui portent un nom (1) : en façade ou sur les portillons

Ces maisons qui portent un nom (2) : la famille prend l'initiative