Piratages : Anonymous et l'État Islamique se font la guerre

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avec Aude Leroy , modifié à
CYBERGUERRE - En réponse aux trois attentats de la semaine dernière, plus de 1.000 sites ont été hackés en seulement trois jours.

Pendant que des millions de Français défilaient dans les rues après les attentats contre Charlie Hebdo, Anonymous et pro-djihadistes ont multiplié les piratages en ligne, dimanche, dans l'Hexagone. Selon nos informations, des hackers disant appartenir à un groupe de cyber-résistants de la rive sud de la Méditerranée (notamment d'Algérie) ont piraté, d'après les informations exclusives d'Europe 1, plus de 1.000 sites d'entreprises, écoles, associations et même de boîtes de nuit. Dans le même temps, les pirates anonymes masqués ont mis à terre plusieurs sites de propagande via l'opération "#OpCharlieHebdo".

Mise à jour, vendredi à 20h : Selon l'ANSSI (l'agence nationale de sécurité des systèmes informatiques) et le CALID (le centre opérationnel de cyber défense du ministère de la Défense), ce sont bien 1.000 sites qui ont été touchés, comme le révélait Europe 1 dès mardi. Pour l’amiral Coustillière, patron du CALID, il s’agit d’une "manifestation" virtuelle, une "contestation". D’ailleurs au ministère de la Défense, une cellule de crise "cyber" a été montée pour la première fois mardi dernier. Elle est composée d’une dizaine de personnes, installée au cœur du ministère, qui travaille 24 heures sur 24 en ce moment, en lien avec toutes les autres cellules de crise, en temps réel pour répertorier les attaques, les analyser, les classifier.

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Les Anonymous passent à l'action. "La liberté d'expression et d'opinion est une chose non négociable, s'attaquer à elle, c'est s'attaquer à la démocratie. Attendez-vous à une réaction massive et frontale de notre part car le combat pour la défense de ces libertés est la base même de notre mouvement", expliquait Anonymous vendredi dans un communiqué.

Après l'annonce d'une vengeance à venir, le groupe de hackers Anonymous est passé à l'action dimanche, jour de manifestation nationale. Ces pirates anonymes ont mis hors service plusieurs portails en ligne accusés de propagande djihadistes. Sous le nom de code "#OpCharlieHebdo", les hackers ont attaqué les sites "alintibaha" et "Ansar-alhaqq", qui hébergent de nombreux messages djihadistes. D'autres actions étaient attendues dans les jours à venir.

Les anti-Charlie Hebdo attaquent des entreprises et écoles. Le 7 janvier, au soir des attaques visant la rédaction de Charlie Hebdo, des hackers disant appartenir à un groupe de cyber-résistants tunisiens ont piraté les sites Internet de plusieurs entreprises et écoles. Ainsi, les portails suivants ont été mis hors service :

- Mairie de Tulle en Corrèze
- Commune de Seilhac en Corrèze
- Centre de mémoire d'Oradour sur Glane en Haute-Vienne
- Fondation Jacques Chirac à Paris
- Fromagerie basée en Gironde
- Conserverie en Dordogne...

Tous affichaient dimanche les mêmes messages : "Vous êtes racisme (sic)!", "Vous êtes le Teroriste (sic) du monde" ou encore "Je suis muslim (sic) et je suis pas Charlie". Trois drapeaux accompagnaient la page piratée : le français, l'israélien et l'américain.

Le message avait disparu dimanche à la mi-journée mais les sites ont mis plusieurs heures à revenir à la normale. Alors que la mairie de Tulle a indiqué avoir porté plainte, Dominique Rousseau, président de la Communauté d'agglomération de Bergerac (Dordogne) a assuré lui aussi qu'une plainte allait être déposée, se disant "consterné" par cet acte qualifié de "surenchère, d'effet d'aubaine" par rapport aux événements tragiques qui ont précédé.

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Une entrave au travail des enquêteurs ? Si l'action des Anonymous partait d'une bonne intention, elle n'a pas fait l'unanimité en ligne. Plusieurs spécialistes ont regretté ces piratages : "C'est pas en lançant des dénis de service (la méthode employée par Anonymous qui consiste à inonder un site de requêtes pour le mettre hors service, Ndlr), que l'on va régler quoi que ce soit", a réagi le blogueur Olivier Laurelli, spécialisé dans la sécurité en ligne. "À partir du moment où on attaque les réseaux où ils (les djihadistes) communiquent entre eux, on interfère dans le travail des enquêteurs", a ajouté celui que le Web connaît sous le pseudo de "Bluetouff". Depuis samedi et la publication de leur vidéo d'appel à lutter contre les sites djihadistes, le compte @OpCharlieHebdo n'a plus rien publié sur Twitter. Par peur d'interférer avec le travail des autorités ?