Encadrer les avis des consommateurs, une bonne idée ?

Yelp, qui propose des recommandations de lieux, restaurants ou services, recueille chaque mois 102 millions avis d'internautes sur son site et ses applications mobiles.
Yelp, qui propose des recommandations de lieux, restaurants ou services, recueille chaque mois 102 millions avis d'internautes sur son site et ses applications mobiles.
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Johann Mise , modifié à
ZOOM - Une nouvelle norme vise les fausses critiques de consommateurs en ligne. Peut-elle réellement en venir à bout ?

L'INFO. "NF Z74-501". Derrière cette référence barbare se cache une norme qui pourrait bien changer les habitudes des internautes. Élaborée par l'association française de normalisation (AFNOR) depuis 18 mois, cette norme publiée jeudi devrait permettre de lutter contre les faux avis émis sur les sites des voyagistes, de sélection de restaurants ou encore de services. Alléchante sur le papier, cette initiative - non obligatoire - appuyée par plus de 50 portails en ligne s'annonce-t-elle efficace ? Internautes, sites de voyages ou agrégateurs de restaurants, Europe1.fr a interrogé les différents acteurs du dossier.

>> À LIRE : Internet, les faux avis de consommateurs menacés

> Des avis publiés dans l'ordre chronologique. La première condition de cette norme imposera d'afficher tout en haut de la liste de résultats d'une recherche les dernières critiques. "Cette condition nous pose problème", explique Elliot Adams, interrogé par Europe1.fr et responsable de la communication en Europe pour Yelp sur lequel 102 millions d'utilisateurs donnent leur avis chaque mois. Ce site, qui réalise une majeure partie de son trafic via ses applications mobiles (iPhone et Android), permet au gens de noter, détailler et partager leurs impressions sur un restaurant, un musée, un médecin ou tout autre service. "Pour que le résultat d'une recherche soit efficace, ciblé, on a intégré une dimension sociale à Yelp. Par exemple si je recherche un bar près de chez moi, le site va d'abord afficher les avis de mes amis Facebook ou Twitter et ceux de ma famille. Même si cet avis est vieux de six mois, on estime qu'il sera plus pertinent", défend Elliot Adams.

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© Capture d'écran

En revanche, cette étude semble une bonne idée pour Mathias, 28 ans, internaute qui s'est basé sur de nombreux avis en ligne lors de deux voyages récents en Italie et en Thaïlande. "En général, je ne lis que les 10 ou les 15 premiers de la liste. Donc si ces avis correspondent aux derniers publiés, ils seront plus pertinents. Mais comme on peut aussi trier ces avis (par note, par pays ou par localité par exemple, NDLR), finalement ça ne devrait pas changer grand-chose", reconnaît ce voyageur.

> Des conditions d'utilisations plus claires. Tous les portails qui souhaitent adopter la norme vont devoir l'intégrer dans leurs conditions d'utilisation. Problème : sur les 75 sites les plus visités du Web dans le monde, les conditions générales d'utilisation (CGU) sont longues en moyenne de 2.500 mots. Conséquence : "personne ne lit les conditions d'utilisations", explique Anne, une internaute âgée de 27 ans qui a déjà voyagé à trois reprises depuis le début de l'année en se fiant aux avis en ligne. Une fois de plus, l'engagement part d'une bonne intention mais ne devrait rien changer dans les usages des utilisateurs.

> Un véritable internaute derrière chaque avis. "Il faut que l'auteur de l'avis soit contactable par email", détaille à Europe1.fr Olivier Gibert, porte-parole d'AFNOR. Pour quoi faire ? "De telle sorte que si un gestionnaire d'avis veut entrer en contact avec l'auteur d'un avis suspect, celui-ci puisse se justifier." L'objectif est d'éviter la multiplication des faux comptes anonymes qui publient des avis négatifs, noyant ainsi les véritables avis en ligne. "Le problème, c'est que cette norme peut exiger un justificatif à l'internaute, pour prouver qu'il a bien mangé dans tel restaurant ou qu'il a bien dormi dans tel hôtel. Mais pour certains lieux ou service (une randonnée en montagne, un glacier qui n'accepte que les paiements en liquide), impossible d'apporter un justificatif", regrette Elliot Adams, responsable de la communication de Yelp. "On va donc devoir discuter des conditions de la norme avec l'AFNOR", ajoute-t-il.

Pour Mathias, cela risque également de diminuer le nombre d'avis publiés par les internautes : "personnellement, je ne vais pas m'ennuyer à apporter un justificatif à chaque fois que je veux poster un avis", confesse l'internaute.

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© Capture d'écran

Expedia.fr, un site de réservation de voyages, va déjà plus loin : "Les avis en ligne du groupe Expedia (plus de 10 millions) sont à l’heure actuelle déjà vérifiés, puisque seules les personnes ayant effectivement séjourné dans un hôtel réservé via un des sites Expedia reçoivent par mail une demande de commentaire, qui est ensuite publié. Le système utilisé actuellement va donc au-delà des propositions de régulation faites par l'AFNOR", concède un communiqué du portail en ligne.