Villiers-le-Bel : le procès reporté

Le policier encourt une peine de trois ans de prison et 45.000 euros d'amende.
Le policier encourt une peine de trois ans de prison et 45.000 euros d'amende. © Max PPP
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Guillaume Biet avec Charles Carrasco et Marion Sauveur et AFP , modifié à
Le procès du policier jugé pour la mort de deux ados en 2007 a été renvoyé en juin 2013. 

L'affaire avait déclenché deux nuits d'émeutes à Villiers-le-Bel, dans le Val d'Oise. Près de cinq ans après la mort en novembre 2007 de deux adolescents, Moushin et Lakamy tués dans la collision entre leur mini-moto et une voiture de police, le fonctionnaire qui conduisait le véhicule devait être jugé à partir de vendredi devant le tribunal correctionnel de Pontoise.

Franck Viallet, 35 ans, qui se trouvait avec trois autres policiers dans la voiture le soir du drame, avait donc pris place à l'ouverture du procès au premier rang de la 6e chambre du tribunal correctionnel, au côté de son avocat, Me Frédéric Champagne. Habillé d'un polo gris et d'une veste noire, l'homme doit répondre d'"homicides involontaires". Il encourt une peine de trois ans de prison et 45.000 euros d'amende. Plusieurs policiers en civil avaient fait le déplacement pour assister à l'audience, tout comme l'ex-directeur général de la police nationale, Frédéric Péchenard, et le maire démissionnaire de Villiers-le-Bel, Didier Vaillant.

Les juges ont toutefois décidé de renvoyer le procès vendredi, aux 6 et 7 juin 2013, en raison de la mise en examen récente pour "faux témoignage" du prévenu. Le policier est soupçonné d'avoir menti sur la vitesse de son véhicule au moment de la collision en déclarant avoir respecté la limite de 50 km/h, ce qu'un rapport d'expertise a démenti.

Une vitesse de 64 km/h

accident entre une mini moto et une voiture de police à villiers le bel en 2007, 2 jeunes tués MAXPPP 930620

L'enquête sur la collision avait dans un premier temps semblé écarter toute responsabilité des policiers. Une ordonnance de non-lieu avait ainsi été rendue par un juge d'instruction de Pontoise le 23 octobre 2009. Mais la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles avait infirmé cette décision et ordonné un supplément d'information. Franck Viallet avait finalement été renvoyé en correctionnelle en septembre 2011.

Selon un rapport d'expertise, le véhicule de police était en phase d'accélération au moment de l'accident, et roulait à près de 64 km/h - au lieu des 50 km/h autorisés - sans gyrophare ni avertisseur. Néanmoins, la vitesse du véhicule "n'a eu aucune incidence", conclut l'expert qui assure qu'à 40 km/h, les conséquences auraient été identiques.

De leur côté, les deux adolescents circulaient sur une moto qui n'était pas destinée à la route, dépourvue de freins et d'éclairage, avec des pneus lisses et à une vitesse supérieure à la limite autorisée (66 km/h). Par ailleurs, ils ne portaient pas de casque et n'avaient pas respecté une priorité à droite, percutant le véhicule des policiers qui ne pouvaient pas les voir arriver, précise le rapport d'expertise.

"Invraisemblable en matière de gestion de l'ordre public"

Lors des émeutes à Villiers-le-Bel en 2007. 630420

© MAX PPP

La mort de Moushin et Lakamy, le 25 novembre 2007, avait entraîné deux jours de violentes échauffourées entre jeunes et forces de l'ordre à Villiers-le-Bel. Une centaine de policiers avaient été blessés par des tirs d'armes à feu durant cette flambée de violences.

Pour Jean-Pierre Mignard, l'avocat des parties civiles, cette affaire "a été gérée, dès l'origine, de manière tout à fait façon contestable et même choquante". "On décide dans un premier temps de ne rien faire. Résultat, on a des violences invraisemblables où d'ailleurs de nombreux policiers sont blessés. Ce qui est invraisemblable en matière de gestion de l'ordre public", a-t-il déploré sur Europe 1."On a exposé inutilement des policiers pour une mauvaise gestion judiciaire d'une affaire qui n'aurait dû rester qu'un fait divers dramatique, on en a fait des émeutes et on a exposé des policiers à la violence et on a arrêté je ne sais combien de jeunes", a encore regretté l'avocat des parties civiles.

"C'est un gâchis épouvantable" :

Selon l'avocat des parties civiles, l'affaire aurait dû être jugée bien avant. "N'importe quel automobiliste sait très bien que si des faits de cette nature avait concerné un automobiliste qui n'était pas un fonctionnaire de police, dans un endroit qui n'était pas un quartier, il y a longtemps que cette affaire serait jugée", a insisté Jean-Pierre Mignard.