Un parrain de la drogue jugé à distance, une première

La visionférence n'a jamais été utilisée pour faire comparaître un prévenu.
La visionférence n'a jamais été utilisée pour faire comparaître un prévenu. © MAXPPP
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Guillaume Biet avec , modifié à
JUSTICE - Le détenu comparaissait pour un vaste trafic de drogue. Face aux risques d'évasion, la justice a exceptionnellement accepté de le juger par visioconférence.

Une salle d'audience déserte, un box vide, et face au procureur, un écran de télévision. Voilà la scène surréaliste qui s'est déroulée mercredi au tribunal de Beauvais. A l'image, apparaît le prévenu un parrain de la drogue détenu dans une prison toulousaine, à plus de 700 kilomètres de là. Du jamais vu en matière judiciaire : si cette technique a déjà été utilisée dans de nombreuses procédures, pour des auditions d'experts, ou de témoins sous X, la visioconférence n'a jamais eu lieu pour faire comparaître un prévenu.

La salle d'audience, à Beauvais.

© Guillaume Biet

Une évasion à son actif. Une mesure exceptionnelle, en partie due à la personnalité du détenu. Car l'homme qui comparaissait hier, Mohamed Benabdelhak, est présenté comme un baron de la drogue, déjà évadé grâce à un commando qui avait attaqué les gendarmes. Il se dit par ailleurs que le détenu, âgé d'une trentaine d'année, offrirait deux millions d'euros à quiconque le ferait sortir de prison.

Le tribunal a donc accédé à la demande des avocats de faire comparaître à distance M Benabdelhak, par ailleurs sous traitement médical strict. Interrogé par Europe 1, l'un de ses avocats, Me Vigier, déplore toutefois cette procédure. "J'y suis très hostile, mais on l'a demandé car la situation de Mohamed Benabdelhak est fantasmée. On a construit un mythe depuis sa première évasion, et on fait un personnage tel que l'on rend impossible des conditions d'extractions sereines et acceptables pour lui", a expliqué l'avocat.

La vidéo-conférence alourdit les débats. L'audience s'est donc tenue sereinement, sans la présence imposante de gendarmes d'élite dans le box. En revanche, les faibles moyens de la justice font que la visioconférence a alourdi les débats. Problèmes de son, pas assez de micro, autant de lourdeurs qui ont agacé la présidente du tribunal : "déjà que c'est compliqué, si vous n'écoutez pas la question, on va tous être fatigués".