Sans-papiers : la police lassée de faire du chiffre

Les policiers du commissariat de Valence, dans la Drôme, dénoncent la politique du chiffre.
Les policiers du commissariat de Valence, dans la Drôme, dénoncent la politique du chiffre. © MAX PPP
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A-J. C. et Guillaume Biet , modifié à
INFO E1 - A Valence, les policiers dénoncent des quotas d’arrestations de sans-papiers.

Ils expriment leur "écœurement". Des policiers de Valence, dans la Drôme, dénoncent vendredi une politique du chiffre qui conduit leur hiérarchie locale à exiger d’eux qu’ils fassent la chasse aux étrangers en situation irrégulière, selon les informations obtenues par Europe 1. D’après le syndicat Unité SGP Police, des quotas d’interpellations seraient même imposés, le jeudi matin, au commissariat : les policiers reçoivent en effet l’ordre d’interpeller un nombre précis de sans papiers.

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A chaque semaine son objectif. La semaine dernière, il en fallait sept, la semaine précédente dix. La pratique, qui dure depuis plusieurs mois, est dénoncée par le syndicat. Daniel Steward, l’un des délégués Unité SGP Police, raconte au micro d’Europe 1 avoir dû participer à de telles opérations : "à un moment donné, on en avait deux qui étaient assis sur un banc, tous les véhicules se sont arrêtés, on est descendus, on a contrôlé les deux, on les a embarqués. Après on s’est à nouveau déplacés face à la gare et on a fini le travail".

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"Ce n'est que pour faire du chiffre". Le fonctionnaire confie sa "honte" d’avoir participé à ces opérations. "C’est l’écœurement général. Le seul mot qui émane à chaque fois de la bouche des collègues, c’est la rafle, ça nous met extrêmement mal à l’aise", dénonce le policier. "C’est écœurant d’en arriver là, de nous demander à nous de faire de basses besognes, à des fins uniquement statistiques. Ce n’est que pour faire du chiffre", souligne le délégué, qui a 20 ans de service à son actif et assure ne pas être "entré dans la police pour faire cela".

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Le ras-le-bol. Depuis hier, les policiers affichent leur colère sur des tracts, placardés sur les murs du commissariat de Valence. Un ras-le-bol adressé au procureur, au préfet et même au ministre de l’Intérieur Manuel Valls, en déplacement vendredi dans la région. Interrogé sur cette question, ce dernier a estimé qu'"il n'y a pas de politique du chiffre, ni en matière de sécurité, ni en matière de personnes en situation irrégulière, mais il y a des résultats à obtenir".

Les autorités démentent. Dans un communiqué, la préfecture a pour sa part déploré "un tract au contenu et à la formulation inadmissible". "Le préfet de la Drôme dément toute existence d'objectifs chiffrés écrits ou oraux concernant la lutte contre l'immigration clandestine", a indiqué la préfecture De son côté, la direction centrale de la sécurité publique dément catégoriquement toute consigne chiffrée. Elle ajoute que les contrôles incriminés visent un quartier précis de Valence, où la délinquance a poussé les commerçants à signer une pétition pour réclamer plus de sécurité.