Projet de coup d'Etat : qu'est-ce que le mouvement du 14 juillet ?

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M.-A.B. , modifié à
300 personnes qui rêvaient d'un coup d'Etat ont été interpellées pour un contrôle d'identité, mardi, à Paris, en marge du défilé de la fête nationale.

Le "Mouvement du 14 juillet" rêvait d'un grand soir pacifique aux doux accents de 1789. Depuis des semaines, le message prenait de l'ampleur sur les réseaux sociaux, sous formes de textes et vidéos divers. Un appel lancé le 18 juin dernier, émanant de "citoyens libres, en paix, se dirigeant vers un nouveau futur". L'objectif ? Que le peuple prenne le pouvoir le 14 juillet, avec le concours de l'armée. Rendez-vous était donc donné à 10 heures, mardi 14 juillet, place de la Concorde, à l'arrivée du traditionnel défilé des Champs-Elysées. Résultat : à peine 300 personnes rassemblées pour la cause, dont la plupart ont été interpellées pour des contrôles d'identité. Un grand soir aux allures de pétard mouillé.   

>> Que se cache-t-il derrière ce mouvement énigmatique ?

Que combat le "Mouvement du 14 juillet" ? Sur son site, le mouvement explique partir du constat "que nos politiciens agissent en fonction de divers intérêts, sauf ceux du peuple". Ces mêmes politiciens, qu'ils soient "motivés par la corruption ou simplement stupides " seraient responsables de "programmes qui mettent en danger la Nation Française (sic)". Le mouvement expose sa profession de foi faite d'un amalgame de différentes théories complotistes qui fleurissent sur la toile.

Entre autres choses, les attaques terroristes sur le sol français seraient une conséquence de la participation de la France à une "tentative d'hégémonie américaine". La dette publique de l'Etat ne serait qu'une invention "des banquiers", prétexte à un contrôle du peule digne d'une dictature, comme "le droit de la police de tirer à balles réelles sur les manifestants". Le mouvement dénonce aussi le futur traité de libre-échange transatlantique (TAFTA), actuellement en négociation entre l'UE et les Etats-Unis : la porte-ouverte selon lui aux OGM et à Monsanto ainsi qu'à une gendarmerie privatisée et administrée par l'ancien Blackwater, société militaire privée américaine sulfureuse qui a fait ses armes en Irak et en Afghanistan.

Comment compte-t-il prendre le pouvoir ? Afin de sauver le peuple français du joug de la République, le mouvement du 14 juillet, qui apprécie décidément les dates symboliques, a lancé un appel le 18 juin dernier. Un "Conseil national de Transition" (CNT) a ainsi été créé devenant du même coup la "seule autorité légitime de la nation", dixit le mouvement du 14 juillet. "Le CNT est une représentation de l’ensemble des citoyens formé au départ par un groupe de fondateurs. Le nombre de ces membres s’élève à 315 pour le moment, mais le CNT a pour but d’accueillir plus de monde”, explique Myriam Vouters, une des porte-paroles du mouvement, dans les colonnes des Inrocks.

 

Et c'est donc ce CNT que le mouvement comptait installer au pouvoir le 14 juillet dernier. "On se rassemblera place de la Concorde où se terminent les défilés ce jour-là. (...) Les forces militaires auront un choix à faire, et on espère bien qu'elles vont nous rejoindre. Ensuite, on prendra le contrôle des bâtiments stratégiques : Élysée, Matignon, palais du Luxembourg et Assemblée nationale", avait encore précisé la porte-parole, sure de son fait. 

Quel est son leader ? Le crâne dégarni, l'homme, assis à son bureau, arbore un costume austère. Derrière lui, une bibliothèque fournie, rappelle le décorum des photos officielles de quatre des sept présidents de la Ve République, à commencer par le Général de Gaulle. Une posture présidentielle qui ne doit surement rien au hasard. L'homme est l'instigateur du mouvement du 14 juillet. Dans ce nouvel appel du 18 juin, Eric Fiorile, dénonce la "haute trahison" du gouvernement, actée selon lui par la signature du traité de Lisbonne en 2007, malgré le "non" au référendum sur la Constitution pour l'Europe en 2005.

L'homme aurait travaillé dans le milieu de la finance, avant de se reconvertir dans la médecine dite "non conventionnelle". En 1989, Eric Fiorile sort un livre, La Démosophie, devenu un courant de pensée puis un mouvement. Etre "démosophe", cela signifie "signifie que l’on estime que le peuple est assez grand pour se gérer lui-même, sans faire appel à des politiciens corrompus. C’est une sorte de philosophie", rapporte dans les Inrocks un ancien membre de ce mouvement. Problème : énigmatique, le personnage, qui compte ses détracteurs sur Internet, semble tenir bien plus du "gourou" que du simple "philosophe".

"Il est impossible de décrire précisément ce que c’est parce qu’Eric Fiorile maîtrise l’art du flou, afin de pouvoir manipuler à sa guise", prévient encore cet ancien membre revenu de son courant de pensée. Mardi, son coup d'Etat du 14 juillet n'aura finalement trompé personne.