Pirates somaliens : qui sont-ils ?

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Charles Carrasco , modifié à
Six Somaliens sont jugés depuis mardi par la cour d'assises de Paris pour actes de piraterie.

Quelle est la responsabilité de ces pirates dans l'enlèvement de Jean-Yves et Bernadette Delanne ? C'est ce que tentera de déterminer la cour d'assises de Paris lors de ce procès. Le 2 septembre 2008, au large de la Somalie, ils prennent en otage, ces deux skippers expérimentés qui convoyaient leur bateau, "le Carré d'As" de l'Australie vers la France. Les pirates réclament une rançon de deux millions de dollars. Dans la nuit du 15 au 16 septembre, ils sont arrêtés lors d'un assaut des forces spéciales françaises. Un pirate est tué, les six autres arrêtés. Les otages sont libérés.

Pour Europe 1.fr, Kader Bengriba, journaliste français décrypte ce phénomène. Il a réalisé deux documentaires sur le sujet. Le premier, "A l'assaut des pirates" a été diffusé sur Envoyé spécial (France 2) et le second, "Retour au pays des pirates" sur Thalassa (France 3). Grâce à un intermédiaire, il a pu rencontrer ces pirates du Golfe d'Aden, escorté par 8 gardes du corps armés de kalachnikovs.

>> Europe1.fr : Sur le banc des accusés il y a trois pêcheurs, un étudiant, un électricien et un sans emploi. Qui sont vraiment ces pirates ?

Kader Bengriba : Ce sont très souvent d'anciens pêcheurs qui n'arrivent plus à subvenir à leurs besoins. Le Golfe d'Aden est la route maritime entre l'Asie et l'Europe. Chaque jour, ils voient passer des millions de dollars sous leurs yeux et le fond marin est raclé par les grands bateaux de pêche européens. Ces gens-là vivotent grâce à l'aide humanitaire, l'élevage de chameaux mais ils restent dans le dénuement le plus total. Donc forcément, lorsqu'on leur propose quelques centaines de dollars pour attaquer un bateau, ils acceptent. Au début, ils rançonnaient simplement les bateaux. Mais depuis 2007, ils sont passés à la prise d'otage.

>> Parmi les accusés, il y a un mineur. Etes-vous surpris ?

Cela ne m'étonne pas. En Somalie, la notion de mineur est différente. Les chefs de bandes recrutent de la main d'œuvre assez jeune car dès 16 ans, ce sont déjà des hommes. Dans la bande que j'ai rencontrée, sur 120, il y avait au moins une vingtaine de mineurs. C'est du banditisme tout simplement. Ces jeunes, comme les autres pirates, ne répondent à aucune idéologie si ce n'est celle de s'en sortir et de ne pas rester dans la misère.

>> L'avocat des accusés déplorent que ne soient jugées que les "petites mains". Qui tirent les ficelles ? 

Il y a bien sûr des commanditaires qui recrutent des pirates. Ces encadrants restent à quai dans un village, bien gardés par des hommes armés. Il est donc très difficile de les repérer. Du coup, les autorités ou les forces étrangères sur place tombent souvent sur ce qu'on appelle "les petites mains".

>> Quelles sont les solutions pour stopper les actes de piraterie ?

Une chose est sûre : on ne prend pas le problème dans le bons sens. On dépense des millions pour financer des opérations étrangères mais elles n'arrêteront pas les pirates. C'est un puits sans fond. Il faut donner des moyens aux forces de sécurité locales d'intervenir. Je me souviens que lors de mon voyage, les forces étrangères ont remis aux autorités du Pountland (région du nord-est de la Somalie) des pirates et ils ont été emprisonnés. Il faut faire confiance aux autorités même si, comme dans beaucoup de pays pauvres, il y a de la corruption.