Patrick Henry va-t-il recouvrer la liberté ?

patrick henry
Patrick Henry, en 2002. © AFP
  • Copié
et Chloé Triomphe , modifié à
Le célèbre assassin, condamné à la réclusion à perpétuité en 1977, sera fixé jeudi sur sa nouvelle demande de remise en liberté. 

Il a passé près de 40 ans de sa vie derrière les barreaux. En 1977, Patrick Henry a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de Philippe Bertrand, un garçon de sept ans qu’il avait enlevé à la sortie de son école primaire le 30 janvier 1976, à Troyes, dans l’Aube. Jeudi, le tribunal d’application des peines de Melun, en Seine-et-Marne, va se prononcer sur sa dernière demande de libération conditionnelle.

>> mise à jour du jeudi 7 janvier: Le tribunal d'application des peines a accordé au détenu de 62 ans d'entamer dès janvier, avec une première permission de sortie, le parcours de probation qui doit le mener à la liberté conditionnelle en août 2017. Toutefois, deux heures après l'annonce, le parquet de Melun a fait appel, suspendant toute remise en liberté. La cour d'appel a deux mois pour statuer. 

"Du courage" pour libérer l’ex-ennemi public n°1. Celle-ci a été examinée le 8 décembre dernier. A l'issue d'une audience ayant duré trois heures, l'administration pénitentiaire et le parquet se sont opposés à la sortie du détenu n°8588 de la maison centrale de Melun.

"Je pense qu’il faut du courage, parce que libérer Patrick Henry, c’est toujours libérer peut-être celui qui symbolise, un petit peu à son corps défendant, l’abolition de la peine de mort et cette étiquette d’ennemi public numéro 1, qui aujourd’hui est bien loin", avance à Europe 1 Carine Delaby-Faure, l’avocate lilloise qui le défend depuis 2013. Lors d'un procès historique devant la cour d’assises de l’Aube, le jeune homme de 23 ans qu'on surnommait alors "le monstre" avait échappé de justesse à la peine de mort grâce à la plaidoirie mémorable de l'un de ses avocats, Robert Badinter.

De multiples recours. Cette requête est loin d’être la première de Patrick Henry, qui en a formulées de nombreuses depuis son incarcération. En 2007, un tribunal d’application des peines lui a accordé la libération conditionnelle. Mais, celle-ci a finalement été rejetée suite à un appel du parquet. Epuisé par les rejets successifs, le détenu a entamé une grève de la faim en 2011. En vain. En juillet 2014, c’est au tour de François Hollande de refuser sa demande de grâce présidentielle.

Un détenu exemplaire… Avec cette ultime démarche, le détenu espère une nouvelle chance, après avoir raté sa réinsertion lors de la première libération conditionnelle qu’on lui avait accordée. En mai 2001, après 25 ans de détention, l’homme est libéré. A l’époque, Patrick Henry incarne le détenu modèle, un symbole de réinsertion. Au sein de la prison, il pratique la course à pied, passe son brevet des collèges et son bac. Il obtient même "un diplôme supérieur de mathématiques et d’informatique", précise son avocate.  

… Qui échoue en liberté conditionnelle. Mais, en octobre 2002, alors qu’il est libre depuis 16 mois, Patrick Henry se fait attraper sur une route espagnole, près de Valence. Avec à l’intérieur de son véhicule, près de 10 kg de cannabis qu’il s’est procurés à Tanger, au Maroc. "Une grosse bêtise", reconnaît Carine Delaby-Faure qui poursuit : "C’est grave, mais cela peut s’expliquer."

Lors de sa première période d’incarcération, qui a duré 25 ans, Patrick Henry "n’a fait l’objet d’aucun suivi psychologique", assure son avocate qui estime qu’il n’était pas prêt à recouvrer la liberté après une longue peine. "Quand il est sorti, on l’attendait au tournant. La presse était là, il avait écrit un livre, il faisait des interviews et en même temps, il devait donner un faux nom lorsqu’il allait travailler, il devait se cacher", raconte-t-elle.

Patrick Henry a énormément mûri

Retour en détention. Toujours est-il que le délit sonne la révocation de sa liberté conditionnelle et son retour à la case prison. D’autant que le criminel le plus célèbre de France avait déjà dérapé, en juin 2002, dans une affaire de vol à l’étalage. En 2003, le tribunal correctionnel de Caen condamne donc Patrick Henry à quatre ans d'emprisonnement et 20.000 euros d'amende, décision confirmée en appel.

Une préparation psychologique. Aujourd’hui, celui qui est un "homme vieilli", d’après les termes de son avocate, "a énormément mûri". Depuis 2013, surtout, Patrick Henry a entamé en détention une psychothérapie "qui lui a permis de réfléchir à la raison pour laquelle il n’avait pas réussi à se réadapter à la liberté et qui va lui permettre d’avoir des outils pour affronter celle-ci", analyse Carine Delaby-Faure.

Son projet pour l’après. Le sexagénaire aspire désormais à se rendre utile. Il souhaiterait "travailler dans des associations pour mettre sa compétence informatique au service des autres". Avec le service pénitentiaire d’insertion et de probation, le détenu a élaboré un projet. Celui-ci propose qu’il soit libéré sous un régime de semi-liberté. Les week-ends, il séjournerait, grâce à une association, dans un appartement lillois. Durant la semaine,  Patrick Henry dormirait au centre de semi-liberté d’Haubourdin, près de Lille, tout en portant un bracelet électronique.