Pas-de-Calais : un détenu reçoit sa première visite en 38 ans de prison

© ERIC ESTRADE / AFP
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Un détenu de 65 ans incarcéré dans la prison de Bapaume, dans le Pas-de-Calais, a reçu sa première visite le 7 août dernier après 38 ans de détention. 

Il aura passé plus de la moitié de sa vie sans voir personne hormis ses codétenus et le personnel de la prison. Michel, 65 ans, est incarcéré depuis 38 ans à la prison de Bapaume, dans le Pas-de-Calais. Pour la première fois depuis son entrée dans ce centre de détention, il a reçu une visite le 7 août dernier, brisant des décennies de solitude : celle d'un ancien compagnon de cellule, avec qui il a vécu sept ans entre 2008 et 2015. L'histoire, rapportée par le quotidien régional La Voix du Nord, a de quoi interpeller. Elle souligne en tout cas la solidarité et la forte amitié qui unit Michel, toujours derrière les barreaux, et Benoît*, son ancien compagnon de galère. A sa sortie de prison, ce dernier avait en effet promis de retourner voir Michel pour mettre fin à tant d'années de solitude. 

"C'est le faire mourir à petit feu." Cité par le journal nordiste, Benoît explique que Michel a pourtant une famille : "Il avait ses garçons au téléphone de temps en temps mais c’est fini, ils ne sont jamais venus le voir, assure-il à nos confrères. (…). Sa famille, c’était moi et quelques codétenus". Un parcours familial chaotique qui a poussé Michel à se refermer sur lui-même. "Il était démoralisé", complète Benoît, touché par le destin de son ami qui doit encore purger dix années de prison avant de recouvrer la liberté. Une liberté toute relative, comme le souligne Benoît, qui résume sans détour : "En gros, ce sera pour aller en maison de retraite ! C'est le faire mourir à petit feu, on ne peut pas laisser quelqu'un comme ça." 

Vieillesse et solitude derrière les barreaux. Car derrière les barreaux, Michel n'a guère trouvé qu'ennui et routine pour occuper une vie bien réglée mais néfaste à sa santé fragile. Benoît décrit des journées rythmées par la cigarette, le café et la télé. "Ses loisirs, c’est sa cigarette. Sa vie est foutue. Il mangeait peu, il pesait à peine 50 kilos quand je suis sorti. Cela me dépasse de laisser mourir quelqu’un comme ça. Ce qu’il vit est plus dur que la peine de mort. Il aurait moins souffert." Selon une étude de l'administration pénitentiaire parue en 2014, les plus de 60 ans représentent une part toujours plus grande des détenus en France. Ils étaient 1%en 1980, contre 3,5% aujourd'hui.   

 

* Le prénom a été changé