Les Sages retirent la nationalité française à un djihadiste

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Chloé Pilorget-Rezzouk avec AFP , modifié à
Naturalisé en 2003, le djihadiste Ahmed Sahnouni s’est vu retirer sa nationalité française par un décret, en mai dernier. Le Conseil constitutionnel a validé cette déchéance de nationalité, vendredi.

L'info. Naturalisé en 2003, le djihadiste Ahmed Sahnouni s’était vu retirer sa nationalité française, par un décret, en mai dernier. Le Conseil constitutionnel a validé, vendredi matin, la déchéance de nationalité de ce Franco-marocain, condamné en 2013 pour terrorisme.

Le Conseil constitutionnel a jugé "conformes à la Constitution" les deux dispositions du code civil contestées par l'avocat d'Ahmed Sahnouni, qui avait déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

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Une décision très attendue par le gouvernement. La décision des Sages était très attendue par le gouvernement, qui entend utiliser cette mesure dans l'éventail des outils de lutte contre le terrorisme, comme l'a rappelé, mercredi, le Premier ministre Manuel Valls : "Une question légitime se pose sur les conséquences auxquelles on s'expose quand on décide de s'en prendre à la Nation à laquelle on appartient, soit parce qu'on y est né, soit parce qu'elle vous a accueilli".

Qui est Ahmed Sahnouni ? L'homme a été condamné en mars 2013 à sept ans de prison pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". La justice lui reprochait d'avoir organisé une filière de recrutement au djihad vers l'Irak, l'Afghanistan, la Somalie et dans la zone sahélo-saharienne. Né à Casablanca en 1970 et naturalisé français en février 2003, Ahmed Sahnouni s'est vu retirer la nationalité française le 28 mai 2014 par un décret signé par Manuel Valls et le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve.

Une mesure prévue par le code civil. Cette mesure est prévue par deux dispositions de l'article 25 du code civil pour les personnes ayant acquis la nationalité française et condamnées notamment pour "un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme". Elle est cependant interdite pour les personnes dont elle aurait pour effet de les rendre apatrides.

"Existe-t-il des Français plus français que d’autres ?" Devant le Conseil présidé par l'ancien Premier ministre Lionel Jospin, l'avocat d'Ahmed Sahnouni, Nurettin Meseci avait plaidé, le 13 janvier, la "rupture d'égalité" entre Français de naissance et Français naturalisés introduite, selon lui, par ce texte. "Existe-t-il des Français plus français que d'autres?", avait lancé l'avocat. "Si le législateur imagine que la lutte contre le terrorisme passe par la déchéance de la nationalité, il se trompe, c'est un mauvais chiffon agité devant l'opinion publique", avait-il aussi estimé.

Un principe d’égalité préservé selon le Conseil. Dans leur décision, les Sages relèvent, comme ils l'avaient déjà fait en 1996 dans un autre dossier, "que les personnes ayant acquis la nationalité française et celles auxquelles la nationalité française a été attribuée à leur naissance sont dans la même situation, mais que la différence de traitement instituée dans le but de la lutte contre le terrorisme ne viole pas le principe d'égalité".

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"D'autre part, eu égard à cette gravité toute particulière que revêtent par nature les actes de terrorisme, le Conseil a jugé que les dispositions contestées instituent une sanction ayant le caractère d'une punition qui n'est pas manifestement hors de proportion avec la gravité de ces actes et qui ne méconnaît pas les exigences de l'article 8 de la déclaration de 1789" sur l'obligation de la loi d'établir "des peines strictement et évidemment nécessaires", indiquent les Sages dans un communiqué.

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Toutefois, pour être définitive, cette décision doit à présent être validée par le Conseil d'Etat.