Crimes contre l'humanité en Syrie : ce que l'on sait de l'enquête française

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Un portrait de Bachar al-Assad dans les rue de Damas, en mars 2015 © AFP
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Pierre de Cossette et M.-A.B. , modifié à
Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire contre X pour crimes contre l'humanité portant sur des exactions imputées au régime de Bachar al-Assad.
INFO EUROPE 1

Alors même que ces Rafale et Mirage y ont étendu leurs frappes contre l'organisation djihadiste de l'Etat islamique (EI), la France a ouvert un second front en Syrie. Un combat sur le terrain judiciaire, cette fois. Le parquet de Paris a ouvert mi-septembre une enquête préliminaire contre X pour crimes contre l’humanité. Des investigations qui visent des exactions présumément perpétrés par le régime syrien de Bachar al-Assad, selon les informations exclusives d'Europe 1. Que sait-on de cette enquête ? 

• Sur quelle base cette enquête a-t-elle été lancée ? Tout part du ministère des Affaires étrangères. Le 10 septembre dernier, le Quai d'Orsay a effectué un signalement au procureur de la République de Paris, sur la base de l'article 40 du Code de procédure pénale. Ce texte dispose que tout fonctionnaire ou administration qui, dans l’exercice de ses fonctions, a connaissance d'un délit ou d'un crime, est tenu de le signaler à la justice. Et cela fonctionne aussi pour les crimes contre l'humanité.

Les équipes du ministre Laurent Fabius ont transmis au parquet un dossier contenant des éléments sur les pratiques présumées du régime syrien et du président Bachar al-Assad. "Face à ces crimes qui heurtent la conscience humaine, à cette bureaucratie de l'horreur, face à cette négation des valeurs d'humanité, il est de notre responsabilité d'agir contre l'impunité de ces assassins", a affirmé le chef de la diplomatie française depuis New York où il se trouvait pour l'Assemblée générale des Nations Unies, juste après que l'ouverture de cette enquête préliminaire a été dévoilée par Europe 1.

• Quels sont les faits visés ? Le dossier du Quai d'Orsay et ainsi l'enquête préliminaire portent, selon les informations d'Europe 1, sur des faits relatés dans ce que l'on appelle "le rapport César". Le pseudonyme de "César" cache en fait un ancien officier syrien, photographe légiste du régime baasiste, chargé de capturer et d’identifier les dépouilles des opposants exécutés. L'homme a fui la Syrie en juillet 2013  en exfiltrant 55.000 de ses clichés de l'horreur, représentants 11.000 victimes. Parmi ces tirages exfiltrés, des photographies de cadavres prises dans un hangar de hôpital militaire de Damas. Mais aussi les corps, mutilés par la torture, d'hommes considérés comme des opposants à Bachar al-Assad et faits prisonniers.

"César" a été entendu par trois anciens procureur de tribunaux spéciaux ayant enquêté sur des crimes de guerre en Sierra Leone et en ex-Yougoslavie. Des auditions qui ont abouti à un rapport d'une trentaine de pages, jugeant son récit crédible et "extrêmement convaincant" et attestant de l'authenticité des photos après expertise.

• Que cherche les justice ? La justice cherche désormais à déterminer si il y a parmi ces victimes un Français ou un franco-syrien. C'est la condition qui pourra permettre à la France de continuer ses investigations et peut-être juger un jour Bachar al-Assad. Les gendarmes de l'office central de lutte contre les crimes contre l'humanité, les génocides et les crimes de guerre (OCLCHGCG) et de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN), cherchent donc à la loupe les photos signées "César". Le procès est donc loin. Mais si cette enquête préliminaire est ouverte contre X, celui-ci est tout désigné.