Brétigny-sur-Orge : après l'accident, les agents s'inquiètent encore

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Une photo diffusée par la SNCF montre l'éclisse défectueuse, une barre métallique qui joint deux rails, à l'origine de l'accident en juillet 2013. © SNCF / AFP
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Chloé Triomphe et T.M. , modifié à
Europe 1 a eu accès au contenu des 500 pages d'écoutes téléphoniques demandées par les juges après l'accident. Les agents s'inquiètent toujours de l'état du réseau.
INFO EUROPE 1

Les éléments accablants s'accumulent contre la SNCF dans l'enquête sur l'accident de train de Brétigny-sur-Orge, qui avait fait sept morts et des dizaines de blessés en juillet 2013. Europe 1 a eu accès au contenu des 500 pages d'écoutes téléphoniques demandées par les juges sur quatre cadres de la SNCF après le drame. Elles révèlent une situation catastrophique sur le terrain, avec du matériel usé et une maintenance défaillante. Les agents sont loin d'être rassurés sur l'état du réseau.

"Le matériel est en fin de vie""Cette traversée-jonction, elle est pourrie", disent-ils. "Elles sont toutes pourries à Brétigny, sauf les deux qui ont été remplacées." "Le matériel est en fin de vie, il y a des incidents tout le temps", peut-on aussi lire dans ce compte-rendu. Les deux responsables techniques concluent : "On dort pas bien".

Panique et menaces après l'accident. Lorsqu'une visite de presse est planifiée plusieurs mois après le drame pour montrer le programme de maintenance Vigirail, annoncé par la direction, la panique se fait alors ressentir. "Ah ouais, non, c'est pas une bonne idée. Le wagon-rail, on a abandonné, on est en sous-effectif. Vous n'avez qu'à amener des journalistes à Brétigny, vous allez voir ce qui va se passer." Cette réflexion en dit long sur la réalité de la maintenance post-accident promise.

Pas un cas isolé. Ce que révèlent aussi ces écoutes, c'est que Brétigny-sur-Orge est loin d'être un cas isolé. "Depuis l'accident, faut voir ce qu'on découvre", précise un responsable. Et on apprend alors que les agents s'inquiètent pour d'autres lieux en Ile-de-France - Noisy et Juvisy sont cités - mais aussi en région. A Valence, par exemple, les deux responsables techniques évoquent une fissure sur les rails en pleine gare : "un joint complètement 'destroy' que la surveillance n'avait pas décelé", disent-ils, avec ce commentaire alarmiste : "Vu l'état du joint, ça peut pas rester comme ça". Pragmatique, le salarié de la SNCF conclut : "Faut pas attendre que ça déraille".

La SNCF dénonce un "jugement subjectif". "La maintenance est un processus complexe qui fait appel à des opérations à long et court termes", a réagi l'avocat de la SNCF, Emmanuel Marsigny. "Il faut avoir une vision globale. Après Brétigny, la perception qu'ont pu avoir certains agents de certaines choses qui sont courantes mais qui ne sont absolument pas accidentogènes, ni de nature à mettre en risque les voyageurs, ressort dans la presse et n'est qu'un jugement subjectif. La réalité, c'est que la SNCF fait son travail. Il peut toujours y avoir de temps à autre des choses à améliorer. C'est la raison pour laquelle la SNCF cherche depuis le début à savoir précisément ce qui s'est passé à Brétigny. D'abord pour les victimes, mais aussi pour comprendre et en tirer les conséquences."

Lundi, Le Figaro affirmait que la SNCF a tenté d'atténuer sa responsabilité en dissimulant des pièces importantes du dossier.