Agnès : condamné, Matthieu fait appel

Les jurés sont allés au delà des réquisitions du procureur et ont condamné Matthieu à la perpétuité sans peine de sûreté.
Les jurés sont allés au delà des réquisitions du procureur et ont condamné Matthieu à la perpétuité sans peine de sûreté. © Groupe de soutien Facebook
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et avec AFP , modifié à
Le jeune homme a été condamné vendredi soir à la prison à perpétuité pour viol et le meurtre d'Agnès.

Le verdict. Onze jours après le début du procès de Matthieu, le verdict est tombé. Le jeune homme de 19 ans a été condamné vendredi à la réclusion criminelle à perpétuité pour le viol et l'assassinat en 2011 d'Agnès, 13 ans. Une condamnation supérieure aux réquisitions de l'avocate générale qui avait demandé une peine de trente ans de réclusion criminelle avec injonction de soins "sans limitation de durée", ainsi que la rétention de sûreté en fin de peine "si cela s'avère nécessaire". Fait inédit, il s'agit de la première condamnation à perpétuité d'un mineur au moment des faits depuis la condamnation de Patrick Dils le 27 janvier 1989 pour un double meurtre. Les avocates de Matthieu ont annoncé samedi leur décision de faire appel du verdict.

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Matthieu comparaissait depuis le 17 juin devant les assises de Haute-Loire pour l'assassinat et le viol d'Agnès, la collégienne de 13 ans retrouvée calcinée en novembre 2011 au Chambon-sur-Lignon. Il était également jugé pour le viol, un an plus tôt, d'une mineure dans le Gard. Ce drame avait suscité un profond émoi en France et déclenché une vive polémique sur l'évaluation de la dangerosité et le suivi judiciaire des délinquants sexuels.

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Une personnalité ultra-dangereuse. L'avocate générale, jugeant Matthieu pleinement responsable de ses actes, s'est montrée pessimiste sur les chances "d'amélioration" de la personnalité du jeune homme et a estimé nécessaire d'éviter "de nouveaux drames". L'avocate générale avait aussi qualifié la personnalité de Matthieu d'"ultra dangereuse" lors de son réquisitoire, estimant que le jeune homme était responsable de ses actes, se montrant pessimiste sur ses chances "d'amélioration". Elle a donc demandé dans son réquisitoire que soit écartée l'excuse de minorité, qui limite la peine encourue à vingt ans de réclusion criminelle. Mais elle n'est pas allée jusqu'à requérir la perpétuité, une sanction rarissime pour des mineurs, mais pour laquelle les jurés ont opté.

Les avocates font appel. Les avocates de Matthieu ont annoncé samedi leur décision de faire appel du verdict. "Les avocats de la défense, Me Isabelle Mimran et Me Joëlle Diez, font appel de la décision rendue hier (vendredi) par la cour d'assises des mineurs du Puy-en-Velay à l'encontre de Matthieu, s'agissant de la peine la plus lourde pouvant être prononcée et l'excuse de minorité ayant été levée", ont-elles annoncé dans un communiqué.

Son corps retrouvé carbonisé en forêt. La victime et son meurtrier présumé étaient tous deux internes au collège-lycée Cévenol, un établissement privé select du Chambon-sur-Lignon. Agnès, parisienne et élève de troisième, disparait le 16 novembre 2011, après une après-midi libre. D'importantes recherches sont alors organisées. Matthieu, alors âgé de 16 ans, élève de première, y participe. Mais très vite les soupçons se portent sur ce garçon, griffé au visage.

Placé en garde à vue le 17 novembre 2011, ce "mineur très froid et sans émotion", selon le parquet, dirige le lendemain soir les enquêteurs vers un ravin d'une forêt des environs. Ils retrouvent le corps carbonisé d'Agnès. Matthieu reconnait alors avoir attiré la jeune fille dans la forêt sous prétexte de chercher des champignons hallucinogènes. Outre les violences sexuelles, l'autopsie révèle qu'Agnès a reçu dix-sept coups de couteau dans le thorax et à la tête. Son ADN est également isolé dans une tache de sang sur le jean porté par Matthieu ce jour-là.

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Matthieu, sous contrôle judiciaire strict. Matthieu avait intégré l'internat un an plus tôt. Cette arrivée s'inscrivait dans le cadre d'un contrôle judiciaire strict. Le jeune homme sortait alors de quatre mois de détention provisoire pour le viol sous la menace d'une arme d'une amie d'enfance de 16 ans, dans le Gard. Mis en examen à Nîmes, le 2 août 2010, il avait été remis en liberté par le juge des libertés "sur réquisitions conformes" du parquet. Suivi par la Protection Judiciaire de la Jeunesse du Gard (PJJ), Matthieu était notamment astreint à un "suivi psychiatrique ou psychologique" afin de prévenir tout risque de récidive".

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A compter de février 2010 il avait rencontré à douze reprises un psychothérapeute indépendant dans les locaux du collège. A l'époque, le directeur du collège-lycée Cévenol, Philippe Bauwens, savait qu'il avait des antécédents mais n'avait pas "connaissance du passé judiciaire" de Matthieu. Pour Me Francis Szpiner, l'avocat de la famille Marin, il y a eu un "dysfonctionnement de l'institution judiciaire" et le sentiment de cette famille est que si la justice n'avait pas libéré une première fois l'accusé, il serait en prison et leur fille vivante.

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