"Les animaux n’ont plus rien à manger"

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avec François Coulon , modifié à
TEMOIGNAGE - Les éleveurs vont devoir emmener leurs bêtes à l’abattoir, faute à la sécheresse.

La sécheresse sévit depuis plusieurs mois sur l’Europe. En France, le mois d’avril a été l’un des plus secs depuis 1959. Les premiers à subir les conséquences de cette aridité sont les agriculteurs. Pour les récoltes, le rattrapage est encore possible. Même si les paysans expliquent gérer "à la petite semaine" et que ce n'est pas possible d'avoir "une vision d'avenir".

En revanche, pour la nourriture des élevages, c’est beaucoup plus problématique. Les champs sont secs et jaunis par le soleil. D’autant plus qu’une vingtaine de départements ont, d’ores et déjà, pris des mesures de restriction pour l’usage de l’eau. Résultat : les éleveurs sont contraints de piocher dans les réserves prévues pour l’hiver. Mais cela ne suffit pas.

"Les animaux n’ont plus rien à manger : il n’y a plus rien à manger dans les champs et bientôt plus rien dans le silo", résume au micro d’Europe 1 Philippe Varacher, éleveur en Charente de vaches Prim'Holstein, Brunes des Alpes et Montbéliardes. "Les terres sont sèches comme un 14-juillet", assure-t-il avant de prévoir que c’est "une catastrophe qui arrive". Il craint "revivre le même cauchemar" qu’en 1976, année record en terme de sécheresse.

La seule solution qu’il a trouvée est de "faire tuer ses animaux" :

"J’en suis là. On en est tous là", assure Philippe Varacher en faisant allusion à ses collègues éleveurs et analysant la situation "comme un père qui tue ses enfants". L’éleveur assure ne pas avoir "les moyens de racheter de la nourriture" et, ajoute-t-il, "un troupeau qui hurle à la faim, c’est insupportable".

"Une vingtaine de bêtes vont déjà partir, la semaine prochaine", direction l’abattoir. Ce qui fait un cinquième de son troupeau Pour Philippe Varacher, c’est un acte difficile. "On va faire tuer le cœur du cheptel. Pour le remonter, il faudra 20 ans", explique-t-il.

Et si l'aide venait des céréaliers ?

Les éleveurs lancent un appel au secours, en particulier en Poitou-Charentes, région extrêmement touchée par la sécheresse. Pour les aider, ils demandent exceptionnellement à leurs collègues céréaliers de garder la paille, après la moisson. D'habitude, la tige de blé est broyée sur les parcelles.

Les céréaliers de la région disent comprendre le problème. Mais ils craignent "une baisse des matières organiques", à l'image de Philippe Tabarin, qui s'est exprimé au micro d'Europe 1. Pour autant, "on ne peut pas laisser mourir les éleveurs", juge-t-il.

La question devrait être abordé mercredi après-midi, avec la visite dans la Vienne du ministre de l'Agriculture. La solution envisagée par les paysans serait un échange de la paille des cultivateurs contre le fumier des éleveurs.