Gattaz prône le licenciement sans justification

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Olivier Samain et Noémi Marois , modifié à
EMPLOI - Le président du Medef propose que les employeurs n'aient plus à avancer des motifs aux licenciements de ses salariés.

Pierre Gattaz prend l'habitude des sorties fracassantes. Après sa proposition de Smic intermédiaire en avril, voilà qu'il exprime le souhait que les employeurs n'aient plus à justifier les licenciements. C'est ce qu'il explique dans une interview donnée à L'Opinion vendredi. 

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Ce que Pierre Gattaz a dit. Le président du Medef n'y va pas par quatre chemins : "il faut sortir de la convention 158 de l'organisation internationale du travail qui nous oblige à justifier les motifs de licenciements". Pointant du doigt la complexité de la législation du travail, il explique que "tant qu'on aura cette contrainte supranationale, peu importe le contrat, le fond du problème ne sera pas traité". 

La France a signé cette convention en 1982, "très peu de pays l'ont ratifié, l'Allemagne ne l'a pas fait", précise Pierre Gattaz.

Avancer un motif "valable". La convention 158 oblige l'employeur à justifier le licenciement pour un motif "valable". En droit français, cela signifie qu'il doit avancer une "cause réelle et sérieuse". 

C'est une remise en cause d'un principe fondamental que Pierre Gattaz propose, selon Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit du travail à Paris-Sorbonne. "Il m'apparaît comme inapproprié de ne pas donner à un collaborateur la raison de son licenciement", déclare-t-il à Europe 1. "Lors d'un entretien préalable, il doit énoncer le motif du licenciement qu'on discute et après, il doit notifier ce motif par lettre recommandée envoyée au domicile du salarié. Et c'est sur base de cette lettre que l'employé pourra saisir le tribunal des prudhommes", détaille l'expert.

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"Retour au Moyen-Âge". "C'est une sortie scandaleuse", pour Véronique Descacq, numéro 2 de la CFDT. "Après s'en être pris au Code du travail français, Pierre Gattaz nous explique que les règles internationales qui protègent des milliards de salariés dans le monde doivent aussi disparaître". 

L'obligation d'un employeur d'avancer le motif du licenciement "permet à un salarié de se défendre devant les tribunaux", explique-t-elle. "Supprimer ce droit élémentaire, c'est revenir à une époque où les salariés étaient taillables et corvéables à merci, au Moyen-Âge probablement", déplore-t-elle. Pour la syndicaliste, c'est "le manque de perspective et d'activité" qui freine l'embauche et aucunement l'obligation de justifier un licenciement. 

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