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Chaque matin, Roland Pérez évoque une question de droit en rapport avec l'actualité dans Europe 1 Bonjour.

Ce lundi, les débats de la cour d’Assises du Puy en Velay, qui rejuge en appel la maman de la petite Fiona et son ex compagnon, ont pris une singulière tournure car les avocats de Cecile Bourgeon ont soudainement demandé le renvoi du procès pour cause d’apéritif.

Au sortir d’une des audiences de la cour d’Assises la semaine dernière, le président aurait pris un verre avec les avocats, générant ainsi une certaine suspicion.

À la reprise des audiences de la cour d’Assises de la Haute-Loire, les avocats de la maman de Fiona, dont le corps n’a toujours pas été retrouvé et dont les circonstances de sa mort n’ont toujours pas été élucidées, ont demandé le renvoi pour défaut de partialité du président ?

Les avocats de Cécile Bourgeon ont longtemps hésité entre récusation du seul président de la cour ou renvoi de l’affaire devant une autre cour d’Assises, en raison d’un apéritif qu’auraient partagé les avocats des prévenus et des parties civiles à la sortie d’une des audiences de la semaine précédente.

C’est donc interdit ? Les avocats et les magistrats ne peuvent pas autour d’un verre se retrouver après une audience ?

En fait, l’impartialité constitue l’un des éléments majeurs du droit à un procès équitable. D’ailleurs tout juge qui a des liens avec une partie, pouvant le rendre impartial, peut demander à être remplacé, ce qui n’est pas le cas dans l’affaire Fiona. Ici le juge a reconnu avoir pris un verre avec l’ensemble des avocats et pas seulement ceux de la partie civile, même si les avocats de la défense prétendent y avoir participé justement pour constater un éventuelle impartialité.

Y a-t-il eu un renvoi de l’affaire à cause de cet apéritif ?

En fait, l’avocat de la maman a plaidé le renvoi plutôt que la procédure vexatoire de récusation du président dont la loyauté et l’impartialité, a-t-il clamé, ne peuvent être remis en cause. Mais selon lui tout de même, le procès ne pouvait plus se tenir au grand dam de l’avocat général et des parties civiles qui ont invoqués la énième manœuvre d’une défense aux abois. Résultat, le renvoi a été refusé.

Que dit la loi sur la récusation possible des juges dans une affaire ?

Une amitié ou inimitié notoire entre un juge et une partie peut conduire à une récusation du juge. Mais une décision rendue il y a tout juste un an de la cour de Cassation s’est justement interrogée, à l’heure des réseaux sociaux, sur les liens issus de ces relations virtuelles pouvant conduire à une possible partialité des juges. La réponse de la cour Suprême a été très claire en jugeant que le terme "ami", employé dans le langage des réseaux sociaux, ne renvoie pas à des relations d’amitiés au sens traditionnel du terme et ne caractérise pas, une quelconque partialité .

Un déjeuner ou un verre entre magistrats et avocats ne suffit donc pas à permettre une récusation ?

Ces casse figures se sont déjà présentés en justice et la récusation rejetée car le risque de partialité a été écarté. Il faut vraiment, comme le prévoit la loi, des conflits d’intérêts ou des liens familiaux entre les protagonistes.
En tout état de cause, on imagine que la plupart du temps les magistrats sont prudents, même si dans les villes de province, les avocats et les magistrats se connaissent forcement mieux.