Le chef d’œuvre de l’été 1677 : le "Te Deum" de Lully

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Pendant l'été, chaque week-end, Laure Dautriche vous raconte l'histoire d'un chef-d'œuvre qui a été créé pendant un été. Ce samedi, le "Te Deum" de Lully.

"Les chefs-d'oeuvre de l'été" : Laure Dautriche, aujourd'hui, vous nous racontez l'histoire du Te Deum de Lully, l'un des musiciens de Louis XIV à Versailles. Une oeuvre composée pendant l'été 1677.

Oui, en cet été 1677, Jean-Baptiste Lully est le maître absolu de la musique à Versailles. Voilà plus de 20 ans que Lully travaille auprès du roi Soleil comme surintendant de la musique du Roi, en lui proposant les oeuvres les plus  somptueuses.

Rien ne lui résiste. Il enchaîne les succès, dévoré d'ambition, il glorifie en musique le règne de Louis XIV. Il s'est tellement adapté au goût français qu'on en oublierait presque qu'il est Italien, venu de Florence à l'âge de 14 ans.

En cet été 1677 donc, il compose un Te Deum qui va marquer l'Histoire. Cette oeuvre sacrée, il l'écrit pour le baptême de son premier enfant et le parrain n'est autre que Louis XIV en personne.

La musique est à la hauteur de l'événement : une architecture colossale, un effectif de musiciens imposant, sans oublier les trompettes et les timbales.

Lully écrit son Te Deum en quelques semaines en cet été 1677. Et la création a lieu à Fontainebleau.

Oui, et elle va marquer les esprits pour longtemps. On va l'utiliser pour des mariages, des victoires militaires. Dès que Lully écrit quelque chose, cette musique devient à la mode.

Mais surtout c'est cette musique qui va lui coûter la vie. Si vous avez vu "Le roi danse" avec Benoît Magimel, film sorti il y a une vingtaine d'années, vous vous souvenez peut-être qu'à la fin de sa vie, Lully se perce le pied avec le bout de sa canne. Deux mois plus tard, il mourra de la gangrène. Et c'est ce Te Deum qu'il est en train de faire jouer à ce moment-là. 10 ans après l'avoir créé.

Pour quelle raison Lully fait-il à nouveau jouer cette oeuvre ?

Pour célébrer la guérison du roi qui a été affaibli pendant quelques mois ! On est alors en 1687. Lully fait donc jouer son Te Deum en grandes pompes dans une église parisienne. Lully veut que son oeuvre apparaisse comme la plus brillante. Car bien sûr, au même moment, certains de ses collègues compositeurs (ou plutôt ses rivaux!) ont eux aussi composé leur Te Deum pour saluer la guérison du Roi. Non, pense Lully, c'est sa musique qui doit être la plus éblouissante !

Ce jour-là, est-il impatient ? Ou emporté par le zèle ? Lully bat la mesure en donnant des coups avec sa canne sur le sol.  Et dans la chaleur de l’action, il se donne un coup violent sur le pied.

La blessure n'est pas banale. Pour les médecins sont unanimes, il faut lui couper le doigt du pied... Lully, qui a été un brillant danseur, refuse. La blessure s'aggrave, c'est la gangrène.

Lully meurt donc 2 mois après avoir fait jouer pour la dernière fois son Te Deum, mais la réputation de cette oeuvre perdurera de nombreuses années, puisque elle reste l’une des oeuvres religieuses les plus jouées de la fin du XVIIe siècle.