Les enfants des quartiers défavorisés arrivent-ils plus souvent le ventre vide à l’école ?

2:41
  • Copié

Olivier Veran affirme que les enfants des quartiers défavorisés arrivent plus souvent le ventre vide à l’école.

Vrai-Faux : La République en Marche en campagne pour le Petit Déjeuner.

C’est l’une des mesures phares d’un rapport remis à la ministre de la Santé pour lutter contre la pauvreté…  Distribuer gratuitement des petits déjeuner dans les zones d’éducation prioritaires, et dans quelques zones très rurales… Pour le député de la République en Marche Olivier Veran, c‘est là que commencent les inégalités.

“On sait qu’il y a un risque beaucoup plus important pour que les enfants arrivent le ventre vide à l’école lorsqu’ils sont issus des quartiers populaires.”

Les enfants des quartiers défavorisés arrivent plus souvent le ventre vide à l’école. Vrai ou Faux ?

On n’en sait rien du tout. Les seules études conduites étaient beaucoup trop légères : l'une auprès de 600 enfants de CM2 il y a quatre ans, et une autre du Credoc en 2015 : elle s’est contentée d’interroger par téléphone 500 maîtresses qui ont livré leur sentiment, elles avaient l’impression, que trois enfants en moyenne arrivaient le ventre vide dans leur classe. La centaine exerçant en zone prioritaire a parlé de 4, 5 enfants…  Impossible d’en tirer la moindre conclusion.  Nous avons demandé à Olivier Veran d'où venait sa certitude : il a cité d'autres études menées en Grande-Bretagne avant que la distribution de petits déjeuner dans les quartiers pauvres, justement, soient mise en place dans les années 90’s. Seulement ces études ont en réalité montré que les enfants modestes avaient des repas moins diversifiés, pas qu'ils mangeaient moins. C'est surtout pour soulager les parents qui devaient partir tôt au travail que les Breakfast Clubs, en Grande-Bretagne, ont été créés.

En revanche, et c’est là que la démarche est intéressante : les résultats de ce programme britannique, qui est en place maintenant dans presque toutes les écoles, ont été très positifs. Les enfants sont plus concentrés, apprennent mieux, et si le petit déjeuner est sain, donc lait, fruits, céréales, ils semblent obtenir de meilleurs résultats, en math ou en lecture.

Donc un petit déjeuner gratuit dans les quartiers défavorisés semble une bonne idée.

Cela part évidemment d'un bon sentiment, mais la pauvreté en France déborde largement les quartiers d’éducation prioritaires. On a compilé les tableaux de bord de l’éducation nationale, dans chaque académie :  2,131 millions d'écoliers aujourd’hui, appartiennent aux classes dites "défavorisées", selon le ministère. Un tiers seulement sont scolarisés en zone prioritaire : la mesure va donc laisser de côté 1,5 million  d’enfants défavorisés.

Et puis le ciblage sur ces quartiers est un peu stigmatisant pour les parents,  qui ne nourrissent pas forcément moins leurs enfants le matin. L’enquête la plus solide sur les habitudes alimentaires des français, de l'agence nationale de sécurité sanitaire, montre que 16% des enfants (de tous milieux) ne prennent pas un petit déjeuner tous les jours. Et les raisons pointées sont d'abord sociétales : on se lève tard, les enfants grignotent davantage, n’ont « pas envie » de manger…  Une campagne nationale aurait vraiment du sens, mais elle coûterait plus cher que les 10-15 millions qu’envisage le gouvernement pour l'instant.