10.000 places de prison vont-elles résoudre le problème de surpopulation carcérale ?

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Manuel Valls affirme qu'en construisant 10.000 places de prison, on va résoudre le problème de surpopulation carcérale.

Géraldine Woessner pour le Vrai faux de l'info

Le Premier ministre, Manuel Valls, a fermement défendu son bilan hier sur Europe 1, en affirmant qu’il avait pris à bras le corps les problèmes de sécurité. L’autorité de l’État, c’est lui qui l’incarne dit-il, et il promet dans quelque jour de présenter un nouveau plan :

"On sait qu’il faudra sur les 10 ans qui viennent créer sans doute 10.000 places de prison pour permettre la création de cellules individuelles".

10.000 places de prison sur 10 ans permettront de créer des cellules individuelles, c’est vrai ou c’est faux ?

C’est faux, car même si elles étaient construites aujourd’hui ces places, elles ne résoudraient même pas le problème de surpopulation carcérale. Au 1er août, il y avait 68.819 détenus en prison, pour 58.507 places opérationnelles, et 1.515 détenus dormaient par terre, sur des matelas. Donc pour que chacun ait, non pas sa cellule, mais simplement sa couchette, il faudrait ce soir 11.827 nouvelles places.
Quand on parle de place, on ne parle pas de cellules. Aujourd’hui, il existe environ 41.000 cellules individuelles dans le parc pénitentiaire, c’est à dire d’une surface au sol de maximum 11 mètres carrés mais beaucoup accueillent en fait deux, voire quatre détenus. C’était le cas par exemple à Béthune, en 2014 où l’on comptait 356 détenus pour 180 cellules, toutes de neuf mètres carrés. Autant dire que l’encellulement individuel est impossible.

Pourquoi Manuel Valls le promet-il dans ce cas ?
 
D’abord il y a l’effet d’annonce. 1.400 détenus radicalisés sont sous écrou aujourd’hui, il faudrait pouvoir les isoler en cellules individuelles mais pour l’instant, c’est impossible. Il faut donc de nouvelles places.
Et puis l’autre raison, c’est qu’il n’a pas le choix. La loi impose l’encellulement individuel des détenus depuis 1875. Personne n’a pu le réaliser et la Cour Européenne des Droits de l’homme fustige régulièrement la France pour ses conditions de détention. C’est pour cela d’ailleurs que les gouvernements précédents avaient lancé, en 2002 puis en 2011, de vastes programmes de construction. Si ces programmes étaient allés à leur terme, on aurait eu, en 2017, un parc total de 70.000 places. Mais Christiane Taubira les a réduits pour ramener les nombre à 63.500 places en 2017 contre 69.000 détenus aujourd’hui, on n’y est donc pas. En fait, l’immense majorité des nouvelles places créées depuis juin 2012, il y en a eu 1.380, l’ont été du fait de programmes antérieurs au gouvernement actuel.
C’est en cela que l’annonce du Premier ministre est même cocasse puisque son plan de 10 000 places vise en fait à revenir à ce que voulait faire la droite en 2011. 70.000 places à terme, simplement pour se conformer à la loi sauf que ce sera cinq ans plus tard.