Petit Pays de Gaël : du bucolique à la guerre

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Chaque soir, Nicolas Carreau nous emmène à la découverte des plus belles nouveautés littéraires.

Petit Pays de Gaël Faye chez Grasset

On en parle beaucoup depuis quelques semaines. Il fait partie des sélections de nombreux prix. Et il est effectivement finaliste pour le Goncourt. Et pourtant, il s’agit du premier roman de Gaël Faye. C’est un roman en deux parties. Nous sommes d’abord au début des années 90, au Burundi, à Bujumbura. Il y a là Gabriel (mais tout le monde l’appelle Gaby), c’est le narrateur et le double littéraire de l’auteur, Gael Faye.

C’est un jeune garçon d'une dizaine d’années. Et bon, ce n’est pas la jeunesse africaine de la misère, au fin fond de la brousse, non, lui, Gaby, c’est un peu un privilégié. Sa maman est une réfugiée du Rwanda, le pays voisin, et son père est un Français. Ils vivent donc dans un quartier plutôt préservé, ils ont des domestiques. Gaby est un garçon joyeux, intelligent. Il s’amuse avec sa sœur et ses copains, ou plutôt sa bande : Armand, Gino et les jumeaux.

Ils font les 400 coups, ils squattent notamment un vieux combi Volkswagen, une épave au milieu d’un terrain vague, ils fument des cigarettes en cachette, ils chapardent des mangues chez la vieille voisine. Ils se bastonnent un peu avec un grand de 14 ans nommé Francis, peut-être pas si méchant qu’il en a l’air finalement. Gaby a même une correspondante française, Laure, qui lui demande s’il a bien reçu le riz que les petits français ont envoyé. Lui ne voit pas de quoi elle parle. Bref, une enfance normale et heureuse.

Du bucolique à la guerre. Tout cela, c’était avant. Avant bien sûr la guerre civile au Burundi et celle du Rwanda entre Hutus et Tutsies, avec les massacres que l’on connait malheureusement. Que l’on connait de loin. Lui, Gabriel, les vit de près, de très près. Il assiste à des meurtres et des lynchages au coin de sa rue. Sa bande de copains se transforme et rejoint un gang, un vrai, armé jusqu’aux dents. La folie s’empare du pays et n’épargne personne, surtout pas Gaby. On passe de l’odeur bucolique de citronnelle et des colibris qui butinent les hibiscus à l’horreur et l’absurdité de la guerre. On passe par tout le spectre des émotions. C’est un roman qui ne laisse pas de marbre.