Les arriérés d’impôts de Google et la location : les Experts d'Europe 1 vous informent

Alex Taylor 26.01.2016 1280x640 9:31
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SAISON 2015 - 2016, modifié à

Axel de Tarlé, Anne Le Gall, Jean-Philippe Balasse et Antonin André font le point sur l'actualité du jour.

Alex Taylor, expert international

Les arriérés d’impôts de Google en Grande-Bretagne provoquent de plus en plus de remous politiques.
 
170 millions d’euros d’arriérés sur 10 ans. C’est le deal qui vient d’être annoncé par les services fiscaux de sa Majesté au terme d’une "enquête" de six ans sur les activités d’optimalisation financière de Google. Somme initialement déclamée comme une grande victoire hier matin par le ministre des Finances, au 11 Downing Street. Le ton était plus flegmatique hier soir au 10, la résidence du Premier ministre, c’est un pas en avant. Entretemps en effet pas mal de personnes ont sorti leurs calculatrices pour signaler que cela revient à un impôt société de 3% sur les bénéfices.

Puis nous avons The Times, journal on ne peut plus conservateur, qui jette de l’huile sur le feu en indiquant gentiment à sa une ce matin que la France est en train de conclure avec Google un deal trois fois plus élevé, (500 millions d’euros) malgré le fait que Google fait trois fois plus de business et emploie quatre fois plus de personnes au Royaume Uni. Puis le maire de Londres, le turbulent Boris Johnson, conservateur mais qui se verrait bien au "Dix", parle d’un deal dérisoire "chickenfeed, la bouffe pour gallinacées, même pas !" car Google dépense apparemment 12 millions d’euros chaque année pour de la viande de poulet dans ses cantines à travers le monde.
 
C’est la droite qui se déchire, pourquoi ?
 
Le fond de l’affaire, c’est que cela sent de plus en plus mauvais autour du référendum. Les vautours commencent à tournoyer autour de Big Ben, et si on tend l’oreille dans l’espace entre ses gongs on aperçoit de façon spectrale le début du glas de l’ère David Cameron.

 

Anne Le Gall, experte innovation

Innovation : la plus grosse hydrolienne de France vient d'être immergée au large de la Bretagne.

C'est comme si on avait déposé, par 40 mètres de fond, un énorme réacteur d'avion aussi haut qu'un immeuble de quatre étages, c'est du jamais vu. Ce qui est surprenant, c'est que l'installation de cette énorme pièce d’acier a pris moins d’une heure car après avoir été tractée sur des barges au large de Paimpol, dans les Côtes d'Armor, l'hydrolienne a tout simplement été immergée à l'aide d'un treuil sans qu'il y ait besoin de l'arrimer au sol. Son poids d'environ 1.000 tonnes suffit à la stabiliser.

Produit-elle déjà de l'électricité ?

Elle est sur le point de la faire. Les plongeurs attendent juste des conditions météo favorables pour la raccorder au réseau EDF par un câble sous-marin. Ensuite cette hydrolienne produira alors de quoi alimenter un millier de foyers en électricité de façon permanente car évidemment les courant marins agissent 24h/24.

Une deuxième turbine, elle aussi conçue par le groupe DCNS, viendra très vite compléter ce dispositif mais même si l'électricité produite est réellement utilisée par EDF, cette source d’énergie par hydrolienne devrait encore rester expérimentale pour les sept ou huit ans à venir. Avant de commercialiser ces machines, il faut faire des tests de maintenance et s'assurer qu’elles fonctionnent durablement sans nuire aux fonds marins. Si tout va bien, sept autres hydroliennes seront installées au Raz Blanchard, à la pointe du Cotentin, en 2018 pour poursuivre les tests.

Mais ça ne tue pas les poissons ce genre de turbine ?

Non car l'hydrolienne tourne très lentement, les poissons peuvent donc passer à travers la turbine sans se faire happer. C’est en tout cas ce qu’assure le fabricant et vous l’imaginez bien que les défenseurs de l’environnement surveillent tout ça de près.

 

Axel De Tarlé, expert économie

C'est une révolution en matière d'immobilier : bien souvent désormais, la location est plus rentable que l'achat. Durant plus de 20 ans, l'achat a toujours été gagnant sauf dans les grandes villes où les prix sont tendus. Selon une enquête de l'Expansion, les villes comme Paris, Lyon ou encore les banlieues chics, l'achat est perdant. Dans ces villes, il faut attendre 10 à 15 ans pour rentabiliser un achat immobilier or, on vend bien avant.

Savez-vous quelle est la moyenne de détention d'un bien immobilier ? La moyenne de détention d'un bien immobilier est de huit ans parce que que la famille s'agrandit, parce que les gens divorcent, ou encore parce qu'ils changent d'emploi. Concrètement, ceux qui vendent aujourd'hui ont acheté 2008.

Quel a été le grand changement ? Les prix n'ont pourtant pas bougé depuis 2008, depuis huit ans. Avant lorsque l'on achetait, on avait l'assurance de revendre plus cher et donc, de monter dans l’échelle de l’immobilier. C'est désormais fini, les prix sont en dent de scie et ceux qui ont acheté en 2008 ont du mal à revendre. Certains ménages, faute de pouvoir revendre, se retrouvent à devoir assumer un remboursement de crédit en plus d'une nouvelle location. Sans compter les charges annexes comme les charges de copropriété, les normes thermiques ou la taxe foncière. C'est donc une situation financière très compliquée.

Les jeunes n'achètent plus sauf s'ils y sont contraints et forcés. A Paris, selon le Crédit Foncier, les trentenaires de 30 à 35 ans ne sont plus que 7 % à pouvoir acheter alors qu'en 1998, c'était 32 % qui pouvaient acheter.

 

Antonin André, expert politique

Une question ce matin : le président va-t-l gracier Jacqueline Sauvage ? Cette femme de 66 ans vient d'être condamnée à dix ans de réclusion pour avoir tué son mari de trois coups de fusil dans le dos en 2012. Après 47 ans d’enfer : coups et abus sexuels sur elle et deux de ses filles.

Le président est très attentif, au dossier qui est en cours d’instruction à la Chancellerie. L’Élysée n’en dit pas d’avantage. Ce que je peux vous dire, c’est que la grâce de cette femme, qui a subi 47 années de violences insupportables, qui est victime avant d’être meurtrière, ne va pas de soi. C’est d’autant plus difficile à concevoir que la mobilisation en sa faveur est très forte. Donc la décision de François Hollande aura un écho retentissant. Toute proportion gardée, on se souvient du refus de Giscard d’Estaing de gracier Christian Ranucci, condamné pour le meurtre d’un enfant et exécuté en 1976. La dernière grâce présidentielle retentissante c’est celle d’Omar Raddad par Jacques Chirac en 1996.

312.000 personnes ont signé une pétition qui demande sa grâce. Des députés les Républicains et même le Premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis demandent aussi la compassion du Président. On ne voit pas bien ce qui s’y oppose.

François Hollande par principe est contre la grâce présidentielle. La conception du Roi Thaumaturge qui efface tout est à l’opposé de la séparation des pouvoirs dont il s’est fait une règle absolue. Il n’a jamais accordé de grâce individuelle.  Il y a ensuite l’affaire en elle-même. Le rouleau compresseur médiatique empêche qu’on émette le moindre questionnement mais Jacqueline Sauvage a été condamnée par deux cours d’assises différentes, à 10 ans de prison. Par deux fois les circonstances atténuantes ont été retenues mais les jurys populaires, les citoyens qui ont eu à se prononcer l’ont condamnée. Au-delà de la compassion et de l’humanité de la grâce, ce qu’a subi cette femme est odieux, il faut aussi se poser la question de la portée politique : remise en cause de l’institution judiciaire, du jugement populaire et une forme de tolérance à se faire justice soi-même ? Ce sont tous ces éléments qui sont posés. La question de la grâce de Jacqueline Sauvage est plus complexe qu’il n’y paraît pour celui qui a à prendre la décision. Une décision qui en dernier ressort relèvera de l’intime conviction d’un Homme François Hollande.

A noter que François Hollande peut très bien commuer sa peine ou la réduire, sans aller jusqu’à la grâce. La grâce n’efface pas la condamnation : Omar Raddad a été gracié mais son innocence n’est pas reconnue.