Afrique du Sud : les "Fourmis rouges" contre les "envahisseurs illégaux"

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On va d’abord à la rencontre des "Fourmis rouges". C’est comme ça que les Sud-Africains appellent ces miliciens qui s’occupent de vider les squats, parfois de manière assez musclée.

On les appelle "fourmis rouges", parce qu’on dirait vraiment une colonie au travail, quand ces hommes débarquent. C’est assez impressionnant. Ils arrivent par camions entiers, entassés, bien rangés. Leur nombre évoque une fourmilière : ils sont plusieurs centaines à chaque fois, tous en combinaison rouge, casque rouge et souvent ils chantent.

Leur job ? Déloger les "envahisseurs illégaux" des propriétés où ils se sont installés. Parfois ce sont de grands immeubles désaffectés, parfois des terrains sur lesquels des camps de fortune ont été bâtis. Les "fourmis rouges" ont la réputation d’agir sans ménagement : ils sortent les récalcitrants manu militari, jettent toutes leurs affaires dehors, et cassent leurs installations. Régulièrement ils font la Une des médias, accusés de violences, de vol et parfois même de meurtres.

Mais c’est légal ?

Absolument, c’est une société de sécurité privée, créée il y a 20 ans, installée dans une immense ferme de la province de Gauteng, où sont situées les villes de Pretoria et Johannesburg.  Et ce sont les municipalités elles-mêmes, ou les propriétaires des immeubles, qui font appel aux Fourmis Rouges pour exécuter des décisions judiciaires d’expulsion. D'ailleurs souvent, quand ils arrivent sur place, ils sont escortés par la police. Ces hommes en rouge sont extrêmement solidaires les uns des autres, disent former une famille. Beaucoup sont jeunes, sans formation, ils viennent des petites villes minières, de villages éloignés, de banlieues difficiles. Ils sont pauvres et touchent 8,50 euros la journée.

Des profils sans doute très proches de ceux des squatteurs qu’ils délogent ?

Exactement, d’ailleurs certains sont eux-mêmes sans logement, squatteurs. Ils ont pris le boulot là où ils en ont trouvé. Par ailleurs dans ces grands immeubles, par exemple dans le centre de Johannesburg, les familles payent souvent un loyer à des intermédiaires, des escrocs qui se disent propriétaires. Idem pour des parcelles de terrains, dans les banlieues, où poussent les bidonvilles. C’est tout le paradoxe de cette société sud-africaine, toujours très inégalitaire. Et dans laquelle le mal-logement est un marqueur fort et un héritage du régime de l’apartheid.

Direction la Belgique maintenant, où l’éventuelle régularisation d’un couple de migrants sans papiers fait aussi la Une des journaux. Elle rappelle l’affaire Mamoudou Gassama chez nous. Sauf que chez nos voisins, l’histoire est tragique. Tragique car il s’agit de savoir si on régularise ou non les parents d’une petite fille irakienne tuée par la police belge lors d’une course poursuite.

Oui, ça s’est passé il y a quelques jours, les forces de l’ordre poursuivait la camionnette d’un passeur. Elle transportait la petite Mawda, sa famille et d’autres migrants, une trentaine au total. Ils venaient du camp de Grande-Synthe, près de Dunkerque et ils voulaient passer en Angleterre.

Pendant la poursuite, un policier a tiré, pour arrêter la fourgonnette, mais la balle a atteint la petite fille en pleine tête. L’enquête est en cours pour savoir exactement comment ça s’est passé mais, malgré les appels au calme, l’émotion est très forte ici et l’affaire tourne à la polémique politique.

Pourquoi cela ?

Parce qu’à travers la mort de cette enfant, c’est la politique migratoire très ferme du gouvernement belge qui est contestée. Le ministre de l’Intérieur et son secrétaire d’Etat à l’intégration sont deux nationalistes flamands, la droite dure donc. Ils ont pris tout de suite la défense des policiers. Ce week-end, le président de leur parti a même déclaré que les parents de la petite fille portaient en bonne partie la responsabilité de son décès. Le père et la mère de Mawda sont des kurdes irakiens, ils ont déjà fait plusieurs tentatives de passage vers l’Angleterre. Désormais ils veulent demander l’asile en Belgique où leur fille sera enterrée après-demain.

Est-ce que les autorités sont prêtes à les régulariser ?

Le premier ministre a fait part de son "empathie" mais le secrétaire d’Etat à l’intégration préférerait leur donner simplement un droit de séjour provisoire, à condition qu’ils aident à identifier les réseaux de passeurs. Cette demande fait bondir les associations qui soutiennent les migrants. La plus connue ici demande d’ailleurs aux communes belges de mettre leurs drapeaux en berne pour l’enterrement.

Au final, c’est le gouvernement belge dans son ensemble qui va délibérer et statuer. Pour le moment, les autorités ont juste accepté que les parents de la petite fille ne soient pas expulsés vers l’Allemagne, là où ils avaient déposé leur première demande d’asile.

Et on finit par retournez en Afrique du sud, mais cette fois pour parler rugby...

Pour saluer une 1ère : les Springboks, le XV sud-africain, vient de nommer le joueur Siya Kolisi, capitaine pour la tournée d’été de l’équipe. Or ce troisième ligne est noir, ce qui n'était jamais arrivé jusqu’ici. Siya Kolisi, né dans un township de Port-Elizabeth, compte 28 sélections. Il est international depuis 2013.