Natacha Polony, La Revue de presse 01.02.2015 1280x640 7:11
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La presse quotidienne revient ce lundi sur les primaires américaines entre Hillary Clinton d'un côté et Donald Trump de l'autre.

Ce matin en Une de vos journaux on trouve un affreux petit moustique qui fait peser sa menace sur les Antilles après l’Amérique Latine :
Le Parisien : Faut-il avoir peur du virus Zika ?
20 minutes : Poussée de fièvre.

Mais des poussées de fièvre, il y en a d’autres :
le Figaro : Primaires, déchéance, chômage : François Hollande attaqué sur tous les fronts.
Libération : Police et armes à feu : légitime défiance.

Primaire américaine

A droite, à gauche, tout le monde ne pense plus qu’à ça, avec un but affiché en Une de l’Opinion : la montée en puissance du tout sauf Hollande. Mais aujourd’hui, c’est de l’autre côté de l’Atlantique que la presse française prend des leçons de primaire : La Croix : L’Amérique en campagne. Les Echos : Trump-Clinton, la guerre des deux Amériques. Le Monde : Iowa : premier test électoral pour les candidats anti système. Un maitre mot dans le Monde pour essayer de comprendre ce phénomène qui semble échapper aux analystes français : la colère. La colère des ultra-conservateurs qui porte Ted Cruz. La rage des laissés pour compte, en majorité blancs, peu diplômés et aux revenus modestes qui permettent à Donald Trump de déjouer les pronostics depuis plusieurs mois. Comme si les journalistes avaient beaucoup de mal à saisir l’ampleur et le sens de cette colère. Dans un long reportage, Nicolas Bourcier parle de ces petites classes moyennes qui ne supportent plus le sentiment d’impuissance, l’impression que tout leur échappe et que les décisions se prennent très loin, dans l’ailleurs des élites.  Un mouvement qui constitue sans doute une des étapes dans la lutte des classes dont le milliardaire Warren Buffett disait que les riches étaient en train de la gagner.

Sécurité

Pour répondre à la colère, en France, il y a la sécurité. Les mesures prises depuis le 13 novembre pour montrer à l’opinion que l’Etat n’est pas totalement impuissant. L’Humanité parle de cynisme et Libération s’interroge sur les garde-fous. En première ligne, l’article 20 du projet de réforme pénale qui modifierait les règles d’ouverture du feu pour les policiers. Et ce reportage à Créteil, avec les éternels mots de permis de tuer, carte blanche donnée aux policiers. Mais le plus intéressant ce sont finalement les réflexions de ces policiers qui essaient d’analyser ce qu’aurait changé cet article 20 le 8 janvier face aux frères Kouachi ou le 13 novembre au Bataclan. Saïd, l’aîné des frères Kouachi, prend de l’essence, un lance-roquette en bandoulière. En droit, pouvait-on les abattre ? Difficile, voire impossible avec l’ancienne loi explique un policier. Il fallait que l’arme se voie ostensiblement, qu’elle soit sortie de son étui et que les tirs soient engagés avec les suspects. Dans les mots des policiers, on entend les réticences, l’obsession de la bavure, la peur du procès. Pour les avocats, en revanche, la nouvelle loi est inutile. Pour un chercheur du CNRS, elle rendra le travail des policiers encore plus compliqué. Vu du CNRS.

Migrants

Il y a cette photo dans Libération. Un enfant sur un rocher, petit frère de malheur d’Aylan Kurdi, comme tant d’autres sans nom. Mais à côté de l’image, il y a ce chiffre repris par le Parisien. D’après Europole, sur les 270.000 mineurs entrés illégalement en Europe depuis au moins un an et demi, 10.000 manquent à l’appel. Passés dans un autre pays, tombés entre les mains du crime organisé. Le président de France terre d’asile parle même de trafic d’organes. Dans le Figaro, Serge Michaïlof, ancien directeur de la banque mondiale, lance une alerte. Il prévient que la déstabilisation du Sahel francophone par l’État Islamique pourrait envoyer vers nous des millions de personnes alors que nous n’avons pas mis en place les structures pour les accueillir correctement. Il cite les travaux d’un chercheur britannique montrant que plus les cultures des immigrés sont éloignées de la culture d’accueil plus l’intégration est lente et plus se constituent des diasporas qui préservent leur culture d’origine et fonctionnent comme des aimants pour les nouveaux arrivants. Un défi pour plusieurs décennies qui nécessite courage et vision politique.

Prendre goût à la vie

Le Monde revient sur cette nouvelle mode chez les cadres urbains de se lever aux aurores pour penser à soi, se faire du bien, pratiquer le yoga ou le jogging avant de plonger dans le rythme infernal de la journée. Des témoignages de quadras stressés qui racontent que leur vie a changé après la lecture de tel livre d’un gourou morningophile. Une étrange impression pourtant surgit de cet article quand on comprend que ce qui devrait être une reprise en mains de sa propre existence devient en fait une occasion de plus de développer ses performances sous le regard approbateur des dirigeants d’entreprises. Même nos petits matins tranquilles ne nous appartiennent pas.

Trucs d’agents secrets

C’est une exposition au musée d’archives nationales dont nous parle le Parisien. Des objets qui nous racontent les secrets de l’État. Une magnifique boite du 16ème siècle dont les jolis engrenages permettaient au roi Henri II de produire l’une des premières écritures codées. Une autre qui ressemble à un combiné téléphonique et un compteur électrique. La ligne cryptée qui permettait à Charles de Gaulle de converser à Leonid Brejnev. Et puis ce chiffre que je vous donne : 571 302 1/3 griffonné sur un bout de papier et scotché à une carte de visite, celle de Pierre Mesmer ministre des armées, futur premier ministre. C’est le code de la bombe atomique. Comme il devait l’avoir sur lui, et qu’il ne pouvait pas le planquer dans un portable, il l’avait mis dans sa poche. On est loin de James Bond.

 

Tous ces objets pourraient être embarqués sur la croisière très spéciale dont nous parle le site Slate. Parce qu’il y a les croisières des idées qui permettent à nos retraités d’écouter d’éminents intellectuels, mais aux États-Unis, la firme Princess Cruises propose un autre type de voyage. Pour le paysage, celui de la riviera mexicaine. Et pour les conférences, tout ce qui se fait en matière de complotisme. Sur la Conspira-Sea, vous entendrez parler vaccinations, OGM, 11 septembre, agenda Star Wars, Bilderberg et autres groupes d’influence. La petite fille du président Eisenhower s’y présente comme alchimiste globale et un intervenant propose de démontrer que l’idée que vous allez mourir est une conspiration. Tous ces gens, à leur retour, iront sans doute tranquillement voter pour les primaires américaines.