Natacha Polony, La Revue de presse 29.01.2016 1280x640 5:51
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La presse quotidienne revient ce vendredi sur la demande grâce présidentielle de Jacqueline Sauvage.

Ce matin en Une de vos journaux c’est un nom et un appel à la compassion :
La Dépêche du Midi : Faut-il gracier Jacqueline Sauvage ?
20 Minutes : Touchée par la grâce ?

Mais François Hollande a quelques soucis moins nobles en ce vendredi :
Le Monde : Hollande se passe de sa gauche.
Le Figaro : la gauche à couteaux tirés après le départ de Taubira.

Pendant ce temps, Libération se lance dans un grand combat féministe en se demandant pourquoi de la teinturerie au coiffeur, en passant par le rasoir, c’est toujours plus cher pour Madame : le coût d’être une femme.

Et puis en matière de coût, L’Opinion nous présente l’addition : Hollande envoie ses vœux les plus chers. Dix discours et 10 milliards d’euros de promesses. Entre le financement du logement social et le plan pour l’emploi, les vœux 2016 du président sont pour nous mais il espère que la bonne année 2017, ce sera pour lui.

Laïcité

C’est la Une de Marianne cette semaine : de Jean-Louis Bianco à Patrick Buisson, ils veulent tuer la laïcité. Le journal se saisit d’un débat qui agite la gauche depuis ces dernières semaines. Un débat qui fracture le couple exécutif, entre un Manuel Valls positionné depuis longtemps sur ce sujet et un Jean-Louis Bianco proche de François Hollande et historiquement lié à la naissance de SOS Racisme et du fameux droit à la différence. Il faut lire notamment les 4 pages de Guy Konopnicki qui retracent l’histoire de la gauche sur 40 ans, des affrontements sur l’école libre aux  renoncements sur les premières affaires de voile. L’article rappelle que le mal vient de loin. Les premières revendications confessionnelles dans les usines Citroën dès 1982 bousculent déjà le parti communiste. Les circonlocutions d’une Clémentine Autin sur l’affaire de Cologne en sont la lointaine conséquence. Pascale Boistard, la secrétaire d’État aux Droits des Femmes, s’insurge du fait que dans beaucoup de quartiers, les femmes sont cantonnées à certains espaces, le foyer, la sortie d’école, et quasiment absentes d’autres comme les lieux sportifs ou les lieux de convivialité. Avec un art consommé de l’euphémisme, elle remarque que l’Observatoire de la Laïcité s’est encore peu saisi de cette question des droits des femmes. Dommage. C’est un débat au moins aussi crucial que celui sur le prix des rasoirs jetables.

Raconter la vie des gens

Il y a deux reportages ce matin qui valent d’être lus. Ils nous transportent en deux points cardinaux de la France. Tout au sud, il y a Lunel. Dans Le Monde, Florence Aubenas est retournée dans cette petite ville meurtrie par le départ de ses jeunes pour le djihad. Ces garçons qu’on regardait comme des victimes d’endoctrinement mais dont certains sont devenus des bourreaux. Le préfet regrette les échecs collectifs des services sociaux qui ne signalaient pas les cas de radicalisation pour ne pas se prêter à la délation. De l’Education nationale qui n’avertissait pas qu’un élève séchait les cours depuis trois mois au motif qu’il était majeur. Et puis ces communautés qui depuis très longtemps ne se mélangent pas. Et la mosquée, trop grande, trop majestueuse, dont le chercheur Gilles Kepel dit qu’elle est la seule dans laquelle il n’a pas eu le droit d’entrer. A l’autre bout de la France, tout là-haut, il y a Calais. Dans Marianne, Vladimir de Gméline est allé à la rencontre non pas des migrants mais des Calaisiens dont la vie, dit-il, a basculé dans un quotidien ahurissant. Les Anglais qui venaient faire leurs courses de Noël ont disparu remplacés par des humanitaires, des associations musulmanes. "Calais fait étrangement penser à certaines villes en guerre ou assiégées, avec ses hot spots, les endroits où tout le monde se retrouve, comme ce bar-restaurant qui ne désemplit pas et où l’on voit certains soirs des CRS en civil draguer les humanitaires anglaises aux bottes pleines de la boue de la jungle". Et puis l’aspect de leur ville qui a changé. La cité Europe et sa zone boisée rasée par l’État parce que les migrants s’y cachaient avant d’escalader les grilles du tunnel. Récemment, la situation s’est dégradée sous l’influence des no borders, des militants anglais et allemands qui incitent les migrants à la révolte. Ici, la résignation le dispute encore à la colère et empêche pour l’instant les débordements.

Antibiotiques

Alors que toute la presse célèbre la victoire de l’intelligence artificielle sur le cerveau humain, L’Obs nous alerte sur un problème qui pourrait nous renvoyer très loin en arrière. La découverte d’une bactérie résistant aux antibiotiques de dernier recours ébranle le monde de la science. Imaginez un monde, ou des infections courantes et des blessures mineures, qui ont été soignées depuis des décennies, pourraient à nouveau tuer. Il y a bien sûr des voies à explorer. L’Obs nous raconte comment des chercheurs inventent de nouveaux médicaments en s’appuyant sur les ennemis naturels des bactéries. Mais l’urgence, nous rappelle le journal, c’est d’arrêter de traiter massivement les animaux d’élevage. Finalement, résoudre la crise paysanne en limitant l’agriculture intensive, ça pourrait aussi nous sauver la vie.

Une femme oubliée

Elle s’appelait Stéphanie St-Clair, et c’est le magazine Stylist qui nous raconte son histoire. Dans le New York des années 20, elle cumule les handicaps : femme, noire et française. Et pourtant, elle a monté son propre gang de loterie clandestine. Manteau de fourrure, fume-cigarette en or à la bouche, Ford T avec chauffeur, elle n’hésite pas à jouer du pistolet et à émasculer au rasoir le chef d’une organisation de racket. Tout pour ne pas redevenir une petite bonne de Fort-de-France. Elle tient même une tribune hebdomadaire dans le journal noir le plus respecté des États-Unis, le New York Amsterdam News. Elle y développe un discours sur le racisme, les droits civiques, la pauvreté. Une figure féminine, féministe, anti-raciste. Certes, pas très recommandable, et on ne saura pas si le rasoir qu’elle a utilisé lui avait coûté plus cher parce qu’elle était une femme.

 

 

Ultime combat du féminisme, le journal 20 Minutes nous raconte cette immense victoire : Barbie ne fera plus du 34. Enfin plus seulement. Il y aura des modèles un peu différents, des petites, des grandes et même des rondes. Des filles normales quoi. Elles continueront à faire du shopping en réfléchissant à la couleur de leur vernis à ongles mais avec un peu de chance, elles militeront contre la surtaxe des produits pour les femmes. Bon, elles n’auront pas le droit d’aller se promener dans certains quartiers, mais ça, ça n’est pas un combat féministe.