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S'il est facile de critiquer la mauvaise gestion de l'Etat, il est plus intéressant de regarder quels processus ont mis à mal les fleurons de notre économie.

A la Une de vos journaux ce matin, on s’inquiète de la montée des tensions. Entre partenaires européens, d’abord. Libération titre :  "Europe : le risque autoritaire."Et puis, entre individus, Le Parisien met en une "Réseaux sociaux : stop à la haine."

Le Parisien dénonce le défoulement facilité par le règne de l’anonymat, même contre une mère dont le crime est d’avoir un fils de 3 ans autiste scolarisé dans une école normale. L’abjection, c’est simple comme un tweet sous pseudo.

On s’inquiète aussi pour l’économie française, comme les Echos "Pourquoi la chute des marchés s’accélère ?" ou  Le Figaro "La surtaxation du capital mine l’économie française."

RSA.

Le sujet passionne les éditorialistes. La délibération (versement du RSA contre une activité bénévole de 7 heures), votée par le conseil départemental du Haut-Rhin, scandalise ou intéresse.  Démagogie pour Alain Dusart dans l’Est Républicain, qui note que si chaque année les caisses d’allocations familiales versent 81 milliards de prestations, sur le milliard de fraudes, 70 % concerne le RSA. La tolérance de ces dérives par les contribuables s’amenuise, dit-il, surtout quand des politiques simplistes leurs désignent des boucs émissaires. Au contraire, Raymond Couraud dans l’Alsace, juge qu’il n’est pas scandaleux de demander quelques heures de temps à ceux qui vivent de la solidarité nationale. Dans le Républicain Lorrain, Bernard Maillard rappelle que les départements ne sont que des guichets distributeurs. Ils n’ont aucun pouvoir de décision. « L'affaire illustre au fond la frustration des élus départementaux qui aimeraient tant faire la loi quand ils ne sont que des gestionnaires. C’est dommage pour leur ego mais c’est heureux pour la cohésion nationale ». Mais comme le fait remarquer Dominique Greiner dans La Croix, l’objectif des élus du Haut-Rhin est surtout d’alerter sur la situation financière des départements. Quoi qu’on pense de la méthode, voilà le vrai sujet.

Industrie.

Ni l’état ni les départements n’ont plus d’argent, on fait des économies de bout de chandelle. Pourquoi ? S’il y a un article à lire ce matin, c’est l’entretien sur le site Causeur avec le journaliste économique Jean-Michel Quatrepoints. Si les considérations sur l’incurie des politiques dans la gestion de l’Etat sont légion mais qu’il est très rare de citer nommément, arguments à l’appui, tous les dirigeants d’entreprises qui ont contribué à la destruction des fleurons de notre industrie : Alstom, Alcatel, Areva, Sanofi, etc. Ce qui nous est décrit, c’est une vente à la découpe de la part d’anciens hauts fonctionnaires venus pantoufler dans le privé et préoccupés seulement de gestion à court terme et de performances financières. Face à eux, un impérialisme américain décomplexé. On apprend par exemple que les Etats-Unis se sont arrogés le droit de bloquer toute vente d’équipements, avions de chasse ou satellites, dès lors que ceux-ci contiennent un seul composant de conception américaine. Il serait donc impératif que la France reconstitue une capacité à produire ses propres composants. Le ministère de la Défense y est acquis, mais ça n’intéresse pas Bercy. On préfère se dire qu’on va sauver l’économie française avec des autocars et des panneaux publicitaires à l’entrée des villes.

Agriculture.

Quand on parle de fleuron français, elle est partout. La Croix titre : "l’agriculture a encore un avenir." A la Une de L’Opinion on peut lire : "Crise agricole : la grande hypocrisie des prix." Mais c’est dans Libération qu’on trouve une tribune qui résume parfaitement le problème. Le plaidoyer d’un universitaire pour une exception agricole française. François Collart-Dutilleul démonte la logique d’une Europe qui a choisi la libéralisation des marchés et l’industrialisation de l’agriculture. Il explique que les distorsions de concurrence perdurent au sein de l’Union, tirant vers le bas la qualité. Plutôt qu’un traité de libre-échange, donc, une exception culturelle. « Si la l’agriculture nous offre Star Wars, sans Rives et la famille Bélier, au bout, on aura le Titanic. »

Martine au quai d’Orsay.

Pendant ce temps, Le Parisien nous apprend que Martine Aubry aurait fait discrètement acte de candidature pour le quai d’Orsay. Pas du tout pour damner le pion à Ségolène Royal mais parce qu’elle serait légèrement affaiblie dans sa région et y verrait un accord gagnant-gagnant. Caution de gauche et neutralisation d’une force de nuisance contre poids politique. Bien sûr, l’Elysée dément formellement ce matin les informations du Parisien.  D’autant que le journal sur la page d’à côté décrit les manœuvres du cercle des hollandais historiques (mais qu’on se garde de nommer) pour que le président se défasse d’un premier ministre qui travaillerait à sa perte. Peu probable. Mais l’expectative rend les imaginations débordantes.

Le centre de gravité des peoples.

C’est un amusant article sur le site Rue 89. Une équipe de chercheurs de Sciences-Po s’est amusée à cartographier les lieux de naissance des personnalités qui ont une fiche Wikipia (1,2 millions). Résultat, sans grande surprise : jusqu’en 500, les personnages célèbres se trouvent plutôt du côté de la Grèce. On se déporte ensuite progressivement vers l’Ouest jusqu’aux Etats Unis. Plus intéressant, on remarque en comparant les lieux de naissance et de mort, que ces personnes, jusqu’en 500, sont relativement mobiles. Puis au moyen-âge, tout se fige. Et surtout, les artistes et entrepreneurs ont bien plus d’influence sur l’expansion de leur ville de naissance que les politiques. Lille ne perdrait pas grand-chose au départ de Martine Aubry pour Paris ? Les chercheurs ne vont pas jusque-là.

Circonflexe.

Le formidable magazine Virgule a bouclé son dernier numéro avant la polémique sur la réforme de l’orthographe. Résultat : une superbe double page d’éloges de l’accent circonflexe avec toutes les règles qui en expliquent la logique. Mais il y a aussi le mot du mois proposé par la société protectrice des mots. Cette fois, c’est lambiner, dérivé de lambin, une variante de lambeau, un chiffon. Il peut même "lambinasser", plus cocasse. Bref, celui qui lambine est une chiffe molle. Rien à voir avec les remaniements qui traînent et laissent s’échauffer les esprits.