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Chaque jour, Marion Lagardère scrute la presse papier et décrypte l'actualité.

Dans la presse ce matin, "l’art de convaincre".

C’est la couverture du magazine Le Point cette semaine : "entreprises, examens, vie publique, la prise de parole s’impose et s’apprend, des experts livrent leurs conseils". De l’entrepreneuse Aurélie Jean, à maître Dupont-Moretti, vous aurez donc toutes les clés pour "convaincre".

Car voilà, c’est la préoccupation du moment, non pas l’art d’échanger ou de dialoguer, mais celui de "convaincre". Et c’est précisément ce qu’a essayé de faire Emmanuel Macron hier dans les Vosges. "Dans le bain des colères, il a refusé de reculer", nous dit le Parisien. "Sa stratégie apparait payante, ajoute l’Opinion." Pour l’Est Républicain, aussi, c’est réussi. En page 2, on vous raconte comment "il est allé au contact, serrage de mains, selfies et autres embrassades, une heure d’opération séduction, écrit Sébastien Colin, jusqu’à ce que des sifflets se laissent entendre. Emmanuel Macron ne se démonte pas et décide d’aller en personne évoquer sa réforme de la SNCF. Le président répond calmement mais avec autorité. Droit dans ses bottes et les yeux dans les yeux : "j’entends vos revendications, mais je ne flancherai pas". Reste à savoir, conclu l’Est Républicain, si le message a convaincu." Mais à lire le Figaro, ce n’est pas si évident.

Mathilde Siraud rapporte les échanges tendus avec les cheminots : "je ne méprise personne, je vous demande simplement de ne pas prendre tout le monde en otage", lance le chef de l’Etat, "les gens ne sont pas des otages, lui hurle un manifestant, et nous ne sommes pas des terroristes, vous n’écoutez rien". Un peu plus tard, note Le Figaro, le président s’emporte, "mais bon sang de bonsoir, je veux que vous compreniez !" Quand l’art de convaincre ne prend pas, il reste "bon sang de bonsoir". Avec ça "comment asseoir son autorité sans basculer dans l’autoritarisme ?", demande Florence Chédotal dans la Montagne, ajoutant que "l’autorité, pour être acceptée, doit toujours s’accompagner d’un sentiment de justice."

Et puis "l’art de convaincre" sur le thème de l’égalité salariale femme/homme en entreprise : c’est le dossier du magazine Challenges.

Et Vincent Beaufils le concède dans son édito : "nous avons fait un flop. Au moment où le gouvernement met la dernière main à sa loi sur le sujet, Challenges voulait apporter une contribution la plus proche possible de la réalité. Nous avons donc envoyé un questionnaire au DRH des 250 premiers employeurs de France, avec une demande extrêmement simple, dit-il : nous faire parvenir l’extrait du rapport de situation comparée des salaires des hommes et des femmes aux postes de cadres. Résultat : il ne s’est pas trouvé une entreprise sur 10 prête à diffuser son rapport. Au sein du CAC 40, seuls 8 groupes (Airbus, Danone, L’Oréal, Michelin, Orange, Schneider, Solvay et ST Micro) ont accepté de communiquer.

Manière de reconnaître, écrit Challenges, qu’il ne s’agit pas d’un motif de fierté." Et effectivement, dans le dossier, on trouve les chiffres : l’écart de salaires homme/femmes en fonction de l’âge, près de 27% pour les plus de 50 ans. Ou encore en fonction du statut : 15% d’écart chez les ouvriers, et 20% chez les cadres... "Il n’y a plus d’échappatoire !", titre le magazine, autrement dit, un acte d’autorité du législateur serait le bienvenue. "A propos, à quoi ressemble notre écart salarial chez Challenges ?, conclu Vincent Beaufils, réponse : il y a aujourd’hui 3,5% d’écart entre nos journalistes femmes et hommes, encore un effort.", dit-il. Voilà, un numéro engagé pour tenter de convaincre les DRH. "Encore un effort !", c’est justement le cri du cœur sur le thème en couverture de Causette. Enfin, vous pouvez lire aussi le dossier de la revue Books qui fait sa Une sur "les femmes et le pouvoir : pourquoi sont-elles encore si peu nombreuses à l’exercer".

Et puis, ceux à propos desquels on parle beaucoup "d’autorité" dans la presse, ce sont les jeunes.

Eh oui, c’est un mantra qui ne date pas d’hier : le jeune a besoin d’être cadré. Cadré dans sa révolte universitaire, c’est la Une de Midi Libre qui titre sur "la fac de Montpellier bientôt évacuée." Cadré avec le service militaire, ça c’est l’enquête de l’Opinion, qui l’affirme, "selon nos information, écrit le journal, c’est un "temps de vie partagée" d’une semaine qui est privilégié, non pas en caserne mais "en internat". Bref, on est loin, note Jean-Dominique Merchet, des trois à six mois envisagés par le président". Comment cadrer le jeune ? C’est compliqué. mais ce qui est sûr, explique encore une surveillante de collège dans le Parisien, c’est qu’il faut commencer tôt.

Nora Bussigny vient de publier un livre sur son expérience et elle raconte les trafics de drogue dès 13 ans, les échanges de photos de nues sur Snapchat, sans compter les bagarres à répétition, et cette fois où "des élèves ont apportés une matraque, des lacrymo et un pistolet à impulsion électrique pour régler leurs compte dans le collège."
Un récit édifiant mais, depuis la publication du livre "la situation se serait améliorée dans le collège en question". Voilà c’est à lire donc dans le Parisien.

Et puis dans La Croix, il y a aussi ce titre qui dit beaucoup : "17 ans et déjà discipliné". Reportage avec les élèves du lycée hôtelier Saint-Bénigne à Dijon.  "Pour ces jeunes, écrit Gauthier Vaillant, la vie rêvée n’a rien d’une utopie, "parce que l’hôtellerie, c’est un milieu qui nous apprend à être modeste", explique Romain, 17 ans. "Et surtout, on est sûr de trouver du travail", ajoute Marie. Des jeuens dont les idoles ne sont "ni Ghandi, ni Mandela, note le journal mais Mickael Jackson et Gian Luiggi Buffon, le gardien de but de la Juve." Voilà, c’est un reportage publié dans La Croix et dans lequel, une fois n’est pas coutume, les intéressés ont la parole.

Enfin, témoignage dans Psychologies magazine sur l’époque mai 68 : "j’ai grandi dans une communauté".

Nolwenn a aujourd’hui 47 ans et elle raconte son enfance quand ses parents ont décidé de s’installer dans un moulin avec une quinzaine d’amis, pour vivre en communauté.  "Nous n’avions pas de télé, pas de bonbons, pas de coca, pas d’habit neuf, pas de cinéma, dit-elle, rien qui viennent de la société de consommation, mais on ne s’en rendait compte que quand on allait chez les autres enfants du village. Et eux adoraient venir jouer au moulin.

En revanche, nous avions un rapport différent du leur à la liberté : mises à part quelques règles très claires, du type obéir aux adultes, tout était permis. Le résultat c’est que la transgression ne nous intéressait pas, ce sont les autres enfants qui faisaient des bêtises !"

Aujourd’hui, elle a quitté le moulin depuis longtemps et a dû passer par une phase "d’hyperconsommation pour compenser", "mais avec le recul, conclu Nolwenn, c’était une enfance formidable et ça nous a permis d’être des adultes heureux avec des valeurs solides : partager et s’exprimer librement". Analyse de la pédiatre Catherine Guéguen : "La base de tout, c’est l’empathie, et ça n’a rien à voir avec le laxisme, c’est simplement en plus des règles éthiques, donner de l’attention. Et c’est ce dont manquait la société d’avant 68 et hélas, également, conclue-t-elle, notre société actuelle." Voilà, l’art de convaincre, ça passe aussi par l’empathie, c’est à lire donc dans Psychologies magazine.